Les pesanteurs de la société d'ordres

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La société d’Ancien Régime est une société d’ordres : les paysans, majoritaires, sont soumis à l’autorité de leurs seigneurs. Le poids de la pression fiscale entraîne de nombreux soulèvements dans les campagnes au XVIIe siècle. Cependant, le siècle suivant est marqué par une lente amélioration de la condition paysanne.

I Une société tripartite

Dans son Traité des ordres et simples dignités (1610), le juriste Charles Loyseau rappelle que tous les Français sont des sujets du roi. Parmi eux, il distingue trois catégories juridiques : le clergé (ceux qui prient), la noblesse (ceux qui combattent) et le tiers état (ceux qui travaillent).

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Un privilège est un droit réservé à une personne ou un groupe en raison de sa naissance, de sa fonction ou de son lieu de résidence.

Le clergé (1 % de la population) et la noblesse (2 % de la population) bénéficient de privilèges, notamment fiscaux. Le tiers état (97 % de la population) est soumis à l’autorité des deux premiers.

Le tiers état est constitué majoritairement de paysans (80 % de la population). Ils travaillent sur des terres qui ne leur appartiennent pas, dans le cadre d’une seigneurie.

II Un monde paysan dominé

1 Le poids de la fiscalité et des droits féodaux

Le clergé et la noblesse étant exemptés partiellement ou totalement de certains impôts, le poids de la fiscalité royale repose donc entièrement sur les paysans. C’est le cas en particulier de la taille, destinée à financer la levée d’une armée.

Les paysans sont également redevables de la dîme, impôt en nature dû à l’Église, qui correspond en moyenne au dixième de leurs récoltes.

Enfin, et surtout, ils doivent s’acquitter de nombreux droits seigneuriaux : en nature (le champart), en argent (le cens) ou en travail (la corvée). Par ailleurs, ils sont soumis à l’autorité de leur seigneur (justice, police).

2 De multiples soulèvements populaires aux XVIe et XVIIe siècles

Sous l’Ancien Régime, les révoltes paysannes sont souvent d’origine fiscale, lorsque la monarchie veut imposer un nouvel impôt. La colère des paysans est dirigée contre les gens de finance chargés de la collecte de l’impôt. Parti d’une paroisse, le soulèvement s’étend parfois à toute une région.

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La gabelle est un impôt perçu sur la vente du sel.

Ainsi, à partir de 1635, l’intervention militaire française dans la guerre de Trente Ans accroît la pression fiscale. Dans ce contexte, la Normandie est, en 1639, le théâtre de la révolte des Va-nu-pieds dirigée contre le rétablissement de la gabelle. Elle est réprimée férocement sur ordre de Richelieu, principal ministre de Louis XIII.

III Une amélioration de la condition paysanne au XVIIIe siècle

À partir de 1715, le climat devient plus clément. La disparition des hivers rigoureux entraîne celle des grandes famines (comme celle de l’hiver 1709). La paix intérieure du royaume préserve les récoltes de la destruction.

Au XVIIIe siècle, l’État modernise l’agriculture en s’appuyant sur les mémoires des intendants. Il favorise le recul de la jachère, la spécialisation agricole (maïs dans le Sud-Ouest, sarrasin en Bretagne) et le perfectionnement du matériel agricole.

La gestion de la seigneurie devient plus rigoureuse : les seigneurs la confient à des fermiers qui exercent une pression plus régulière sur les paysans en anticipant parfois les rentrées d’argent.

La condition paysanne varie selon les régions : dans l’est et le centre du royaume (Lorraine, Franche-Comté, Bourgogne, Auvergne), le pouvoir du seigneur est ainsi plus fort qu’ailleurs.