Introduction
Les crises financières ont mis en évidence la fragilité d’un système bancaire mal encadré, capable de générer des risques systémiques d’une ampleur considérable.
Pour prévenir ces instabilités, les autorités publiques ont progressivement instauré des instruments de régulation financière destinés à surveiller les établissements, limiter les comportements à risque et renforcer la solidité du système bancaire.
Trois piliers structurent aujourd’hui cette régulation : la supervision bancaire, les ratios prudentiels et le rôle des banques centrales dans la stabilité financière. Ensemble, ils forment un cadre d’action visant à éviter que les erreurs locales ne se transforment en crises globales.
La supervision bancaire : anticiper les fragilités
La supervision bancaire désigne l’ensemble des contrôles exercés par les autorités publiques pour vérifier que les banques respectent les règles de prudence et ne compromettent pas la stabilité du système. Elle s’exerce à deux niveaux.
Au niveau national, elle est assurée en France par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), qui veille à la solidité financière des établissements et peut intervenir en cas de défaillance.
Au niveau européen, la Banque centrale européenne (BCE) supervise directement les plus grandes banques de la zone euro dans le cadre du Mécanisme de supervision unique, mis en place après la crise de 2008 pour garantir une surveillance harmonisée.
Cette supervision s’appuie sur plusieurs outils. Les autorités analysent régulièrement les bilans bancaires, comparant les actifs (ce que la banque possède) et les passifs (ce qu’elle doit). Elles réalisent aussi des stress tests – ou tests de résistance – qui simulent des scénarios de crise afin d’évaluer la capacité des banques à y faire face.
Enfin, elles surveillent la solvabilité, c’est-à-dire la capacité d’un établissement à honorer l’ensemble de ses engagements à long terme. Ces dispositifs visent à détecter les fragilités avant qu’elles ne deviennent systémiques.
À retenir
La supervision bancaire permet d’identifier les vulnérabilités des établissements avant qu’elles ne se propagent. Elle constitue une première ligne de défense contre les crises financières.
Les ratios prudentiels : encadrer les risques des banques
Les ratios prudentiels, définis par les accords de Bâle III, obligent les banques à maintenir des marges de sécurité suffisantes pour affronter les chocs économiques. Ces ratios fixent des exigences quantitatives, assurant que les banques disposent de ressources stables et d’une structure financière solide.
Trois indicateurs sont particulièrement essentiels. Le ratio de solvabilité, ou ratio de fonds propres, mesure la proportion de ressources propres de la banque par rapport à ses actifs pondérés selon leur niveau de risque.
Selon les normes de Bâle III, les banques doivent disposer d’au moins 8 % de fonds propres, auxquels s’ajoutent des coussins de conservation de capital, portant l’exigence totale à 10,5 %. Le ratio de liquidité à court terme (LCR) impose de détenir des actifs liquides – facilement mobilisables – suffisants pour couvrir les sorties de trésorerie sur 30 jours en cas de crise.
Enfin, le ratio de financement stable à long terme (NSFR) garantit que les actifs à long terme soient financés par des ressources durables (dépôts stables, capitaux propres), limitant le risque de déséquilibre.
Ces règles visent à protéger les banques contre leurs propres excès. En cas de non-respect, les autorités peuvent interdire le versement de dividendes, restreindre les opérations risquées ou exiger un renforcement des fonds propres. Ces mécanismes rappellent que la stabilité d’une banque dépend avant tout de sa capacité à absorber les pertes sans recourir à l’aide publique.
À retenir
Les ratios prudentiels constituent un « coussin de sécurité » financier. Ils garantissent que les banques disposent de ressources suffisantes pour affronter les crises sans déstabiliser l’ensemble du système.
Le rôle des banques centrales : stabilité au-delà de la monnaie
Les banques centrales ne se limitent pas à conduire la politique monétaire ; elles jouent aussi un rôle essentiel dans la stabilité du système financier. Leur intervention se déploie sur plusieurs plans.
Elles agissent d’abord comme prêteur en dernier ressort : en cas de crise de liquidité, elles peuvent accorder des prêts d’urgence à des banques solvables mais temporairement en difficulté.
Cette fonction, mise en lumière par l’économiste Walter Bagehot dès le XIXe siècle, permet de prévenir les paniques bancaires. Elles exercent également une régulation macroprudentielle, qui vise à surveiller les déséquilibres globaux – tels qu’une bulle de crédit, un endettement excessif ou une spéculation incontrôlée – susceptibles de menacer la stabilité collective.
Les banques centrales fixent aussi les réserves obligatoires, c’est-à-dire la part des dépôts que les banques commerciales doivent conserver auprès d’elles. Cela limite la création monétaire et préserve la liquidité du système.
Enfin, elles déterminent le taux directeur, qui influence le coût du crédit et, par extension, l’investissement et la consommation.
L’ensemble de ces outils permet de prévenir le risque systémique, c’est-à-dire le danger qu’une défaillance locale – celle d’une grande banque ou d’un marché particulier – se propage à l’ensemble du système, entraînant une crise généralisée.
À retenir
Les banques centrales assurent la stabilité du système financier en régulant le crédit, la liquidité et les déséquilibres globaux. Leur action préventive renforce la confiance et limite les risques systémiques.
Conclusion
La régulation financière repose sur un triptyque indissociable : la supervision bancaire, qui contrôle les pratiques et détecte les fragilités ; les ratios prudentiels, qui encadrent les risques et garantissent la robustesse des établissements ; et le rôle des banques centrales, qui veille à la stabilité du système dans son ensemble.
Ces instruments ont considérablement réduit la probabilité de crises majeures depuis 2008, mais leur efficacité dépend de leur adaptation constante à un environnement financier en mutation rapide.
Dans un monde marqué par l’innovation technologique, la mondialisation des capitaux et la montée des cryptomonnaies, la régulation doit continuer d’évoluer pour préserver la stabilité sans freiner l’innovation ni le financement de l’économie réelle.
