I. Propriétés
On considère une suite (Un) de matrices colonnes telle que
Un+1=AUn+B pour tout entier naturel n.
∘ S’il existe une matrice X telle que AX+B=X, alors la suite (Vn) définie par
Vn=Un−X vérifie : Vn+1=AVn
Dans ce cas, on a : Un=An(U0−X)+X pour tout entier n.
∘ Si (Un) est une suite convergente, alors elle converge vers une matrice U vérifiant
AU+B=U.
Démonstration :
Soit une suite (Un) de matrices colonnes telle que
Un+1=AUn+B pour tout entier n.
∘ S’il existe une matrice X telle que AX+B=X, on définit la suite (Vn) par :
Vn=Un−X
Alors : Vn+1=Un+1−X=AUn+B−(AX+B)=AUn−AX=A(Un−X)=AVn
La suite (Vn) est donc une suite géométrique de raison A, donc : Vn=AnV0 pour tout entier n.
Or V0=U0−X, donc : Vn=An(U0−X) pour tout entier n
Et comme Vn=Un−X, alors : Un=Vn+X=An(U0−X)+X pour tout entier n.
∘ Si (Un) est une suite convergente, soit U sa limite. Alors :
n→+∞limUn+1=n→+∞limUn=U
D'une part :
n→+∞limUn+1=n→+∞lim(AUn+B)=A(n→+∞limUn)+B=AU+B
D'autre part : n→+∞limUn+1=U
Donc U vérifie bien : AU+B=U
II. Un exercice rédigé
Dans un entrepôt logistique, deux zones de stockage, notées A et B, contiennent chacune 100 palettes de produits. Un logiciel ajuste automatiquement les quantités stockées chaque jour à 8h, selon les règles suivantes :
✓ 50 % des palettes en zone A partent définitivement sur camions pour livraison,
✓puis 75 % sont transférées de B vers A ;
✓à chaque cycle, 200 palettes supplémentaires sont livrées en zone A, et 300 en zone B.
On souhaite savoir la taille des zones de stockage indispensable à gérer ce flux, afin que tout puisse toujours être réceptionné.
On note an et bn les quantités de palettes (en centaines) dans les zones A et B au jour n.
On modélise ces données à l’aide de la suite de matrices colonnes Un=(anbn), où an et bn représentent le nombre de palettes (en centaines) le jour n. On sait donc que U0=(11).
On définit les matrices : M=(0,50,7500,25) et C=(23)
∘ 1. Justifier que, pour tout entier naturel n, on a : Un+1=MUn+C
On considère la matrice P=(1 03−1)
∘ 2a. Calculer P2. En déduire que P est inversible et préciser son inverse.
∘ 2b. Montrer que la matrice M est diagonalisable, en déterminant une matrice diagonale D telle que M=PDP−1.
∘ 2c. En déduire que, pour tout entier naturel n, Mn=PDnP−1.
∘ 2d. Montrer que Mn=(0,5n3×0,5n00,25n)
∘ 3a. Montrer que la matrice X=(104) vérifie X=MX+C
∘ 3b. Pour tout entier naturel n, on définit Vn=Un−X. Montrer que Vn+1=MVn
∘ 3c. En déduire que Vn=MnV0, où V0=U0−X
∘ 3d. Montrer que Un=(−18×0,5n+9×0,25n+10−3×0,25n+4)
∘ 4a. Montrer que la suite (bn) est croissante et majorée. En déduire sa limite.
∘ 4b. Déterminer la limite de la suite (an)
∘ Conclure
Solution : principe de la démonstration
∘ 1. Justifier que, pour tout entier naturel n, on a Un+1=MUn+C
On modélise la situation :
✓À chaque cycle, 50 % des palettes de A partent (il en reste donc 50 %, soit 0,5an).
✓75 % des palettes de B sont transférées vers A (soit 0,75bn).
✓200 palettes (soit 2 centaines) sont livrées dans A, et 300 palettes (soit 3 centaines) dans B.
✓25 % des palettes de B restent (soit 0,25bn).
Ainsi, on a :
an+1=0,5an+0,75bn+2
bn+1=0,25bn+3
Ce qui s’écrit sous forme matricielle :
Un+1=MUn+C
avec M=(0,50,7500,25) et C=(23)
∘ 2a. Calculer P2. En déduire que P est inversible et préciser son inverse.
On a : P=(103−1)
Alors : P2=(103−1)(103−1)=(1001)=I2
Donc P est inversible et P−1=P
∘ 2b. Montrer que la matrice M est diagonalisable, en déterminant une matrice diagonale D telle que M=PDP−1.
Pour que M=PDP−1, il suffit que PMP=PPDP−1P soit :
D=PMP. Après calculs, on trouve que la matrice diagonale D est :
D=(0,5000,25)
∘ 2c. En déduire que, pour tout entier naturel n, Mn=PDnP−1
Ce résultat se démontre par récurrence, on montre que si M=PDP−1, alors Mn=PDnP−1 pour tout n∈N.
∘ 2d. Montrer que Mn=(0,5n3×0,5n00,25n)
On a Dn=(0,5n000,25n)
On calcule Mn=PDnP−1=PDnP (car P−1=P)
Ce produit donne :
Mn=(0,5n3×0,5n−3×0,25n00,25n)
∘ 3a. Montrer que la matrice X=(104) vérifie X=MX+C
On calcule :
MX=(0,5×10+0,75×40×10+0,25×4)=(5+31)=(81)
MX+C=(81)+(23)=(104)=X
Donc X=MX+C
∘ 3b. Pour tout entier naturel n, on définit Vn=Un−X. Montrer que Vn+1=MVn
On a : Vn+1=Un+1−X=MUn+C−X=M(Un−X)+(MX+C−X)
Or MX+C=X, donc : Vn+1=MVn
On obtient bien une suite géométrique de matrices.
∘ 3c. En déduire que Vn=MnV0, où V0=U0−X
V0=(11)−(104)=(−9−3)
En appliquant la propriété du cours, on obtient : Vn=MnV0
∘ 3d. Montrer que Un=(−18×0,5n+9×0,25n+10−3×0,25n+4)
On a :
Vn=MnV0=(0,5n3×0,5n−3×0,25n00,25n)(−9−3)
Produit :
a : −9×0,5n−9×0,5n+9×0,25n=−18×0,5n+9×0,25n
b : −3×0,25n
Donc :
Vn=(−18×0,5n+9×0,25n−3×0,25n)
Et donc :
Un=Vn+X=(−18×0,5n+9×0,25n+10−3×0,25n+4)
∘ 4a. Montrer que la suite (bn) est croissante et majorée. En déduire sa limite.
On a : bn=−3×0,25n+4
La suite (0,25n) est strictement décroissante, donc (−3×0,25n) est strictement croissante.
Donc (bn) est croissante.
De plus, 0,25n→0, donc bn→4
Comme bn<4, la suite est majorée.
Conclusion : (bn) est croissante et majorée, donc converge vers 4
∘ 4b. Déterminer la limite de la suite (an)
On a : an=−18×0,5n+9×0,25n+10
Les deux premiers termes tendent vers 0, donc : liman=10
∘ Conclusion
À long terme, les quantités de palettes se stabilisent :
✓en zone A : an→10, soit 1000 palettes
✓ en zone B : bn→4, soit 400 palettes
Les capacités minimales des zones de stockage doivent donc être d’au moins 1000 palettes pour A et 400 pour B.