Méthode pour l'explication de texte en philosophie

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I. Qu'est-ce que l’explication de texte ?

L’explication de texte est le sujet majoritairement choisi par les candidats. Avoir un texte rassure, on se dit qu’il y aura toujours quelque chose à dire, contrairement aux sujets de dissertation qui peuvent créer une angoisse de la page blanche.

Pour autant, expliquer un texte est sans nul doute beaucoup plus ardu que rédiger une dissertation, et la raison en est très simple : il faut pouvoir le comprendre. Il faut s’ouvrir à la pensées des autres et, puisque ces autres sont des penseurs, à pouvoir partager le lexique qui est le leur et leur manière de s’exprimer. Il arrive souvent que des conflits ou des soucis s'urgissent en raison d'une mauvaise communication, de quiproquo.  C'est pourquoi, expliquer un texte dont la pensée et le vocabulaire ne sont pas les nôtre est sans doute bien plus compliqué que prévu.

Le but de l’explication de texte est toutefois clair :

  • saisir la thèse de l’auteur (ce qu’il défend) et la grande problématique à laquelle sa thèse répond (l’enjeu) ;
  • mettre en évidence la manière dont l’auteur procède, comprendre son cheminement de pensée, sa logique ;
  • le tout en élaborant soi-même un propos organisé et cohérent.

II. De la structure avant toute chose

L’explication de texte, exactement comme la dissertation, suppose une organisation, une logique, une progression dans le propos, qui sont visibles par une structure claire et précise.

En tant qu’élève de terminale, on attend de toi une explication de texte comprenant une introduction, un développement (parties et sous-parties) et une conclusion.

Rappel

Organise les choses pour ne pas passer à côté de cet exercice académique !

Attention

Ta structure doit refléter celle choisie par l’auteur, tout du moins être fidèle à sa manière d’organiser les choses.

III. Bien comprendre le texte et correctement problématiser

1) Lecture exacte et lucide du texte

D’emblée, en introduction, ensuite dans tout le développement jusqu’à la conclusion, le correcteur va chercher à savoir si tu as bien compris le texte, ses tenants et aboutissants, et la logique mise en œuvre par l’auteur.

Pour cela, repère, dans une première lecture, les mots conceptuels, les outils de pensée de l’auteur. Tu peux utiliser un fluo ou un crayon de couleur pour mettre en évidence ces derniers, ainsi que les champs lexicaux associés. Ce travail de repérage permettra de faire ressortir les grandes idées.

Dans la marge, dans une seconde lecture, au crayon de papier, marque les divers temps, les diverses étapes du texte. Ces grandes étapes traceront les grandes parties de ton développement.

2) Situation, thème, thèse, problématique, enjeu

Ces cinq éléments sont à retranscrire dès l’introduction :

  • Situation : qui écrit ? Dans quel ouvrage ? À quelle époque (si c’est essentiel) ?

    Exemple : Dans ce texte, extrait de Humain, trop humain, Nietzsche…

  • Thème : de quoi s’agit-il ? Quel sujet est développé ?

    Exemple : ... s’intéresse à l’application de la justice quant aux actes humains, qu’elle punisse ou qu’elle récompense.

  • Problématique : la question que la thèse de l’auteur soulève ou à laquelle elle répond (tout dépend du texte) ;

    Exemple : Nietzsche est un défenseur du déterminisme absolu, qui s’étend du monde à la nature humaine, au point que donc les affaires humaines n’ont rien à voir avec une quelconque volonté ou liberté des hommes, mais sont nécessaires : les hommes ne peuvent agir autrement qu’ils le font.

  • Thèse : ce que l’auteur pense de spécifique par rapport au sujet ;

    Exemple : Nietzsche en vient à l’idée d’une irresponsabilité totale des hommes, qui ne sont pas maîtres de leurs actes. Comment donc la justice peut-elle s’appliquer, et la peine et la récompense, si on ne peut imputer aucune responsabilité aux hommes ? La justice a-t-elle encore un sens ? Oui nous dit Nietzsche, la justice a alors un sens utilitaire.

  • Enjeu : la conséquence que l’ensemble du texte soulève quant au domaine traité

    Exemple : La critique de la définition traditionnelle de la justice comme venant punir ou récompenser après coup les actes des hommes. Faire de la justice quelque chose d’utile, et donc la faire descendre de son piédestal idéal et vertueux.

  • Pour annoncer le plan ensuite, il suffit de retranscrire les grandes étapes par lesquelles l’auteur avance dans son texte.

IV. Correctement expliquer, ou comment faire un bon développement ?

1) Des parties qui équivalent à des phases argumentatives

Le développement de ton analyse doit correspondre au cheminement logique de l’auteur. Chaque grande partie correspond ainsi à une phase argumentative.

Exemple d’annonce de plan mais aussi de structure de développement :

 Pour mener à bien son argumentation, Nietzsche procède de manière graduelle, en allant crescendo, en deux temps. Dans un premier temps, il s’attache à montrer les conséquences du déterminisme des actions humaines et de l’irresponsabilité de l’homme quant à ses actes : une refondation de la justice, de la peine et de la récompense est indispensable. Dans un second temps, Nietzsche montre que la justice et ses fonctions de punition et de récompense ne concernent pas l’individu en lui-même ni ses actes. Non, la justice a bien plutôt trait, en tant que simple moyen utilitaire, et non plus comme idéal vertueux, à l’intérêt de l’humanité en général afin de lui fournir des motifs d’action.

2) Des concepts

Pour expliquer correctement les choses, il faut avancer avec un style conceptuel, s’arrêter sur chaque mot un peu complexe et le détailler. Ce qu’il ne faut surtout pas faire : laisser de côté un concept ou un mot qui nous dérange.

Par exemple, ce matin, lors d’un de mes cours, un auteur que nous lisions avec les élèves évoquait « six sens », en qualifiant le mouvement de « sixième sens ». Classiquement, il y a cinq sens donc cela a dérangé certains élèves qui n’étaient pas d’accord avec le texte. Dans une explication, il faudrait s’attarder dessus : pourquoi l’auteur rajoute un sixième sens ? Que cela dit-il, au fond ? Pourquoi le fait-il ? Qu’est-ce que cela apporte à sa pensée ?

3) Pas de références sauf si elles sont explicites

Contrairement à la dissertation, en explication de texte, il ne faut pas de références extérieures pour illustrer un propos. Par contre, si une référence elle-même est sous-entendue par l’auteur, il faut la faire émerger.

Certains philosophes à cet égard écrivent en réponse à un autre ou à d’autres.

4) Une certaine longueur

Comme en dissertation, même si la quantité ne fait pas la qualité, on attend d’une partie qu’elle soit digne de ce nom pour développer une vraie explication. À titre indicatif, une sous-partie doit faire 15 lignes minimum à écriture moyenne, une grande partie environ une page (60 lignes), et l’explication de texte minimum 4 pages en tout.

IV. Orthographe, vocabulaire, présentation

Rappel

Il est important de présenter une copie claire à tous niveaux.

1) L’orthographe

L’orthographe est comme une carte de visite ou l’aspect extérieur d’une personne. C’est le premier contact qu’il y aura entre le correcteur et ta copie. Il est important de la soigner et de savoir écrire correctement.

On attend de toi que tu écrives avec justesse :

  • les concepts philosophiques et les notions au programme et vus en cours ;
  • les noms des auteurs ;
  • les règles qu’en terminale n’importe quel correcteur considère comme basiques (accords, concordance des temps, ponctuation).

2) Le vocabulaire

Plus on a de mots, plus notre lexique est varié, plus nous pouvons penser avec nuances et distinctions. C’est exactement comme un peintre qui pourra encore mieux peindre le monde avec une grande palette de couleurs plutôt qu’avec les couleurs simplement élémentaires.

Le lexique est une affaire de lectures, de curiosité intellectuelle, et pas seulement un amour des mots.

Il est important aussi parce qu’il reflète ta capacité à être précis ou précise, à penser avec justesse et nuances. Il est aussi, malgré toi, le reflet d’un milieu culturel. Veille à l’enrichir constamment, non seulement pour épater le correcteur mais aussi et surtout pour être parfaitement libre de penser tout ce que tu veux et de le formuler comme tu l’entends exactement.

4) La présentation

Ce n’est pas un mythe, une copie bien présentée envoie un signal très positif au correcteur qui aura plus envie de la lire et qui trouvera cela même agréable. A contrario, une copie à l’écriture ramassée, emplie d’espaces blancs ou vacants reflétant maintes hésitations ou de ratures intempestives, ne fait pas envie et est à classer parmi les brouillons.

Pour bien présenter, pense à :

  • aérer, à sauter des lignes entre l’introduction, les grandes parties et la conclusion,
  • faire des alinéas avant chaque sous-partie.

Attention

Une sous-partie doit être faite d’un bloc, c’est un paragraphe en tant que tel, il ne faut pas aller à la ligne à l’intérieur même d’une sous-partie.

V. La conclusion

En explication de texte, la conclusion est toute simple et doit être minimaliste. Elle se fait en deux temps :

  • rappel du sujet et de la thèse de l’auteur ;
  • problèmes ou enjeux soulevés.