Les réformes religieuses : Luther, Rome et la naissance de nouvelles Églises

icône de pdf
Signaler
Dans cette leçon, tu verras comment la Réforme protestante, initiée par Luther, Calvin et Henri VIII, bouleverse l’unité religieuse de l’Europe au XVIᵉ siècle. Tu comprendras aussi comment la Contre-Réforme catholique, menée par le concile de Trente et les jésuites, redéfinit la foi, l’art et la politique dans une Europe profondément transformée. Mots-clés : Réforme protestante, Luther, Calvin, Contre-Réforme, concile de Trente, guerres de religion.

Introduction

Au XVIe siècle, l’unité religieuse de la chrétienté occidentale vole en éclats. En 1517, le moine allemand Martin Luther critique la vente des indulgences et appelle à un retour à une foi fondée sur la grâce divine et la Bible. C’est le début de la Réforme protestante, qui se diffuse rapidement dans toute l’Europe grâce à l’imprimerie et aux réseaux d’humanistes comme Érasme. Celui-ci incarne une volonté de réforme morale sans rupture dogmatique : il critique les abus de l’Église mais refuse le schisme.

En réaction, l’Église catholique engage une vaste réforme interne et renforce son autorité : c’est la Contre-Réforme. Ces bouleversements ont des conséquences religieuses, politiques, culturelles et spirituelles qui transforment durablement l’Europe.

La Réforme protestante : Luther, Calvin et l’anglicanisme

La Réforme débute avec Luther. Ses 95 thèses de 1517 dénoncent les indulgences et affirment que le salut ne vient que de la foi (sola fide) et que seule la Bible fait autorité (sola scriptura). Excommunié en 1521 par le pape et mis au ban de l’Empire par Charles Quint, il traduit la Bible en allemand pour la rendre accessible à tous. Le luthéranisme s’impose en Allemagne et en Scandinavie, soutenu par de nombreux princes.

Dans les années 1530, Jean Calvin installe son Église à Genève. Il développe la doctrine de la prédestination (croyance selon laquelle Dieu a choisi à l’avance qui sera sauvé ou damné) et impose une stricte discipline morale et sociale. Son modèle rayonne en France, où ses partisans sont appelés huguenots, aux Provinces-Unies, où il accompagne la lutte politique contre l’Espagne, et en Écosse, où John Knox fonde le mouvement presbytérien.

En Angleterre, la rupture est d’abord politique : en 1534, le roi Henri VIII rompt avec Rome et fonde l’Église anglicane, qui conserve l’épiscopat (organisation hiérarchique par les évêques) et certains rites catholiques, tout en plaçant le roi à sa tête. Sous Édouard VI, l’anglicanisme adopte des positions plus protestantes, mais sous Élisabeth Ire, un compromis, appelé compromis élisabéthain, établit une Église nationale qui combine éléments catholiques et protestants.

À retenir

La Réforme protestante naît en Allemagne avec Luther, se diffuse grâce à Calvin en France, aux Provinces-Unies et en Écosse, et prend une forme spécifique en Angleterre avec l’anglicanisme.

La réaction catholique : réforme interne et Contre-Réforme

Face à la rupture, Rome engage une réforme de fond. Les historiens distinguent la réforme catholique, amorcée avant Luther (volonté de moraliser le clergé, améliorer la formation), et la Contre-Réforme, qui répond directement à la progression protestante.

Le concile de Trente (1545-1563) joue un rôle décisif. Un concile est une grande assemblée d’évêques réunie pour fixer la doctrine et la discipline de l’Église. Les Pères conciliaires réaffirment que la foi repose sur l’Écriture et la tradition, définissent clairement le rôle des sacrements et le salut par les œuvres, et renforcent le culte de la Vierge et des saints. Ils décident aussi d’uniformiser la liturgie : publication d’un catéchisme romain et d’un nouveau missel (livre liturgique) pour harmoniser la pratique religieuse.

La réforme s’appuie sur de nouveaux ordres comme les jésuites, fondés par Ignace de Loyola en 1540, qui diffusent un catholicisme renouvelé par l’enseignement, la prédication et les missions. Rome renforce aussi le contrôle doctrinal avec l’Index, une liste officielle des livres interdits jugés contraires à la foi.

À retenir

Le concile de Trente réforme en profondeur l’Église catholique, réaffirme sa doctrine et impose une uniformité liturgique. La Contre-Réforme passe aussi par les jésuites et par un contrôle accru des idées.

Les enjeux politiques, culturels et spirituels des réformes

Les réformes religieuses deviennent rapidement des enjeux politiques. Dans le Saint-Empire, la paix d’Augsbourg (1555) établit le principe « cujus regio, ejus religio » (« tel prince, telle religion ») : chaque prince peut imposer le catholicisme ou le luthéranisme dans son territoire. Mais le calvinisme n’est pas reconnu, ce qui entretient de nouvelles tensions. Ces rivalités débouchent au XVIIᵉ siècle sur la guerre de Trente Ans (1618-1648), conflit à la fois religieux et politique : elle oppose les Habsbourg catholiques aux princes protestants, mais voit aussi la France catholique soutenir les protestants pour affaiblir ses rivaux Habsbourg.

En France, les guerres de religion éclatent en 1562 entre catholiques (famille des Guise) et protestants (soutenus par les Bourbons). Elles alternent entre édits de tolérance et reprises de guerre. Le point culminant est le massacre de la Saint-Barthélemy en 1572. Finalement, l’édit de Nantes (1598), promulgué par Henri IV, accorde une liberté de culte limitée aux protestants : un compromis de coexistence religieuse inédit en Europe à l’époque.

Sur le plan culturel, l’imprimerie est un vecteur essentiel. Les protestants diffusent des Bibles en langues vernaculaires et des catéchismes simplifiés pour instruire les fidèles. L’Église catholique réplique avec des catéchismes tridentins et des manuels de formation. La culture visuelle est aussi bouleversée : les protestants, hostiles aux images religieuses, pratiquent l’iconoclasme (destruction des statues et peintures de culte), tandis que l’Église catholique encourage l’essor de l’art baroque, destiné à toucher et émouvoir les fidèles.

Enfin, sur le plan spirituel, les protestants prônent une relation directe entre le croyant et Dieu, fondée sur la lecture personnelle de la Bible. Le catholicisme, au contraire, réaffirme l’importance de la médiation des prêtres et des sacrements. Ces différences créent des cultures religieuses distinctes qui marquent durablement l’Europe.

À retenire

Les réformes religieuses déclenchent des guerres (Augsbourg, guerres de religion, guerre de Trente Ans), diffusent une culture religieuse nouvelle grâce à l’imprimerie et opposent iconoclasme protestant et art baroque catholique.

Conclusion

Le XVIe siècle est marqué par la rupture de l’unité chrétienne. La Réforme protestante, avec Luther, Calvin et Henri VIII, donne naissance à de nouvelles Églises et redéfinit la foi chrétienne. L’Église catholique, avec le concile de Trente et la Contre-Réforme, réaffirme son autorité et uniformise sa pratique.

Ces réformes religieuses ont des conséquences politiques (paix d’Augsbourg, guerres de religion, guerre de Trente Ans), culturelles (imprimerie, iconoclasme, art baroque) et spirituelles (nouvelle relation du croyant à Dieu). Elles inaugurent une Europe religieusement divisée mais aussi plus diverse, où la religion devient un enjeu de société et de pouvoir autant qu’une affaire de foi.