L’énergie : enjeux, dépendances et transitions

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Dans cette leçon, tu explores les enjeux mondiaux de l’énergie : sa répartition inégale, les rivalités autour des hydrocarbures et les défis de la transition énergétique. Entre dépendance aux énergies fossiles et développement des renouvelables, les sociétés cherchent un équilibre entre puissance, climat et durabilité. Mots-clés : énergie, énergies fossiles, transition énergétique, Moyen-Orient, renouvelables, géopolitique.

Introduction

Chaque jour, l’humanité consomme l’équivalent de centaines de millions de barils de pétrole, de tonnes de charbon et de mètres cubes de gaz pour se déplacer, produire, se chauffer ou cultiver. L’énergie est au cœur du développement économique et du mode de vie contemporain. Pourtant, cette dépendance engendre de profondes inégalités d’accès, de fortes tensions géopolitiques et une crise environnementale mondiale.

Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE, 2022) — une organisation intergouvernementale créée en 1974 pour observer les marchés énergétiques mondiaux et conseiller les États membres sur leurs politiques énergétiques —, le secteur de l’énergie est responsable d’environ 73 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, dont près de 90 % du CO₂ émis dans le monde. Face à la croissance démographique, à l’épuisement des ressources fossiles et au réchauffement climatique, la question est désormais vitale : comment produire et consommer l’énergie autrement ?

L’énergie, une ressource inégalement répartie et inégalement consommée

Les ressources énergétiques — pétrole, gaz, charbon, uranium, soleil, vent, eau — sont réparties de manière très inégale. Certains pays disposent de réserves abondantes, d’autres dépendent presque entièrement des importations. Les États-Unis, la Russie, l’Arabie saoudite et l’Iran comptent parmi les premiers producteurs mondiaux, tandis que le Japon, la Corée du Sud ou la France importent la quasi-totalité de leur énergie.

Selon l’AIE (2023) — c’est-à-dire l’Agence internationale de l’énergie, qui publie chaque année des données mondiales de référence —, environ 81 % de l’énergie primaire mondiale provient encore des énergies fossiles : pétrole (31 %), charbon (27 %) et gaz naturel (23 %). Ces ressources sont non renouvelables, car elles se forment sur des millions d’années. Elles demeurent la base du système énergétique mondial, mais leur exploitation intensive accentue la pollution et accélère le changement climatique.

La consommation d’énergie reste profondément inégale. D’après la Banque mondiale, un habitant d’un pays développé consomme environ dix fois plus d’énergie qu’un habitant d’Afrique subsaharienne. Les pays émergents, comme la Chine ou l’Inde, voient leur demande croître rapidement : la Chine est aujourd’hui à la fois le premier émetteur mondial de CO₂ et le premier investisseur dans les énergies renouvelables. Les États-Unis, grâce au shale oil et au gaz de schiste, sont redevenus le premier producteur mondial d’hydrocarbures, renforçant ainsi leur autonomie énergétique.

À retenir

L’énergie reflète les déséquilibres mondiaux : les ressources fossiles se concentrent dans quelques régions, tandis que la consommation reste dominée par les pays riches et émergents.

Les énergies fossiles : entre puissance et dépendance

Depuis la révolution industrielle, les énergies fossiles — charbon, pétrole, gaz — sont le moteur du développement économique mondial. Mais elles sont aussi à l’origine de la crise climatique et de nombreuses tensions politiques.

Le Moyen-Orient concentre à lui seul près de 50 % des réserves mondiales de pétrole et 40 % du gaz naturel. Cette abondance fait de la région un centre énergétique stratégique. Le détroit d’Hormuz, situé entre l’Iran et Oman, voit passer environ un cinquième du pétrole mondial et est partiellement contrôlé par l’Iran. Le détroit de Bab el-Mandeb, entre le Yémen, Djibouti et l’Érythrée, relie la mer Rouge à l’océan Indien, tandis que le canal de Suez, en Égypte, relie la Méditerranée à la mer Rouge et constitue un passage clé pour les flux d’hydrocarbures entre le Golfe et l’Europe. En Asie, le détroit de Malacca, entre la Malaisie et l’Indonésie, est le principal couloir énergétique vers la Chine, le Japon et la Corée du Sud ; il est surveillé par ces pays et par la marine américaine.

Le contrôle de ces passages maritimes confère un pouvoir stratégique majeur aux États riverains. Sur le plan géopolitique, les États-Unis, la Russie et les grands pays de l’OPEP (Organisation des pays exportateurs de pétrole) rivalisent pour influencer les prix et sécuriser leurs marchés. La guerre en Ukraine (2022) a profondément modifié les équilibres énergétiques européens : les pays de l’Union européenne, longtemps dépendants du gaz russe, se sont tournés vers le GNL (gaz naturel liquéfié) venu des États-Unis et du Qatar, tout en accélérant leur transition énergétique dans le cadre du Green Deal européen.

À retenir

Le commerce mondial de l’énergie dépend de routes maritimes étroites et de puissances exportatrices dominantes. Ces flux stratégiques font de l’énergie un instrument de puissance et de rivalité.

Étude de cas : le Moyen-Orient, un carrefour énergétique stratégique

Le Moyen-Orient demeure le cœur du commerce mondial des hydrocarbures. L’Arabie saoudite, l’Irak, le Koweït, le Qatar et les Émirats arabes unis exportent massivement vers l’Asie, l’Europe et l’Amérique du Nord. Cette position confère à la région une influence géopolitique majeure. Les États-Unis y conservent une forte présence militaire pour sécuriser les routes du pétrole, notamment dans le Golfe arabo-persique.

Mais la région doit aussi se préparer à l’après-pétrole. Les États du Golfe lancent des programmes de diversification : l’Arabie saoudite avec son plan Vision 2030, ou le Qatar qui investit dans le gaz naturel liquéfié et les énergies solaires. Ces stratégies visent à maintenir leur rôle central tout en anticipant la transition énergétique mondiale.

À retenir

Le Moyen-Orient concentre richesses, rivalités et ambitions de transition. Sa stabilité reste essentielle pour l’équilibre énergétique mondial.

Vers une transition énergétique mondiale

La transition énergétique correspond au passage progressif d’un système fondé sur les énergies fossiles vers un modèle plus sobre, diversifié et durable. Les énergies renouvelables — solaire, éolienne, hydraulique, géothermique, biomasse — progressent dans la plupart des régions du monde. En 2023, elles ont fourni plus de 30 % de l’électricité mondiale, mais seulement environ 15 % de l’énergie primaire totale, car le reste du mix énergétique mondial reste encore dominé par les hydrocarbures.

Cette transition rencontre toutefois plusieurs obstacles. Les énergies renouvelables sont intermittentes : la production dépend du vent et du soleil, ce qui oblige à développer des capacités de stockage et à diversifier les sources. Leur déploiement nécessite aussi des investissements lourds dans les infrastructures et les réseaux électriques. Par ailleurs, l’extraction des métaux rares (lithium, cobalt, cuivre), indispensables à la fabrication des panneaux solaires et des batteries, crée de nouvelles dépendances économiques et pose des problèmes environnementaux.

Au cœur de cette mutation, le nucléaire civil occupe une place à part. C’est une énergie bas carbone, car elle émet très peu de gaz à effet de serre, mais elle est non renouvelable, puisqu’elle dépend de l’uranium. Certains pays, comme la France, la Chine ou les États-Unis, continuent d’investir massivement dans cette filière pour garantir leur indépendance énergétique et réduire leurs émissions. D’autres, comme l’Allemagne, ont choisi d’en sortir, invoquant les risques d’accident et la question des déchets radioactifs. Le nucléaire apparaît donc comme une option de transition : une solution intermédiaire entre les énergies fossiles polluantes et les renouvelables encore fragiles, mais dont l’acceptation varie selon les pays et les sociétés.

À l’échelle mondiale, plusieurs acteurs structurent les politiques énergétiques. L’AIE (Agence internationale de l’énergie) collecte les données et conseille les États sur leur politique énergétique. L’OPEP, dominée par les grands exportateurs de pétrole, ajuste la production pour peser sur les prix. Les Conférences des Parties (COP), dont la COP28 organisée à Dubaï en 2023, cherchent à accélérer les engagements climatiques. Enfin, l’Union européenne, à travers son Green Deal, s’est engagée à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050.

À retenir

La transition énergétique mondiale repose sur les renouvelables, le nucléaire et la sobriété. Elle dépend de choix politiques, économiques et technologiques adaptés à chaque pays et encadrés par des acteurs internationaux.

Conclusion

L’énergie est une ressource stratégique mondiale, à la fois moteur du développement et facteur de rivalités. En 2023, les énergies fossiles représentent encore plus de quatre cinquièmes de la production mondiale, mais leurs effets sur le climat et les tensions qu’elles génèrent incitent les États à repenser leurs modèles. Entre sécurisation des approvisionnements, lutte contre le réchauffement climatique et indépendance énergétique, la transition énergétique est un défi collectif. Son succès dépendra de la capacité des nations à coopérer, à investir dans l’innovation et à promouvoir une consommation plus sobre, équitable et durable, pour construire un avenir énergétique compatible avec les limites de la planète.