Les marqueurs radioactifs pour l'imagerie médicale

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Dans cette leçon, tu vas comprendre comment les marqueurs radioactifs sont utilisés en imagerie médicale pour révéler non seulement la forme mais aussi l’activité des organes. Tu verras les différents types de rayonnements, la notion de demi-vie, l’histoire du technétium 99m et les précautions essentielles pour assurer la sécurité des patients. Mots-clés : médecine nucléaire, scintigraphie, TEP, marqueurs radioactifs, technétium 99m, demi-vie.

Introduction

Dans les hôpitaux, certaines images médicales ne montrent pas seulement la forme d’un organe mais révèlent aussi son activité. C’est le cas de la scintigraphie cardiaque, utilisée pour détecter un défaut d’irrigation sanguine, ou de la TEP au fluor 18 (tomographie par émission de positons, technique d’imagerie permettant de suivre l’activité métabolique des tissus grâce à l’injection d’un traceur radioactif), qui permet de suivre le métabolisme du glucose dans les cellules cancéreuses. Ces techniques reposent sur l’utilisation de marqueurs radioactifs.

Bien employés, ils fournissent des informations précieuses tout en respectant des protocoles de sécurité rigoureux. Mais comment fonctionnent-ils exactement et quelles précautions imposent-ils ?

Composition du noyau et isotopes

Un atome possède un noyau constitué de protons, porteurs d’une charge positive, et de neutrons, électriquement neutres. Autour gravitent des électrons chargés négativement. Le nombre de protons définit l’élément chimique et correspond au numéro atomique (Z).

Les neutrons, eux, influencent la masse et la stabilité du noyau. Lorsque deux atomes possèdent le même nombre de protons mais diffèrent par leur nombre de neutrons, ce sont des isotopes.

Certains isotopes sont stables, d’autres instables : ces derniers émettent un rayonnement pour atteindre un état stable, on les appelle radioactifs. Ainsi, le carbone 12 est stable, alors que le carbone 14 est radioactif et sert à la datation des vestiges archéologiques.

À retenir

Un isotope radioactif émet un rayonnement en se transformant en un noyau plus stable.

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Types de radioactivité

La radioactivité peut se manifester sous différentes formes. L’émission alpha (αα) correspond à l’expulsion d’un noyau d’hélium (2 protons et 2 neutrons). Très peu pénétrante, elle est arrêtée par une simple feuille de papier.

L’émission bêta moins (ββ⁻) libère un électron, capable de traverser quelques millimètres de tissu. L’émission bêta plus (β+β⁺) éjecte un positon, équivalent positif de l’électron, utilisé en imagerie médicale dans la TEP.

Enfin, le rayonnement gamma (γγ) est une onde électromagnétique très pénétrante, capable de traverser le corps et détectée par une gamma-caméra.

Ces phénomènes, identifiés à la fin du XIXe siècle, ont été étudiés et approfondis par Pierre et Marie Curie, qui ont isolé le polonium et le radium. Leurs travaux ont permis de mieux comprendre la diversité des rayonnements et ont marqué un tournant dans l’histoire de la médecine nucléaire.

À retenir

Chaque type de rayonnement a un pouvoir pénétrant différent, ce qui explique leurs usages médicaux variés.

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Activité et dose

L’activité d’une source radioactive correspond au nombre de désintégrations par seconde. Elle s’exprime en becquerels (BqBq), en hommage au physicien français Henri Becquerel, qui découvrit la radioactivité en 1896 en étudiant les sels d’uranium. Un becquerel correspond donc à une désintégration nucléaire par seconde. Dans les examens de médecine nucléaire, les activités injectées sont généralement indiquées en mégabecquerels (MBqMBq), parfois ajustées en fonction du poids du patient, mais elles ne sont pas systématiquement rapportées en MBq/kgMBq/kg.

La dose absorbée, exprimée en gray (GyGy), mesure l’énergie déposée par le rayonnement dans un tissu. La dose efficace, exprimée en sieverts (SvSv), tient compte de l’effet biologique du rayonnement sur l’organisme et permet de comparer les risques liés à différentes expositions. Par exemple, une scintigraphie thyroïdienne utilise environ 600 MBq600~MBq de technétium 99 m99~m (99 mTc99~mTc), ce qui correspond à une dose efficace de quelques millisieverts, nettement inférieure à celle d’un traitement par radiothérapie, qui atteint plusieurs dizaines de gray.

À retenir

Le becquerel (BqBq) mesure l’activité radioactive en nombre de désintégrations par seconde, le gray (GyGy) mesure l’énergie absorbée, et le sievert (SvSv) traduit l’impact biologique sur l’organisme.

Période radioactive et détermination graphique

La période radioactive, aussi appelée demi-vie, correspond au temps nécessaire pour que la moitié des noyaux radioactifs d’un échantillon se désintègre. Cette notion est capitale en médecine nucléaire, car elle détermine à la fois la durée d’utilisation du marqueur et le temps d’exposition du patient. Sur un graphique représentant l’activité en fonction du temps, on observe une courbe de décroissance. La demi-vie se lit en cherchant le moment où l’activité est divisée par deux par rapport à sa valeur initiale. Après deux demi-vies, il ne reste plus qu’un quart de l’activité, après trois demi-vies, un huitième, et ainsi de suite. La décroissance suit donc une loi exponentielle.

Dans le domaine médical, il est essentiel de choisir un marqueur dont la demi-vie est adaptée : trop courte, il disparaît avant que l’examen soit terminé ; trop longue, il expose inutilement le patient à des radiations persistantes. Par exemple, le technétium 99m99m, largement utilisé en scintigraphie depuis les années 1960, a permis la standardisation de nombreux examens. Sa demi-vie d’environ 6 heures est un compromis idéal : elle permet de réaliser l’examen dans la journée tout en garantissant une élimination rapide de la radioactivité. À l’inverse, le fluor 18 utilisé en TEP a une demi-vie d’environ 110 minutes, ce qui impose une organisation précise pour produire et transporter le traceur à l’hôpital.

À retenir

La demi-vie traduit la vitesse de décroissance d’un isotope radioactif. Elle se lit graphiquement sur une courbe et conditionne l’efficacité et la sécurité d’un examen.

Usage des marqueurs radioactifs

Le choix d’un marqueur dépend de plusieurs critères : la nature de l’isotope et du rayonnement émis, la cible (organe ou molécule), la dose administrée adaptée au patient et la durée d’élimination par l’organisme. En pratique, les applications sont nombreuses. La radiographie, qui utilise des rayons X produits par un générateur externe, est une technique d’imagerie non nucléaire et ne nécessite pas d’injection radioactive. Elle doit donc être clairement distinguée des méthodes utilisant des traceurs.

La scintigraphie repose sur l’injection d’un émetteur γγ, comme le 99mTc99mTc, qui se fixe sur un organe et dont le rayonnement est capté par une gamma-caméra. L’histoire du technétium 99m99m est particulièrement marquante : son utilisation en médecine nucléaire s’est généralisée dans les années 1960, faisant de lui l’isotope de référence pour de très nombreux examens scintigraphiques.

La TEP (tomographie par émission de positons) exploite un émetteur β+β⁺, comme le fluor 18, qui marque le glucose et révèle l’activité métabolique des tissus. Pour mieux comprendre son mécanisme, on peut le décomposer en deux étapes simples :

  • Émission d’un positon par désintégration du fluor 18.

  • Annihilation du positon avec un électron, produisant deux photons γ émis en sens opposé et détectés en coïncidence par l’appareil.

C’est ce processus qui permet de reconstruire une image précise de la répartition du traceur dans l’organisme.

À retenir

Le choix du marqueur dépend de l’organe à explorer, du rayonnement émis, de la dose et de la durée d’élimination.

Comparaison des doses en médecine nucléaire et en radiothérapie

Les examens de médecine nucléaire diagnostique (scintigraphie, TEP) utilisent des doses efficaces faibles à modérées, de l’ordre de quelques à quelques dizaines de millisieverts (mSvmSv).

Ces doses n’entraînent pas d’effet immédiat sur les tissus. La préoccupation principale est le risque d’effets stochastiques, c’est-à-dire une augmentation statistique de la probabilité de développer un cancer à long terme.

En revanche, la radiothérapie administre volontairement des doses très élevées, de plusieurs dizaines de gray (GyGy), pour provoquer des effets déterministes : une destruction ciblée et massive des cellules cancéreuses dans la zone traitée.

À retenir

En médecine nucléaire, la dose efficace est exprimée en sieverts (mSv) et les risques concernent surtout les effets stochastiques. En radiothérapie, la dose absorbée est exprimée en gray (Gy) et vise délibérément des effets déterministes.

Précautions d’emploi en milieu médical

L’utilisation des marqueurs radioactifs nécessite une vigilance particulière. Le principe fondamental est d’administrer la dose minimale efficace, en veillant à la sécurité du patient.

Dans la majorité des cas, le traceur est éliminé par les urines, ce qui explique les consignes données après l’examen : boire abondamment et uriner fréquemment pour accélérer l’évacuation de la radioactivité. Les patients et les soignants doivent également être protégés par la limitation du temps d’exposition, l’augmentation de la distance et le recours à un blindage approprié.

Certaines situations exigent une surveillance accrue, notamment la grossesse ou l’insuffisance rénale, qui ralentit l’élimination du marqueur.

À retenir

Les marqueurs radioactifs sont manipulés selon des protocoles stricts. Leur élimination se fait le plus souvent par les urines, d’où l’importance des consignes d’hydratation et de mictions fréquentes.

Conclusion

Les marqueurs radioactifs se sont imposés comme des outils incontournables de l’imagerie médicale moderne. Ils permettent d’observer non seulement la structure, mais aussi le fonctionnement des organes, en offrant des diagnostics plus précis et plus précoces.

Leur efficacité repose sur un choix adapté de l’isotope, de la dose et de la demi-vie, tout en maintenant des niveaux d’exposition bien inférieurs à ceux de la radiothérapie. Dans un contexte où la santé publique et la sécurité des patients sont des priorités, ces techniques illustrent l’équilibre entre innovation scientifique et responsabilité médicale.