I. La e-communication et le partage de l'information dans l'organisation
1) De l’émergence à la démocratisation de la e-communication
L’e-communication correspond à l’échange de données ou d’informations par le biais de supports électroniques comme Internet. Elle représente donc essentiellement la communication numérique.
Les communications électroniques ou e-communications sont apparues grâce à l’essor de l’informatique, des multimédias et d’Internet. Ainsi, la convergence de ces nouvelles technologies avec les outils classiques de télécommunication tels que le téléphone ou le fax a permis de créer de nouveaux supports de communication performants pour faciliter l’émission, la transmission et la réception de données beaucoup plus complexes et simultanées.
Exemple
Il est possible aujourd’hui, sur un même terminal mobile, de parler avec un correspondant, tout en regardant une page web, de lui envoyer par mail le lien de téléchargement de la chanson que vous écoutiez avant d’acheter les billets pour le concert de ce groupe et de poster sur Facebook la joie que vous procure cette prochaine sortie…
Si l’e-communication a d’abord été développée au sein des organisations, elle a aujourd’hui largement dépassé ces frontières. Les pratiques, d’abord professionnelles comme l’utilisation d’une messagerie électronique, sont dorénavant des pratiques courantes de l’individu en dehors de l’organisation. Cependant, les usages privés de l’e-communication deviennent également des sources d’inspiration pour les entreprises qui n’hésitent plus, par exemple, à utiliser les réseaux sociaux ou les blogs pour interagir avec leur public.
2) Les outils de la e-communication
La e-communication a permis aux organisations de développer l’interactivité avec leurs publics interne comme externe, qui sont devenus des acteurs des échanges d’information à part entière. La communication est plus directe, plus libre et moins formelle. Elle offre également une variété de supports qui permet de s’adapter au mieux à la nature et au degré d’urgence des informations à transmettre.
a) La messagerie électronique
L’usage de la messagerie électronique remplace en quasi-totalité celui de la correspondance papier dans les entreprises. On lui préfère la rapidité de transmission des messages et la capacité de diffusion large d’une information (par exemple en cas d’envoi groupé ou de routage de mail en gros volume). L’apparition du Web a encore facilité son utilisation en offrant la possibilité de consulter ses mails à distance sur n’importe quel terminal connecté.
Cependant, cet outil nécessite une consultation très régulière par son utilisateur qui peut recevoir en peu de temps une quantité importante de messages, alors difficile à traiter. Cela freine sa productivité et diminue par conséquent l’interactivité permise par l’outil. La messagerie électronique nécessite également un archivage thématique des e-mails afin de garder l’accessibilité des informations pour le destinataire. D’autres applications sont attachées à l’outil de messagerie permettant de développer ses usages.
b) La liste de diffusion
La liste de diffusion (mailing list) permet de simplifier l’envoi automatique d’un message identique à une liste de personnes récurrentes inscrites, par le biais d’une seule adresse mail, grâce à un logiciel « robot de liste ». L’inscription à ces listes peut se faire à l’initiative du destinataire ou après l’approbation d’un gestionnaire. Ces listes ont pour objectif, pour les récepteurs, de suivre un sujet précis, de faire de la veille ou d’être tenu informés du déroulement d’un projet. Pour l’expéditeur, il s’agit souvent de garder un contact privilégié avec un public (interne ou externe). Une liste de diffusion n’a pas pour vocation d’être interactive : le but est de diffuser une information et non d’échanger.
La liste de diffusion est régie par un cadre légal d’usage conformément au règlement européen sur la protection des données.
À savoir
Le règlement européen en matière de protection des données personnelles (RGPD – ou GDPR en anglais) est la nouvelle réglementation européenne qui change la manière dont les organisations doivent gérer les données des personnes avec qui elles interagissent (clients, prospects, employés, partenaires…). Elle est applicable depuis le 25 mai 2018.
Le régulateur européen a prévu des montants de sanction considérables en cas de non-respect du RGPD : 20 millions d’euros pour les PME ; jusqu’à plusieurs milliards d’euros de sanctions pour les grands groupes (4 % du chiffre d’affaires global du groupe).
La réglementation s’applique à toute organisation qui traite des données personnelles (des données clients, prospects, usagers, employés, etc.).
c) La liste de discussion
Elle permet aux abonnés d’une liste de se répondre et de communiquer entre eux à travers un système de discussion par le biais de la messagerie électronique. Cet outil est de plus en plus remplacé par les forums.
d) Les forums de discussions
Les forums de discussions sont des espaces privilégiés où l’ensemble des utilisateurs échange autour d’un sujet précis. Les discussions sont automatiquement classées par thème et par ordre chronologique d’arrivée des messages. Pour consulter les nouveaux messages postés sur le forum, l’utilisateur doit au préalable être inscrit et consulter régulièrement la page web. Cet outil demande donc un engagement et un suivi de la part des destinataires. Les contributions sont préalablement vérifiées par un modérateur avant d’être publiées afin d’en garantir le contenu.
Exemple
Le service recherche et développement d’une entreprise peut régulièrement lancer des sujets sur le forum d’entreprise pour partager ses idées et recueillir les avis et les préconisations des différents collaborateurs.
À savoir
Un modérateur est un internaute qui dispose de droits particuliers sur un forum lui permettant de filtrer les messages avant leur publication dans le but d’effacer tous ceux qui auraient un caractère raciste, diffamatoire ou contraire aux bonnes mœurs ou à l’ordre public. Il a également la possibilité de donner des droits spécifiques aux membres de la communauté mais aussi d’interdire l’accès à certains profils jugés dangereux.
e) Les pages wiki
Les pages wiki permettent à un utilisateur appartenant à une communauté désignée de créer ou de modifier de manière instantanée et à volonté une page web. En général, il n’existe pas de modérateur pour vérifier le contenu des contributions qui peuvent évoluer constamment, ce qui différencie cet outil d’un forum.
II. Les TIC au service de la collaboration
1) Le travail collaboratif
Le travail collaboratif nécessite l’interaction entre plusieurs acteurs qui, pour les besoins d’un projet ou d’une mission, doivent échanger et mettre en commun leurs informations afin d’atteindre leurs objectifs.
Pour mettre en place une collaboration efficace, les équipes ont besoin que chaque acteur ait un niveau d’information égal sur les différents aspects du projet (les décisions prises, le niveau d’avancement des tâches, les événements extérieurs ayant un impact sur le projet…). Ainsi, cela permet aux acteurs de réajuster plus rapidement la stratégie mise en place, gagner en réactivité et donc en productivité. La bonne circulation de l’information est donc l’une des clés de la réussite de la collaboration.
Le travail collaboratif nécessite également des contacts réguliers entre les acteurs afin d’échanger, de coordonner les actions, de répartir les tâches, de débattre, de prendre des décisions en concertation ou de prospecter de nouvelles idées.
Si le travail collaboratif garde ces éléments fondamentaux, il a beaucoup évolué grâce notamment au développement des TIC. C’est dorénavant un mode d’organisation du travail à part entière qui n’est plus simplement organisé de manière hiérarchique. Les entreprises favorisent aujourd’hui l’association de compétences complémentaires au sein d’équipes regroupées en fonctionnant par projet. Les équipes évoluent en fonction des besoins et des objectifs des projets.
2) L’enjeu de la collaboration pour les organisations : l’intelligence collective
La collaboration a pour objectif de développer des synergies entre les acteurs en optimisant le travail en équipe et l’utilisation des savoir-faire et des compétences individuelles dans le but de trouver des solutions communes plus efficaces.
La capacité de l’entreprise à faire travailler ensemble des acteurs aux profils différents permet de faire émerger une intelligence collective qui représente un réel facteur de performance pour les organisations, en leur ouvrant de nouvelles perspectives. Elle stimule en effet la créativité des collaborateurs, source d’innovation, qui participe à la création de valeur pour une entreprise.
Définition
Intelligence collective : une intelligence partout distribuée, sans cesse valorisée, coordonnée en temps réel, qui aboutit à une mobilisation effective des compétences ». (Pierre Levy). L’objectif de l’intelligence collective est de favoriser l’autonomie, de décentraliser les savoirs et les pouvoirs.
L’intelligence collective émane de la collaboration d’acteurs et résulte de ses interactions multiples. Elle nécessite donc la capacité de l’organisation à gérer les contributions de chaque acteur et l’échange d’information dans le cadre d’un processus où les intelligences individuelles interagissent. Le développement de l’intelligence collective nécessite également l’investissement de la communauté qui doit être impliquée dans le processus d’échange en vue de faire évoluer l’organisation. Chaque acteur doit également pouvoir en retirer un bénéfice personnel afin de rester motivé dans la poursuite de la collaboration.
L’intelligence collective peut prendre différentes formes en fonction du type de communauté, de l’organisation et des différentes intelligences individuelles. Elle est également plus ou moins développée selon le taux d’implication des acteurs.
Exemples
Avec l’avènement d’Internet et des smartphones, les résultats de l’intelligence collective ont pris des proportions énormes :
Google analyse les contenus de millions de sites internet et recroise ces informations avec les milliards de recherches effectuées sur son moteur de recherche pour proposer des services pertinents et personnalisés ;
la plateforme Waze, agrège les données sur le comportement de conduite de ses millions d’utilisateurs pour proposer des itinéraires ; elle mobilise les utilisateurs afin d’obtenir des informations qualitatives en temps réel sur le trafic (accidents, travaux, etc.).
3) Les outils favorisant la collaboration
Les TIC permettent le stockage, l’archivage et la mise à disposition de l’information mais elles favorisent également l’interactivité entre les acteurs, l’échange et le partage des informations à distance et en temps réel, nécessaires à la mise en place d’un travail collaboratif. De nombreux outils participent aujourd’hui à optimiser les modalités de travail collaboratif en augmentant sa productivité et sa réactivité.
Les platesformes collaboratives mettent ainsi à la disposition de l’organisation un certain nombre d’outils interconnectés, facilitant la collaboration entre des acteurs géographiquement dispersés.
Les TIC contribuent au gain de temps dans toutes les phases de collaboration et réduisent donc les coûts d’une structure, que ce soit par la mutualisation, les possibilités de travail en simultané sur un même document ou l’organisation de visioconférences par exemple. De plus, avec l’accessibilité accrue d’Internet dans tous les lieux publics ou via la 4G, les outils collaboratifs en ligne sont disponibles à tout moment, aussi bien sur ordinateur que sur tablette et sur téléphone portable.
Leur utilisation vise à augmenter la cohésion et la motivation des équipes en leur octroyant plus d’autonomie et en leur permettant de prendre certaines initiatives.
III. Les communautés en ligne et les réseaux sociaux au service de l'intelligence collective
1) Les communautés en ligne
Le terme communauté en ligne ou communauté virtuelle désigne un groupe de personnes qui communique par l’intermédiaire d’outils ou d’applications tels que les forums, les blogs, la messagerie… à des fins professionnelles, sociales, éducatives…
Ces communautés en ligne se caractérisent par :
- un espace virtuel qui héberge et centralise les échanges ;
- des individus ayant à cœur de partager leurs savoirs ou leurs opinions de manière volontaire afin d’en faire profiter la collectivité ;
- des membres motivés par des intérêts ou des pratiques professionnelles communes ou complémentaires.
Contrairement à d’autres communautés professionnelles comme le réseau social d’entreprise, la participation à une communauté en ligne n’est pas régie par un système de validation de profil. Elle est complètement bénévole et n’est pas nécessairement encadrée par une organisation. Il est rare d’y trouver un modérateur. Son contenu est donc moins surveillé et moins sécurisé. Mieux vaut éviter de diffuser des données sensibles ou confidentielles au sein de ce type de communauté.
2) Les fondamentaux du réseau social d’entreprise
Le réseau social d’entreprise (RSE) fonctionne comme un réseau social grand public à l’exemple de Facebook ou LinkedIn avec pour spécificités d’être limité en accès aux seuls collaborateurs de l’organisation et d’y ajouter des fonctionnalités adaptées au domaine professionnel de l’organisation. Il permet de gérer de grands volumes de conversations collaboratives tout en les regroupant par projet grâce à une plateforme applicative.
La notion de communauté est indissociable de celle de RSE puisque chacun des membres doit au préalable créer un « profil enrichi » où il met en valeur son expertise, ses centres d’intérêt, puis s’identifie avant chaque connexion. Les profils sont ensuite intégrés à des communautés regroupées par thème de travail ou par projet ou se forment par affinités de compétences ou d’intérêts personnels.
À savoir
Le Web 2.0 désigne l’évolution des fonctionnalités Internet développées dans les années 2000 permettant aux internautes d’interagir plus facilement sur la toile par le biais des outils web sociaux et de contribuer au développement de contenus via les sites, les blogs ou les forums.
Un RSE est centré sur la conversation et les relations sociales entre les acteurs. L’objectif est de favoriser l’émergence de l’intelligence collective en permettant aux membres d’augmenter et de fluidifier les échanges. Chaque profil peut consulter son « mur d’actualités », lui permettant d’avoir une vision globale et instantanée de l’avancée des conversations. Chaque utilisateur peut également s’insérer dans une conversation afin de réagir à une idée, étayer une hypothèse ou confronter des points de vue, s’abonner à différents flux et suivre en temps réel les nouveaux ajouts en recevant une notification « alerte » par courriel.
Le RSE combine plusieurs outils du Web 2.0 comme la messagerie instantanée ou le post vidéo afin de faciliter le partage des idées et des connaissances de manière informelle plus libre et interactive.
3) Les bénéfices recherchés de la mise en place d’un RSE en entreprise
L’entreprise qui met en place un RSE montre sa volonté de rendre son organisation plus collaborative. Elle en retire de nombreux avantages comme :
Focus sur…
La mise en place d’un RSE chez Lafarge
En 2010, le groupe a lancé son réseau social d’entreprise centré sur le « knowledge-management ». Lafarge est une société spécialisée dans l’ingénierie et le BTP. Avec plus de 63 000 personnes réparties dans plus de 60 pays, la problématique de la gestion des connaissances est un pilier central. C’est la raison qui a motivé la création de « knowledge-pladza » une plate-forme destinée au partage de connaissances et à l’échange des bonnes pratiques au sein de l’entreprise.
Source : reseausocialentreprise.com
4) Les précautions préalables à la mise en place d’un RSE
Il est indispensable que le RSE bénéficie d’un haut niveau de protection et de confidentialité des données échangées. Pour cela, l’entreprise doit mettre en place des protocoles de sécurité comme la suppression des comptes inutilisés ou la demande de changement des codes d’authentification à fréquence régulière.
Dans un avis du 12 juin 2009, la CNIL a précisé les règles applicables aux réseaux sociaux, dont en particulier les réseaux sociaux d’entreprise. Il s’agit entre autres de :
- définir des paramètres par défaut limitant la diffusion des données des internautes ;
- permettre aux personnes, même si elles ne sont pas membres des réseaux sociaux, de bénéficier d’un droit de suppression des données qui les concernent ;
- proposer aux internautes d’utiliser un pseudonyme, plutôt que leur identité réelle.
Depuis mai 2018, le RGPD (règlement général sur la protection des données) s’applique en France et en UE :
- le RGPD est un document de référence sur la protection des données dites à caractère personnel : traitement/exploitation, stockage/circulation ;
- il accentue et harmonise la réglementation au niveau européen ;
- il accroît le degré de responsabilité et les obligations de transparence des acteurs économiques et institutionnels. Ceux-ci sont contraints de communiquer exhaustivement et clairement à tous les individus concernés (fichiers clients et autres) la nature et les modalités du traitement des données. Chaque entité fichée peut exercer un meilleur contrôle de l’utilisation de ses données voire, sous certaines conditions, exiger leur effacement ;
- le RGPD amplifie les attributions et les pouvoirs des autorités de régulation compétentes : le texte s’applique aux acteurs de l’Union mais également à toute entreprise ou autre entité hors UE dès lors qu’elle traite des données concernant des organisations ou des résidents européens.
Cette évolution est souvent vécue comme une contrainte par l’entreprise. Pourtant, elle lui permet de répondre aux attentes des parties prenantes en matière de responsabilité sociétale.
La mise en place d’un RSE ne doit surtout pas être assimilée à un outil de contrôle de l’activité ou d’évaluation du salarié au risque que celui-ci l’utilise avec prudence et évite d’employer un ton spontané ou libéré.