L'autorité de la parole : la parole et la vérité

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Vert : définitions

Introduction

La parole permet d’exprimer une connaissance qui est, le plus souvent, conforme à la réalité. C’est en ce sens que l’on peut affirmer que la parole porte en elle l’enjeu de la vérité. Plus précisément, parole et vérité sont indissociables : nous ne pouvons penser la vérité autrement que par des mots. « Le vrai et le faux sont des attributs du langage, non des choses. Et là où il n'y a pas de langage, il n'y a ni vérité, ni fausseté », écrit le philosophe anglais Thomas Hobbes (1588-1679) dans son œuvre le Léviathan. Le mot grec logos désigne à la fois la raison, la capacité d’enchaîner rationnellement les idées, et le langage parlé et écrit.

Remarque

Pour plus d’explication n’hésite pas à te référer à nos cours sur la rhétorique.

Pouvoir parler et pouvoir penser (la vérité) sont une seule et même chose. Ainsi, l’autorité de la parole repose sur la capacité d’un orateur à dire la vérité, ou à faire croire qu’il dit la vérité.

Objectifs : Cette leçon explore l’un des fondements de l’autorité de la parole : le dire vrai. Ce « dire vrai » s’exprime différemment selon qu’il s’agit d’une parole divine, d’un discours scientifique ou d’un discours qui se fait passer pour vrai.

I. Dire vrai

1) La parole divine

Pour les croyants, la parole divine est créatrice de réalité, et donc de vérité. Dans la Bible, il est écrit que lorsque Dieu « dit » quelque chose, il la fait exister : « Dieu dit : Que la lumière soit ! Et la lumière fut » (extrait de la « Genèse »). Ainsi, la parole divine fait coïncider réalité et vérité. L’autorité de la parole divine vient de cet acte créateur primordial : la parole dit le monde et le créée en même temps.

Les prophètes, du grec prophètès (signifiant interprète d'un dieu ; celui qui transmet la volonté des dieux) sont les porte-paroles et interprètes des dieux, puis d’un dieu. Le prophète transmet la parole divine aux hommes. Parler au nom d’un dieu leur donne l’autorité de convaincre : « Le vrai et le faux sont des attributs du langage, non des choses. Et là où il n'y a pas de langage, il n'y a ni vérité, ni fausseté. »

2) Le discours scientifique

Le discours scientifique est un discours qui construit et diffuse des connaissances sur le monde. Qu’il s’agisse de biologie ou de philosophie, il vise à s’approcher au plus près de la réalité.

L’autorité de la parole scientifique est basée sur des raisonnements. C’est une parole qui accepte la contradiction. Les thèses sont soumises à la révision et à la critique, d’autant plus quand il s’agit de sciences qui ont un rapport à l’expérience sensible du monde, comme les sciences humaines et sociales. De nouvelles preuves matérielles, ou de nouvelles idées, peuvent amener à la formulation de nouvelles thèses plus vraies (considérant qu’il n’y a pas de vérité absolue).

Définition

Sciences humaines et sociales. Les sciences humaines et sociales, ou sciences de l'homme et de la société, étudient l'homme dans différents contextes historiques et géographiques. Parmi elles on retrouve des sciences anciennes comme la philosophie ou l'histoire, et des sciences plus récentes comme l'anthropologie ou la sociologie, qui se sont développées avec la complexification de la réalité humaine.

II. Remise en cause de la vérité et de l’autorité

1) Parole fausse et mensonge

On pourrait croire que le contraire de la vérité est le mensonge. Néanmoins, il faut distinguer la parole fausse et le mensonge.

Selon le savant romain Nigidius Figulus (vers 98-44 av. J.-C.), « entre dire un mensonge et mentir, il y a une grande différence : c’est que celui qui ment ne se trompe pas, il veut tromper ; celui qui dit un mensonge est lui-même trompé ». Nigidius ajoute ce qui suit : « celui qui ment trompe autant qu’il est en son pouvoir, mais celui qui dit un mensonge ne trompe pas, du moins volontairement. »

Ainsi, c’est l’intention de l’orateur qui détermine la différence entre une parole fausse et un mensonge. Dès lors qu'elles sont mises à nu, les paroles fausses et mensongères perdent leur autorité.

2) La « servitude volontaire »

L’autorité est fondée sur un pouvoir consenti. Elle ne va pas de soi, elle passe par un processus de reconnaissance. Elle est donc relative. Sans cette reconnaissance, l’autorité s’impose et devient autoritaire, voire tyrannique.

Dans son Discours de la servitude volontaire (1549), le philosophe Étienne de La Boétie (1530-1563) met en garde contre le penchant humain à consentir au pouvoir et à la domination. Ce titre nous interpelle : comment un homme peut-il vouloir être asservi ? En oubliant que sa nature est d’être libre.

Ainsi, même si la parole vise la vérité ou est considérée comme vraie, toute autorité est relative et les hommes doivent préserver leur autonomie morale.

Définition

Tyrannie. Pouvoir arbitraire et absolu d'un souverain, d'une personne ou d'un groupe de personnes détenant l'autorité suprême, caractérisé par un gouvernement d'oppression, d'injustice et de terreur.