Introduction
L’automne 1870 plonge la France dans une crise profonde. La défaite face à la Prusse provoque la chute du Second Empire et la proclamation, le 4 septembre, de la Troisième République à Paris par Léon Gambetta et d’autres républicains. Mais la légitimité de ce nouveau gouvernement reste contestée dans certaines régions, notamment rurales et conservatrices. Entre 1870 et 1875, le régime doit affronter la poursuite de la guerre, une insurrection sanglante à Paris, des tensions entre républicains et monarchistes, tout en cherchant à définir ses institutions.
Le contexte de la guerre de 1870 et la chute du Second Empire
La guerre franco-prussienne éclate en juillet 1870, à la suite de la crise de la candidature Hohenzollern. Les défaites françaises s’enchaînent, jusqu’au désastre de Sedan (2 septembre 1870), où Napoléon III est capturé. Deux jours plus tard, à l’Hôtel de Ville de Paris, la Troisième République est proclamée.
Le Gouvernement de Défense nationale poursuit la guerre contre la Prusse, mais l’encerclement de Paris et la supériorité militaire ennemie conduisent à la capitulation de la capitale le 28 janvier 1871. L’Assemblée nationale, élue en février, à majorité monarchiste, signe le traité de Francfort (10 mai 1871), qui impose la perte de l’Alsace et de la quasi-totalité de l’actuel département de la Moselle, à l’exception de quelques cantons, ainsi que de l’arrondissement de Château-Salins (anciennement dans le département de la Meurthe), en plus d’une lourde indemnité de guerre.
À retenir
La Troisième République naît dans la défaite militaire, l’humiliation diplomatique et un climat politique dominé par les monarchistes.
La Commune de Paris et la figure de Louise Michel
L’armistice et la présence de troupes prussiennes autour de Paris nourrissent la colère populaire. La décision du gouvernement de Thiers de désarmer la Garde nationale déclenche, le 18 mars 1871, l’insurrection de la Commune de Paris.
Pendant plus de deux mois, les Communards dirigent la capitale, mettant en place des mesures sociales et démocratiques : séparation de l’Église et de l’État, école gratuite et laïque, suppression du travail de nuit pour les boulangers, réquisition des ateliers abandonnés par leurs propriétaires. Parmi les figures marquantes se trouve Louise Michel, institutrice, militante anarchiste et infatigable défenseuse des idéaux communards.
La répression est brutale : lors de la Semaine sanglante (21-28 mai 1871), les troupes gouvernementales écrasent l’insurrection, faisant des milliers de morts et entraînant l’exil ou la déportation de nombreux insurgés, dont Louise Michel envoyée en Nouvelle-Calédonie. L’échec de la Commune renforce durablement la méfiance des républicains modérés envers les mouvements ouvriers et révolutionnaires.
À retenir
La Commune de Paris symbolise la fracture entre le gouvernement et une partie du peuple, et marque durablement l’histoire sociale et politique de la République.
Les débats politiques et institutionnels (1871-1875)
Après l’écrasement de la Commune, la Troisième République reste fragile. L’Assemblée nationale, dominée par les monarchistes, envisage un retour à la royauté. Mais les divisions entre légitimistes (partisans des Bourbons) et orléanistes (partisans des Orléans) bloquent la restauration monarchique.
Pour gouverner dans l’attente d’une décision définitive, Adolphe Thiers, chef du pouvoir exécutif, consolide progressivement les institutions républicaines. Son éviction en 1873 au profit du maréchal Mac Mahon, plus conservateur, retarde l’ancrage du régime.
En 1875, un compromis institutionnel est voté : les lois constitutionnelles organisent un régime républicain avec un président, un Parlement bicaméral (Chambre des députés et Sénat) et un gouvernement responsable devant les chambres. Le mot « République » n’apparaît pas dans le texte, et l’incertitude demeure, car les monarchistes espèrent encore une restauration à court terme.
À retenir
Les lois de 1875 établissent des institutions républicaines, mais le compromis reste fragile face aux espoirs monarchistes.
Les premières étapes de l’affirmation de la démocratie parlementaire
La mise en place des institutions de 1875 marque un pas vers la démocratie parlementaire. Le président dispose de pouvoirs importants mais doit compter avec un Parlement élu, où les républicains progressent peu à peu.
Les élections législatives de 1876 donnent la majorité aux républicains à la Chambre des députés, amorçant un basculement politique. Les affrontements entre le président Mac Mahon et la majorité parlementaire débouchent sur la crise du 16 mai 1877 : Mac Mahon dissout la Chambre dans l’espoir d’une victoire monarchiste, mais les électeurs confirment la majorité républicaine. Cet épisode scelle la prééminence du Parlement sur l’exécutif.
À retenir
La crise du 16 mai 1877 confirme la victoire des républicains et l’orientation parlementaire du régime.
Conclusion
Les premières années de la Troisième République sont marquées par la guerre, l’insurrection et une forte incertitude institutionnelle. Entre 1870 et 1875, le régime survit à la défaite, à la Commune et aux divisions politiques, et pose les bases d’une République parlementaire. Mais cet équilibre reste précaire jusqu’à la victoire politique des républicains à la fin des années 1870, qui assure définitivement la stabilité du régime.
