Les évolutions du salariat et du travail indépendant

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L'ubérisation de l'économie

L’ubérisation de l’économie, du nom de l’entreprise Uber spécialisée dans les services de transport urbain avec chauffeur, est un processus récent qui consiste en l’utilisation de services permettant aux professionnels et aux clients de se mettre en contact directement, de manière quasi instantanée, sur des plateformes digitales.

L’ubérisation est désormais considérée comme un véritable procédé économique qui, par le biais des technologies de l’information et de la communication (TIC), contourne les processus économiques classiques et traditionnels en devenant un intermédiaire qui met en relation les consommateurs et les fournisseurs.

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Une plateforme digitale est un service occupant une fonction d’intermédiaire dans l’accès aux informations, contenus, services ou biens édités ou fournis par des tiers. On peut citer Uber, les voitures de tourisme avec chauffeur professionnel indépendant (VTC) et le covoiturage urbain en véhicules particuliers ; Airbnb, plateforme mondiale de location et de réservation de nuitées chez les particuliers ; Amazon Publishing, plateforme d’autoédition et de commercialisation de livres numériques.

Le développement du travail indépendant

Prédominant en France jusqu’au début des années 1930, le travail indépendant s’est ensuite progressivement réduit au profit du salariat, qui s’est imposé comme modèle d’emploi, sous l’effet d’importants gains de productivité agricole, de l’industrialisation de nombreuses activités et du développement de la grande distribution.

Au début des années 2000, les transformations de l’environnement économique, notamment le recours grandissant des entreprises à l’externalisation ainsi que la création, sur la période récente, de plateformes d’intermédiation, ont contribué à l’extension du travail indépendant. Plusieurs politiques publiques ont également facilité, à partir de 2003, la création d’entreprises nouvelles.

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Externalisation : processus à travers lequel une entreprise confie une ou plusieurs de ses activités secondaires à un prestataire externe.

À la fin des années 2000, la croissance de l’emploi indépendant non agricole est amplifiée par l’apparition du régime fiscal de l’auto-entrepreneur, créé en 2009, puis remplacé fin 2014 par le micro-entrepreneuriat qui nécessite peu d’investissement en capital.

Dans certaines professions, le micro-entrepreneuriat a supplanté les formes traditionnelles d’emploi indépendant en l’espace de quelques années, par exemple dans les métiers de l’enseignement (formation continue), les disciplines sportives, de loisirs, des arts et du spectacle, les services spécialisés dédiés aux entreprises (design, photographie, traduction…) ou aux particuliers (réparateurs de biens personnels et domestiques, thérapeutes…). Ce phénomène s’étend désormais à un ensemble de secteurs tels que l’hôtellerie, l’immobilier, l’édition, la restauration, les travaux à domicile, les banques, etc.

En revanche, le régime de micro-entrepreneur reste marginal au sein d’activités pour lesquelles une qualification professionnelle ou l’existence d’un capital s’impose : pharmacies, activités juridiques et comptables, transports routiers de fret…

Les mutations du monde du travail

Les nouvelles technologies et l’automatisation bouleversent les règles de l’organisation du travail. Les plateformes digitales permettent facilement de se passer d’intermédiaires et de fragmenter les tâches, ce qui déstructure l’organisation du travail. Les prestations et les relations de travail sont individualisées et la rémunération se fait à la tâche.

Aujourd’hui, en France, le salariat est encore omniprésent et concerne 9 actifs sur 10. Cette tendance est stable depuis une trentaine d’années et s’observe aussi plus largement dans l’Union européenne.

Même si 85 % des salariés français bénéficient d’un contrat à durée indéterminée, on constate toutefois une précarisation croissante et une diversification à l’intérieur du salariat. Les temps partiels contraints, contrats d’intérim et contrats courts ont explosé ces deux dernières décennies. 87 % des nouvelles embauches en France se font en CDD, contre 55 % en 1982, selon l’INSEE.

L’emploi indépendant explose à l’heure où les entreprises sont réticentes à embaucher et privilégient les missions ponctuelles. Depuis 15 ans en France, la proportion d’indépendants et d’auto-entrepreneurs a augmenté de 25 %, soit cinq fois plus que les salariés.

Le processus d’ubérisation génère des bouleversements sociétaux tant à court terme qu’à long terme. L’activité professionnelle se voit de plus en plus individualisée et morcelée (plusieurs métiers exercés en simultané, mix salariat/travail indépendant…).

Les modèles sociaux (financement, couverture), juridiques (droit du travail, statut des prestataires), fiscaux (délocalisation des plates-formes selon les opportunités d’optimisation) doivent s’adapter à cette nouvelle donne.