La IIe République (1848-1851)

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Dans cette leçon, tu vas découvrir comment la Deuxième République (1848-1851) a tenté d’instaurer une démocratie de masse avec le suffrage universel masculin, l’abolition de l’esclavage et de nouvelles libertés. Tu verras aussi comment les divisions sociales, les journées de Juin et le coup d’État de Louis-Napoléon Bonaparte ont conduit à son effondrement. Mots-clés : Deuxième République, 1848, suffrage universel masculin, abolition de l’esclavage, journées de Juin, Louis-Napoléon Bonaparte.

Introduction

Février 1848. Paris s’embrase. Les manifestations contre le gouvernement de Louis-Philippe dégénèrent en insurrection. En quelques jours, la Monarchie de Juillet s’effondre. Sur les ruines du trône, un nouveau régime est proclamé : la Deuxième République. Portée par l’enthousiasme révolutionnaire, elle promet un souffle démocratique inédit : suffrage universel masculin, abolition de l’esclavage, libertés publiques renforcées. Mais ces espoirs se heurtent vite aux fractures politiques et sociales, et le projet républicain de 1848 s’éteint dans la crise et la répression.

Les idéaux démocratiques affirmés en 1848

Dès sa proclamation en février, la République de 1848 affiche de grands principes. Le suffrage universel masculin, décrété le 5 mars 1848, élargit le corps électoral de 240 000 électeurs sous le cens à plus de 9 millions d’hommes majeurs. Le 27 avril 1848, l’abolition définitive de l’esclavage dans les colonies françaises est décidée sous l’impulsion de Victor Schœlcher. Cette émancipation, déjà proclamée en 1794 puis rétablie en 1802, s’applique avec des variations locales : en Martinique, par exemple, elle est proclamée dès mai 1848, avant l’arrivée du décret officiel.

Les libertés publiques sont renforcées : liberté de la presse, liberté de réunion, liberté d’association. La République instaure aussi des réformes sociales : réduction de la journée de travail à 10 heures à Paris (11 heures en province), mais uniquement pour certains ateliers et ouvriers, et création des ateliers nationaux, destinés à fournir du travail aux chômeurs.

À retenir

La République de 1848 élargit le suffrage à tous les hommes majeurs, renforce les libertés et abolit définitivement l’esclavage dans les colonies.

Alphonse de Lamartine et les débats politiques des premiers mois

Poète et orateur, Alphonse de Lamartine joue un rôle essentiel dans les débuts de la République. Ministre des Affaires étrangères du gouvernement provisoire, il s’oppose fermement à l’adoption du drapeau rouge, qu’il associe à la Terreur de 1793. Grâce à son influence, le drapeau tricolore reste l’emblème de la République, symbolisant la continuité avec 1789.

Mais au-delà des symboles, les débats politiques révèlent une fracture profonde. Faut-il construire une République sociale, attentive aux revendications ouvrières, ou une République modérée, rassurant propriétaires et paysans ? Dès les premiers mois, deux camps s’opposent : les républicains socialistes, proches du mouvement ouvrier, et les républicains modérés, attachés à l’ordre et à la propriété.

À retenir

Lamartine incarne une République modérée en 1848 et s’oppose au drapeau rouge, symbole pour lui d’excès révolutionnaires.

Les tensions sociales et politiques

Rapidement, les divisions se creusent. Les conservateurs, inquiets des réformes sociales, s’allient aux républicains modérés pour contenir les socialistes. Un clivage villes-campagnes apparaît : les paysans, majoritaires, redoutent l’augmentation des impôts pour financer les ateliers nationaux, tandis que les ouvriers des villes exigent davantage de mesures sociales.

En juin 1848, la fermeture des ateliers nationaux provoque une insurrection ouvrière à Paris : les journées de Juin (23-26 juin 1848). Les combats de rue opposent ouvriers et troupes républicaines. La répression menée par le général Cavaignac est d’une extrême violence : plusieurs milliers de morts et des milliers d’arrestations. Cet épisode marque une rupture durable entre la République et le mouvement ouvrier.

À retenir

Les journées de Juin 1848, réprimées dans le sang, soulignent l’opposition irréductible entre ouvriers et républicains modérés.

L’élection de Louis-Napoléon Bonaparte

En décembre 1848 se tiennent les premières élections présidentielles au suffrage universel masculin. Louis-Napoléon Bonaparte, neveu de Napoléon Ier, remporte une victoire écrasante sur le général Cavaignac. Son nom prestigieux, associé au souvenir de l’Empire, lui assure une immense popularité. Son image de défenseur de l’ordre et de la propriété séduit les notables, tandis que les paysans – majorité du corps électoral – voient en lui un garant de stabilité.

Louis-Napoléon se présente comme un arbitre au-dessus des partis, mais ses ambitions personnelles inquiètent rapidement l’Assemblée.

À retenir

L’élection présidentielle de 1848 porte au pouvoir Louis-Napoléon Bonaparte, plébiscité par les campagnes et auréolé du prestige napoléonien.

Les causes et étapes de la fin du régime républicain

La Constitution de 1848 limite le mandat présidentiel à quatre ans, sans possibilité de réélection immédiate. Louis-Napoléon, frustré, cherche à modifier cette règle, mais se heurte à l’opposition de l’Assemblée.

Les tensions s’aggravent, notamment après la loi électorale de 1850, qui restreint le suffrage universel en imposant trois ans de résidence dans la même commune. Cette mesure exclut près de trois millions d’électeurs, surtout des ouvriers et petits propriétaires mobiles, et accentue la fracture entre le président et l’Assemblée.

Le 2 décembre 1851, Louis-Napoléon organise un coup d’État : il dissout l’Assemblée, fait arrêter ses opposants et rétablit le suffrage universel masculin pour légitimer son action par plébiscite. Un an plus tard, le 2 décembre 1852, il proclame le Second Empire et prend le titre de Napoléon III.

À retenir

L’impossibilité constitutionnelle de se faire réélire en 1852, combinée à la loi électorale de 1850 qui réduisait le suffrage, pousse Louis-Napoléon au coup d’État du 2 décembre 1851, qui met fin à la Deuxième République.

Conclusion

Née dans l’enthousiasme démocratique, la Deuxième République (1848-1851) accomplit de profondes réformes : suffrage universel masculin, abolition définitive de l’esclavage, libertés publiques renforcées. Mais les fractures sociales et politiques l’affaiblissent rapidement. La répression des journées de Juin, l’élection de Louis-Napoléon Bonaparte puis son coup d’État de 1851 referment cette brève expérience républicaine. La France bascule alors dans le Second Empire, mettant un terme à la première démocratie de masse du pays.