Introduction
En 1857, le physiologiste Claude Bernard, chercheur français, introduit le concept de milieu intérieur. Il montre que la vie des cellules dépend de la stabilité du milieu qui les entoure. Au XXe siècle, l’Américain Walter Cannon reprend cette idée et formalise la notion moderne d’homéostasie, définie comme la capacité de l’organisme à maintenir stables certains paramètres internes malgré les variations du milieu extérieur.
Cette stabilité est une condition essentielle à la survie des cellules et repose sur une organisation en compartiments liquidiens et sur des échanges constants. Parmi les organes qui assurent cette régulation, le rein occupe une place centrale.
Définition du milieu intérieur et compartiments liquidiens
Le milieu intérieur, selon Claude Bernard, correspond exclusivement aux liquides extracellulaires.
Il comprend le plasma sanguin, qui circule dans les vaisseaux et transporte nutriments, hormones et déchets, la lymphe, qui draine une partie du plasma en dehors des capillaires, et le liquide interstitiel, qui entoure directement les cellules et constitue la plus grande partie du milieu intérieur. Cette abondance du liquide interstitiel reflète son rôle fondamental comme interface entre les cellules et le reste de l’organisme : c’est à travers lui que transitent les échanges entre le sang et les tissus.
Le liquide intracellulaire, quant à lui, correspond au contenu des cellules et contient une forte concentration de potassium et de protéines. Même s’il joue un rôle vital pour le métabolisme cellulaire, il ne fait pas partie du milieu intérieur au sens de Claude Bernard.
À retenir
Le milieu intérieur regroupe uniquement les liquides extracellulaires (plasma, lymphe, liquide interstitiel). Le liquide interstitiel en est la composante principale et assure la majorité des échanges avec les cellules.
Échanges avec le milieu extérieur
Le milieu intérieur échange en permanence avec le milieu extérieur grâce à plusieurs organes spécialisés.
Les poumons permettent l’entrée de l’oxygène et l’élimination du dioxyde de carbone, nécessaires à la respiration cellulaire.
Le tube digestif assure l’absorption de l’eau, des nutriments et des sels minéraux, mais son rôle ne se limite pas à cette fonction : il agit également comme une barrière sélective qui empêche le passage de substances toxiques ou de micro-organismes pathogènes, contribuant ainsi à la protection de l’organisme. Les reins filtrent le sang, éliminent les déchets azotés et ajustent avec précision la quantité d’eau et d’ions.
La peau, par la transpiration, élimine une petite quantité d’eau et de sels minéraux ; ce rôle est toutefois secondaire par rapport à celui des reins, des poumons et du tube digestif dans le maintien de l’homéostasie hydrique et ionique.
À retenir
Les échanges avec le milieu extérieur permettent l’apport d’oxygène et de nutriments, l’élimination des déchets et une protection contre les agents nocifs, grâce notamment à la fonction barrière du tube digestif.
Rôle du rein dans la régulation
Les reins produisent chaque jour environ 180 litres d’ultrafiltrat glomérulaire, et non 180 litres de plasma. Cette précision est importante car le volume total de plasma dans l’organisme est d’environ 3 litres : il s’agit donc d’un processus de filtration continue et non d’un remplacement intégral du plasma.
Les reins éliminent les déchets métaboliques comme l’urée et la créatinine, ajustent la quantité d’eau et régulent les ions clés de l’équilibre hydrique et électrique, en particulier le sodium (), le potassium () et le chlore (). Ils contribuent aussi au maintien du pH sanguin. Cette régulation est lente mais durable, car elle complète les systèmes tampons du sang (bicarbonates, protéines, hémoglobine) et la ventilation pulmonaire, qui agit plus rapidement mais de façon limitée.
Enfin, les reins interviennent dans la régulation de la pression artérielle grâce au système rénine–angiotensine–aldostérone (RAA). Lors d’une baisse de pression ou de volume sanguin, la sécrétion de rénine déclenche une cascade hormonale qui provoque une vasoconstriction et une rétention accrue de sodium et d’eau, ce qui élève la pression artérielle.
À retenir
Les reins produisent environ 180 L/jour d’ultrafiltrat, régulent l’eau, les ions (, , ), le pH (lentement mais efficacement) et la pression artérielle via le système RAA.
Structure et rôle du néphron
Le néphron est l’unité fonctionnelle du rein, présent à environ un million d’exemplaires par rein. Il se compose de plusieurs segments spécialisés. Le corpuscule rénal (capsule de Bowman et glomérule) réalise la filtration glomérulaire.
Le tubule proximal assure une réabsorption massive de l’eau, du sodium, du glucose et des acides aminés. L’anse de Henle crée un gradient osmotique dans la médullaire rénale, indispensable à la concentration de l’urine. Le tubule distal ajuste plus finement les réabsorptions et sécrétions d’ions, notamment sous l’influence d’hormones comme l’aldostérone.
Enfin, le tubule collecteur, sous l’action de l’hormone antidiurétique (ADH), module la réabsorption d’eau et conduit l’urine définitive vers les voies urinaires.
À retenir
Chaque néphron transforme l’ultrafiltrat en urine définitive grâce à ses segments spécialisés (proximal, anse de Henle, distal, collecteur), qui assurent réabsorption, ajustements ioniques et concentration des déchets.
Comparaison plasma, urine primitive et urine définitive
Le plasma est la partie liquide du sang, riche en eau, en nutriments, en hormones, en protéines, en ions (, , ) et en déchets métaboliques. L’urine primitive correspond à l’ultrafiltrat produit par la filtration glomérulaire. Elle a une composition proche de celle du plasma mais ne contient ni protéines ni cellules sanguines. Sa production atteint environ 180 litres par jour, ce qui illustre l’ampleur du processus de filtration.
L’urine définitive est obtenue après les réabsorptions massives et les sécrétions réalisées dans le néphron. Sa production est réduite à environ 1,5 litre par jour, preuve de l’efficacité des mécanismes de récupération. Elle contient les déchets métaboliques (urée, créatinine), certains ions en excès et une quantité d’eau ajustée selon l’état d’hydratation. Les reins régulent particulièrement les ions sodium, potassium et chlore, qui sont essentiels à l’équilibre hydrique, électrique et nerveux.
À retenir
L’urine primitive () est un ultrafiltrat du plasma, tandis que l’urine définitive () résulte d’une réabsorption massive et d’une régulation précise des ions clés , et .
Conclusion
Le milieu intérieur, défini par Claude Bernard et enrichi par la notion d’homéostasie de Walter Cannon, correspond aux liquides extracellulaires qui entourent les cellules, le plus important étant le liquide interstitiel.
Les échanges constants avec le milieu extérieur, assurés par les poumons, le tube digestif (à la fois lieu d’absorption et barrière protectrice), les reins et la peau, permettent de maintenir cet équilibre. Les reins, grâce à leurs néphrons, produisent un ultrafiltrat abondant, réabsorbent l’essentiel des substances utiles, régulent les ions clés, le pH et la pression artérielle, et produisent une urine définitive concentrée. Cette régulation fine de la composition et du volume du milieu intérieur est une condition indispensable au maintien de la vie cellulaire.
