La capacité et l'incapacité

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Cette leçon t’explique la différence entre personnalité juridique et capacité juridique, c’est-à-dire le droit d’agir soi-même. Tu y découvriras comment la loi protège les mineurs et les personnes vulnérables à travers la tutelle, la curatelle ou l’habilitation familiale, et comment les personnes morales exercent leurs droits dans la limite de leur objet social. Mots-clés : capacité juridique, incapacité, tutelle, curatelle, représentation, protection juridique.

Introduction

Être reconnu comme personne juridique signifie avoir des droits et des obligations, mais cela ne suffit pas à pouvoir les exercer librement. Le droit distingue en effet entre la personnalité juridique (le fait d’exister en tant que sujet de droit) et la capacité juridique, c’est-à-dire l’aptitude à exercer soi-même ses droits. Cette capacité varie selon l’âge, la santé ou certaines situations particulières. Lorsqu’une personne ne peut pas agir seule, la loi prévoit des mécanismes de représentation destinés à la protéger. Comprendre la capacité et l’incapacité juridique permet donc de saisir comment le droit équilibre autonomie individuelle et protection des personnes vulnérables.

La capacité juridique : le principe

La capacité juridique désigne l’aptitude reconnue par la loi à être titulaire de droits et à les exercer soi-même. Elle se compose de deux aspects :

  • la capacité de jouissance, c’est-à-dire le droit de posséder des droits (par exemple, être propriétaire, travailler, hériter) ;

  • la capacité d’exercice, qui correspond à la faculté d’exercer soi-même ces droits, sans l’aide d’un représentant.

Toute personne physique acquiert la personnalité juridique à la naissance et, en principe, la pleine capacité d’exercice à sa majorité, fixée à 18 ans. Avant cet âge, ou lorsque certaines facultés sont altérées, la capacité d’exercice est limitée afin de protéger la personne.

Exemple : un adulte peut conclure seul un contrat de travail ou vendre un bien, tandis qu’un mineur doit être représenté par ses parents ou un tuteur.

À retenir

La capacité juridique comprend la capacité de jouissance et la capacité d’exercice. Toute personne possède la personnalité juridique dès la naissance, mais la pleine capacité d’exercice n’est acquise qu’à la majorité.

L’incapacité juridique : une protection avant tout

Certaines personnes n’ont pas la pleine capacité juridique. Elles sont dites incapables : la loi limite leur pouvoir d’agir afin de prévenir les abus et de protéger leurs intérêts. L’incapacité n’est donc pas une sanction, mais une mesure de protection.

Les incapacités liées à l’âge

  • Le mineur non émancipé (moins de 18 ans) ne dispose pas de la capacité d’exercice. Ses parents ou son tuteur accomplissent pour lui les actes importants, comme la signature d’un contrat ou la vente d’un bien. En revanche, il peut effectuer certains actes de la vie courante, comme acheter un objet peu coûteux ou ouvrir un compte d’épargne avec autorisation parentale.

  • Le mineur émancipé (à partir de 16 ans, sur décision du juge) acquiert la capacité d’accomplir seul la plupart des actes de la vie civile, sauf exceptions prévues par la loi (par exemple, le mariage, l’adoption ou certains actes de commerce).

Les incapacités liées à la santé ou à la situation personnelle

  • La tutelle concerne les personnes majeures dont les facultés mentales ou physiques sont gravement altérées au point qu’elles ne peuvent plus accomplir les actes de la vie civile. Le tuteur agit alors en leur nom pour tous les actes importants.

  • La curatelle s’applique lorsque la personne a besoin d’être assistée mais non représentée. Le curateur co-signe alors les actes les plus engageants (par exemple, un emprunt ou une vente importante).

  • L’habilitation familiale, introduite par la loi du 16 février 2015, permet à un proche parent (ascendant, descendant, conjoint, frère ou sœur) d’agir au nom d’un membre de sa famille sans recourir à une procédure de tutelle ou de curatelle.

Ces régimes sont placés sous le contrôle du juge des contentieux de la protection, qui veille au respect des intérêts et des droits fondamentaux de la personne protégée. Ils visent à préserver autant que possible l’autonomie tout en garantissant une sécurité juridique.

À retenir

L’incapacité juridique limite l’exercice des droits pour protéger les mineurs ou les personnes vulnérables. Elle prend plusieurs formes — tutelle, curatelle, habilitation familiale —, toutes placées sous le contrôle du juge des contentieux de la protection.

Les mécanismes de représentation : agir pour le compte d’autrui

Lorsqu’une personne ne peut exercer ses droits seule, la loi prévoit des mécanismes de représentation. Le représentant agit au nom de la personne protégée et dans son intérêt.

Le droit distingue :

  • les actes d’administration, qui concernent la gestion ordinaire des biens (payer un loyer, entretenir un logement, conclure un contrat d’assurance) ;

  • les actes de disposition, qui modifient le patrimoine de manière importante (vente d’un bien immobilier, donation, emprunt). Ces actes nécessitent souvent l’accord du juge ou du représentant légal.

Exemple : un tuteur peut gérer le compte bancaire d’une personne sous tutelle, mais il ne peut pas vendre un bien immobilier sans l’autorisation du juge des contentieux de la protection.

À retenir

La représentation permet d’agir au nom d’une personne incapable. Les actes d’administration concernent la gestion courante, tandis que les actes de disposition modifient durablement le patrimoine.

La capacité juridique des personnes morales

Les personnes morales disposent également d’une capacité juridique, mais celle-ci est limitée à leur objet social, c’est-à-dire à la finalité prévue dans leurs statuts. Elles peuvent donc exercer des droits uniquement dans le cadre de leur activité légale. Les dirigeants (président, gérant, maire, etc.) représentent la personne morale et engagent sa responsabilité en son nom.

Exemple : une entreprise peut acheter des locaux pour son activité professionnelle, mais pas pour un usage privé étranger à son objet social.

À retenir

Les personnes morales ont une capacité juridique restreinte à leur objet social. Leurs représentants agissent en leur nom et engagent leur responsabilité.

Conclusion

La capacité juridique est la faculté d’exercer ses droits, tandis que l’incapacité vise à protéger ceux qui ne peuvent pas le faire eux-mêmes. Si la pleine capacité est acquise à la majorité, la loi prévoit des régimes de protection pour les mineurs et les majeurs vulnérables, encadrés par le juge des contentieux de la protection. Grâce aux mécanismes de représentation, ces personnes continuent d’exister juridiquement et d’agir, tout en étant préservées des risques d’erreurs ou d’abus. Ainsi, la capacité illustre un principe fondamental du droit civil : concilier liberté et sécurité juridique.