Le récit aux XXᵉ et XXIᵉ siècles

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Dans cette leçon, tu vas découvrir comment les écrivains des XXᵉ et XXIᵉ siècles vont renouveler le récit pour représenter un monde bouleversé par la guerre, la modernité et les crises identitaires. Tu vas comprendre comment témoignages, expérimentations du Nouveau Roman et récits de soi vont servir à analyser la violence, la mémoire et la construction personnelle. Tu seras bientôt capable de repérer ces formes et de comprendre ce qu’elles révèlent de notre époque. Mots-clés : récit contemporain, XXᵉ siècle, XXIᵉ siècle, Nouveau Roman, autofiction, récits de guerre

Introduction

Au XXᵉ puis au XXIᵉ siècle, le monde connaît des bouleversements majeurs : deux guerres mondiales, la montée des totalitarismes, les progrès scientifiques et technologiques, l’urbanisation, la mondialisation, mais aussi de profonds changements dans les modes de vie et dans la manière de percevoir l’individu. Face à ces transformations, le récit évolue. Certains écrivains continuent de raconter le réel de façon traditionnelle, tandis que d’autres cherchent de nouvelles formes pour dire un monde devenu complexe, fragmenté ou incertain. Le roman se diversifie : introspection psychologique, récit engagé, écriture de l’absurde, autofiction, témoignage, expérimentations formelles.

Comment, dans cette diversité, le récit des XXᵉ et XXIᵉ siècles parvient-il à représenter l’homme et la société contemporains ?

Les récits de crise : guerre, violence et traumatisme

Les événements du XXᵉ siècle marquent profondément la littérature. La guerre, la violence politique et les expériences extrêmes deviennent des sujets centraux. Le récit se fait témoignage, mémoire ou réflexion sur le mal.

Dans À l’Ouest, rien de nouveau (1929), Erich Maria Remarque adopte le point de vue d’un jeune soldat pour montrer la brutalité de la Première Guerre mondiale. Primo Levi, dans Si c’est un homme (1947), raconte son expérience des camps nazis pour analyser la destruction de la dignité humaine. Après 1945, de nombreux récits interrogent ce que l’homme peut faire subir à l’homme, et cherchent comment dire l’indicible.

La fiction peut aussi représenter la guerre sous un angle absurde ou décalé : dans La Condition humaine (1933) de Malraux, l’action politique devient un terrain de réflexion sur la liberté et l’engagement ; dans Le Désert des Tartares (1940) de Buzzati, l’attente interminable d’un ennemi invisible devient une allégorie de l’angoisse moderne.

Ces récits, réalistes ou symboliques, posent une question centrale : comment raconter un monde marqué par la violence et la perte de repères ?

À retenir

Les récits de guerre et de catastrophe explorent la fragilité humaine. Ils mêlent témoignage, réflexion morale et interrogation sur la violence du XXᵉ siècle.

Le nouveau roman et les expérimentations formelles : raconter autrement

Au milieu du XXᵉ siècle, certains écrivains estiment que le roman traditionnel ne peut plus représenter un monde complexe, où les certitudes s’effondrent. Le Nouveau Roman remet en question les codes narratifs : intrigue linéaire, personnages stables, description classique.

Robbe-Grillet, dans La Jalousie (1957), refuse d’entrer dans la psychologie classique : il ne décrit que ce qu’un observateur pourrait voir, comme une caméra. Nathalie Sarraute, dans Enfance (1983), s’intéresse aux « tropismes », ces mouvements intérieurs presque imperceptibles. Claude Simon, dans La Route des Flandres (1960), éclate la chronologie pour montrer la confusion de la mémoire pendant la guerre.

Ces récits privilégient l’expérience du langage, le point de vue, la fragmentation. Ils ne visent pas à raconter une histoire au sens traditionnel, mais à explorer la conscience, le temps, la perception.

À retenir

Le Nouveau Roman invente de nouvelles formes pour représenter un monde instable. Le récit devient expérimental, centré sur la perception, la mémoire ou le langage.

L’autofiction et le récit de soi : raconter sa vie pour chercher la vérité

À partir des années 1970-1980, une autre tendance forte s’impose : le récit personnel. L’autofiction, terme popularisé par Serge Doubrovsky, mêle autobiographie et invention. L’auteur raconte sa vie, mais s’accorde la liberté de transformer les faits.

Annie Ernaux, dans La Place (1983) ou Les Années (2008), relie son histoire personnelle à celle de la société française, explorant la mémoire individuelle et collective. Marguerite Duras, dans L’Amant (1984), revisite son adolescence en Indochine tout en travaillant sur la voix narrative et le souvenir. Au XXIᵉ siècle, ce type de récit continue de se développer, porté par le besoin de comprendre son identité et ses origines, comme dans En finir avec Eddy Bellegueule (2014) d’Édouard Louis, qui explore domination sociale et construction de soi.

L’autofiction combine introspection, réflexion sociale et mise en scène de soi. Elle s’inscrit pleinement dans une époque qui interroge les identités et leur construction.

À retenir

Le récit de soi occupe une place essentielle aux XXᵉ et XXIᵉ siècles. Il sert à comprendre sa propre existence et à analyser la société à travers une expérience personnelle.

Conclusion

Du témoignage historique au récit expérimental, du roman de guerre à l’autofiction, le récit des XXᵉ et XXIᵉ siècles reflète la diversité et la complexité du monde contemporain. Il cherche à dire la violence, l’incertitude, la mémoire, mais aussi l’intimité et les identités multiples. En inventant de nouvelles formes ou en transformant les anciennes, les écrivains montrent que raconter reste un moyen essentiel pour comprendre l’expérience humaine et interroger notre place dans l’histoire.