Introduction
En 2025, selon le rapport UN-Water 2024, environ 2,2 milliards de personnes dans le monde n’ont toujours pas accès à une eau potable sûre.
UN-Water est une organisation des Nations unies qui coordonne les agences internationales travaillant sur l’eau (comme l’OMS, la FAO ou l’UNICEF). Son rapport annuel fait le point sur la disponibilité mondiale de l’eau et sur les progrès réalisés pour atteindre l’accès universel.
Ce chiffre rappelle à quel point l’eau, essentielle à la vie, à la santé et à la production alimentaire, est une ressource rare, inégalement répartie et de plus en plus convoitée. Face à la croissance démographique, au changement climatique et aux tensions entre usages, la question devient centrale : comment gérer l’eau de façon durable et équitable ?
L’eau, une ressource inégalement répartie et inégalement accessible
L’eau douce représente moins de 3 % de l’eau sur Terre, et à peine 1 % est directement disponible sous forme liquide dans les rivières, les lacs ou les nappes phréatiques. Cette faible proportion explique pourquoi l’eau est une ressource précieuse. Mais sa répartition n’est pas la même partout : certaines régions, comme l’Amazonie, le bassin du Congo ou l’Europe du Nord, disposent de grandes quantités d’eau, alors que d’autres, comme le Moyen-Orient, le Sahel (une vaste bande semi-désertique qui s’étend au sud du Sahara, du Sénégal jusqu’au Soudan) ou le Sud de l’Inde, vivent une pénurie chronique.
Les géographes parlent de stress hydrique quand la quantité d’eau disponible est inférieure à 1 700 m³ par habitant et par an, et de rareté absolue en dessous de 500 m³. Ces seuils sont déjà atteints dans plusieurs pays, comme la Jordanie, le Koweït ou le Yémen, où l’eau manque presque toute l’année.
Le changement climatique accentue ces déséquilibres. En provoquant la hausse des températures, il modifie les pluies et les saisons. Dans des zones comme le Sahel ou le Maghreb (région d’Afrique du Nord comprenant principalement le Maroc, l’Algérie et la Tunisie), les sécheresses sont plus fréquentes et plus longues, épuisant les sols et les nappes souterraines. En montagne, la fonte des glaciers réduit les réserves d’eau douce qui alimentent les fleuves des Alpes, des Andes ou de l’Himalaya. En Asie du Sud, les moussons deviennent plus irrégulières : certaines années, des pluies diluviennes provoquent des inondations, d’autres fois, des sécheresses détruisent les récoltes. Ces dérèglements rendent la ressource plus rare et plus imprévisible, ce qui fragilise les populations et les économies.
À retenir
L’eau douce est rare et mal répartie. Le réchauffement climatique perturbe les pluies, multiplie les sécheresses et rend l’approvisionnement plus incertain, surtout dans les régions déjà arides.
Étude de cas : le Nil, un fleuve vital et disputé
Le Nil, long de plus de 6 600 km, traverse 11 pays d’Afrique, dont l’Ouganda, le Soudan et surtout l’Égypte, où il est essentiel à la vie et à l’agriculture. Sans le Nil, l’Égypte — couverte à 95 % de désert — ne pourrait pas nourrir ses 110 millions d’habitants. Le fleuve irrigue la vallée fertile où se concentre presque toute la population.
Mais le Nil est une ressource partagée. Ses eaux proviennent de deux grands affluents : le Nil Blanc, qui prend sa source dans les Grands Lacs africains, et le Nil Bleu, issu des hauts plateaux d’Éthiopie. Depuis plusieurs années, un projet éthiopien provoque des tensions : la construction du barrage de la Renaissance, inauguré en 2022. Ce barrage doit produire de l’électricité pour tout le pays, mais il retient une partie de l’eau du Nil Bleu, ce qui inquiète l’Égypte, dépendante du fleuve pour son agriculture et son eau potable.
De nombreux acteurs sont impliqués :
L’Éthiopie, qui cherche à développer son énergie hydroélectrique.
L’Égypte, qui veut garantir son approvisionnement.
Le Soudan, qui espère bénéficier de l’électricité produite.
L’Union africaine, qui tente de faciliter le dialogue entre les États.
Cette situation montre que la gestion d’un fleuve commun est un enjeu géopolitique : il faut trouver un équilibre entre développement, partage et protection. Une coopération régionale pourrait transformer le Nil en un espace de solidarité, mais le manque d’accord fait encore planer le risque de tensions durables.
À retenir
Le Nil illustre les défis d’un fleuve partagé : satisfaire les besoins de plusieurs pays tout en évitant les conflits. La gestion durable passe par la négociation et la coopération.
Des usages multiples et souvent concurrents
L’eau est indispensable à trois grands secteurs : l’agriculture, l’industrie et la vie quotidienne. L’agriculture consomme environ 70 % de l’eau mondiale. Elle dépend de l’irrigation, surtout dans les régions chaudes comme l’Inde ou l’Égypte. Mais une irrigation excessive épuise les nappes souterraines et rend les sols salés et improductifs.
L’industrie utilise environ 20 % de la ressource, surtout pour fabriquer de l’énergie, du textile ou des produits chimiques. Dans le bassin du fleuve Jaune en Chine, la pollution liée aux usines a rendu une grande partie de l’eau inutilisable.
Enfin, l’eau domestique — environ 10 % des usages — sert à boire, cuisiner, se laver et nettoyer. Dans les grandes villes du Sud comme Mexico, les pertes du réseau peuvent atteindre 40 % à cause des fuites et du manque d’entretien.
L’eau circule aussi indirectement à travers le commerce mondial, sous forme d’eau virtuelle. Par exemple, produire un kilo de riz ou de bœuf demande des milliers de litres d’eau, consommés dans le pays producteur. Acheter ces produits, c’est donc importer ou exporter de l’eau de façon invisible. Cette notion montre à quel point la gestion de l’eau est aujourd’hui mondialisée.
À retenir
L’eau est utilisée pour se nourrir, produire et vivre. Mais ces usages sont parfois contradictoires : il faut choisir entre besoins agricoles, industriels et domestiques, tout en tenant compte du commerce mondial de « l’eau virtuelle ».
Vers une gestion durable et partagée de l’eau
Protéger l’eau pour l’avenir suppose d’en faire un bien commun, géré de façon équilibrée. Cela signifie concilier trois priorités : répondre aux besoins humains, soutenir l’économie et préserver l’environnement.
Les États ont un rôle essentiel : ils planifient les politiques d’irrigation, financent les barrages ou les stations d’épuration, et signent des accords internationaux. Les entreprises développent des innovations pour économiser l’eau (irrigation de précision, compteurs intelligents), mais elles cherchent aussi à en tirer profit. Les ONG luttent contre la privatisation et défendent le droit à l’eau potable pour tous, tandis que les populations locales participent à la gestion des puits et à la sensibilisation aux économies d’eau.
Les solutions techniques sont utiles, mais elles ont des limites. Le dessalement de l’eau de mer, pratiqué dans les Émirats arabes unis ou en Israël, consomme beaucoup d’énergie et rejette de l’eau très salée dans la mer.
Le recyclage des eaux usées ou la réutilisation agricole permettent d’économiser l’eau, mais nécessitent des investissements coûteux. Aucune technologie ne suffit seule : il faut apprendre à mieux partager et moins gaspiller.
À retenir
La gestion durable de l’eau dépend de la coopération entre États, entreprises, ONG et citoyens. Les techniques modernes peuvent aider, mais seule une utilisation raisonnée et partagée de l’eau garantit son avenir.
Conclusion
L’eau est une ressource vitale mais fragile. Son inégale répartition, la croissance des besoins et le changement climatique créent de fortes tensions. L’exemple du Nil montre que la coopération est indispensable pour éviter les conflits et assurer un accès équitable. Gérer durablement l’eau, c’est faire en sorte que chacun puisse en disposer sans compromettre les besoins des générations futures. Cela passe par des choix collectifs, une éducation à l’économie de l’eau et une solidarité mondiale, car l’eau n’est pas seulement une ressource : c’est un bien commun essentiel à la vie.
