La France et l’unité italienne

icône de pdf
Signaler
Dans cette leçon, tu vas comprendre comment la France de Napoléon III a contribué au Risorgimento italien. Tu verras comment les victoires militaires de 1859, les compromis diplomatiques et le traité de Turin de 1860 ont permis au Piémont-Sardaigne de progresser vers l’unité, tout en offrant à la France Nice et la Savoie. Mots-clés : Risorgimento, Napoléon III, Cavour, Garibaldi, traité de Turin, unification italienne.

Introduction

Au milieu du XIXe siècle, l’Italie apparaît comme un véritable puzzle politique. La péninsule est éclatée en royaumes, duchés et États sous des influences étrangères. Le nord est en partie contrôlé par l’Autriche, le sud appartient au royaume des Deux-Siciles, dirigé par une branche des Bourbons, issue de la dynastie espagnole mais solidement implantée dans le royaume depuis le XVIIIᵉ siècle. Au centre, les États pontificaux restent sous la souveraineté directe du pape. Dans ce cadre morcelé, les idées de liberté et d’unité progressent, portées par le romantisme, le souvenir de la Révolution française et la montée du sentiment national. La France du Second Empire, conduite par Napoléon III, joue un rôle décisif : ses choix diplomatiques et militaires modifient la carte de l’Italie, tout en servant ses propres ambitions.

Le contexte européen et l’essor du mouvement national italien

Depuis le congrès de Vienne de 1815, l’Italie est divisée en plusieurs entités. Le royaume de Piémont-Sardaigne regroupe le Piémont, la Savoie, Nice et l’île de Sardaigne. Le sud est dominé par le royaume des Deux-Siciles, au centre subsistent les États pontificaux, tandis que la Lombardie et la Vénétie sont sous tutelle autrichienne. De petits duchés du nord, comme Parme ou Modène, sont confiés à des princes liés à Vienne.

Face à ce morcellement, le Risorgimento – littéralement « résurgence » – se développe. Ce mouvement politique et culturel défend l’idée d’une Italie unifiée, libre de toute domination étrangère. Giuseppe Mazzini incarne cette aspiration avec son mouvement républicain, la Jeune Italie, tandis que Giuseppe Garibaldi devient le héros militaire de la cause nationale. Mais l’unité ne peut progresser sans l’action du Piémont-Sardaigne, mené par Victor-Emmanuel II et son Premier ministre, Cavour, qui dès 1852 met la diplomatie au service de l’unification.

À retenir

Le Risorgimento naît du rejet des dominations étrangères et de l’aspiration à l’unité, sous l’impulsion du Piémont-Sardaigne dirigé par Cavour.

Les motivations politiques et diplomatiques du Second Empire

Napoléon III, marqué par son adolescence passée à Rome et hostile à l’Autriche, se montre attentif à la cause italienne. Mais ses choix ne relèvent pas seulement de convictions personnelles. Ils répondent aussi à des calculs stratégiques : diminuer l’influence autrichienne en Italie, renforcer le prestige militaire de la France et obtenir des compensations territoriales.

Toutefois, l’empereur doit ménager une opinion catholique française très attachée au maintien des États pontificaux, considérés comme la garantie de l’indépendance du pape. Ce dilemme explique l’attitude prudente et parfois hésitante de Napoléon III, pris entre le soutien aux patriotes italiens et la nécessité de rassurer les catholiques français.

À retenir

Le soutien français mêle convictions personnelles de Napoléon III et objectifs géopolitiques, limités par la question des États pontificaux.

Les alliances et campagnes militaires françaises en Italie

La rencontre de Plombières, en juillet 1858, marque un tournant. Napoléon III et Cavour concluent un accord secret : la France interviendra aux côtés du Piémont si l’Autriche l’attaque. En échange, la France recevra Nice et la Savoie.

Au printemps 1859, Cavour provoque volontairement une réaction autrichienne. L’armée de Vienne attaque le Piémont, donnant à Napoléon III le prétexte pour intervenir. Aux côtés des troupes piémontaises, les Français remportent deux grandes victoires : à Magenta le 4 juin 1859, puis à Solferino le 24 juin, bataille sanglante qui marquera les esprits et inspirera Henri Dunant à créer la Croix-Rouge.

Pourtant, l’empereur français redoute l’enlisement et les réactions des catholiques face à la menace qui pèse sur les États pontificaux. Il choisit alors de négocier seul avec l’Autriche. À Villafranca, en juillet 1859, il conclut une paix rapide avec François-Joseph. La Lombardie est cédée au Piémont, mais la Vénétie reste autrichienne. Ce compromis surprend et déçoit Cavour, qui démissionne temporairement. Le traité de Zurich (1859-1860) vient ensuite officialiser ces transferts territoriaux.

À retenir

Les victoires de 1859 permettent au Piémont de s’agrandir, mais la paix signée par Napoléon III stoppe l’élan unitaire, provoquant une grande frustration.

Le rattachement de Nice et de la Savoie à la France

En avril 1860, le traité de Turin concrétise la promesse faite à Plombières : Nice et la Savoie sont cédées à la France. Des plébiscites organisés dans ces territoires confirment officiellement le rattachement, mais les résultats sont contestés, surtout à Nice où l’opposition dénonce pressions et irrégularités.

Pour la France, c’est un gain territorial considérable, renforçant à la fois sa frontière alpine et son ouverture méditerranéenne. Pour le Piémont-Sardaigne, il s’agit d’un sacrifice nécessaire pour poursuivre l’unité. En 1860, les duchés du centre – Parme, Modène, la Toscane et les Légations pontificales – rallièrent le Piémont. Dans le même temps, Garibaldi lança sa célèbre expédition des Mille, qui permit la conquête de la Sicile et ouvrit la voie à l’unification de l’Italie.

À retenir

Le traité de Turin offre à la France Nice et la Savoie, tandis que l’Italie poursuit sa marche vers l’unité grâce aux actions des patriotes.

Conclusion

En intervenant militairement en 1859, la France de Napoléon III a ouvert une brèche décisive dans l’ordre établi par le congrès de Vienne. Son aide permit au Piémont-Sardaigne de poser la première pierre de l’unité italienne, mais elle fut rapidement limitée par les contraintes diplomatiques et religieuses. La France en retira deux territoires stratégiques, Nice et la Savoie, tandis que l’Italie progressa dans son unification grâce à Cavour et à Garibaldi. Toutefois, l’appui français ne s’arrêta pas complètement après 1859 : Napoléon III soutint encore indirectement Garibaldi en 1860 et intervint militairement en 1867, à Mentana, contre ce dernier. L’aide française devint plus prudente et sélective, mais elle resta un élément non négligeable du Risorgimento, où ambitions françaises et italiennes se mêlèrent pour transformer durablement la carte de l’Europe.