Introduction
Au XVIe et au XVIIe siècle, la monarchie française s’affirme comme un État centralisé et puissant. Héritière du Moyen Âge et de la guerre de Cent Ans (1337-1453), qui a renforcé l’autorité du roi sur le territoire, la France s’inscrit dans une dynamique européenne : en Espagne, l’absolutisme s’impose sous Charles Quint et Philippe II, tandis qu’en Angleterre, la « Glorieuse Révolution » de 1688 instaure une monarchie parlementaire où le roi partage le pouvoir avec le Parlement. L’originalité française est de tendre vers une centralisation monarchique de plus en plus forte, qui culmine sous Louis XIV, modèle de l’absolutisme.
Les guerres, moteur de l’affirmation monarchique
Les guerres jouent un rôle essentiel dans la construction de l’État. La victoire finale dans la guerre de Cent Ans confirme le roi comme chef et protecteur du royaume. Mais au XVIe siècle, les guerres d’Italie (1494-1559) ouvrent une nouvelle phase. Bien que coûteuses et marquées par des échecs militaires, elles favorisent la professionnalisation de l’armée, l’essor de l’artillerie et l’ouverture diplomatique (traités, alliances, rapprochement avec l’Empire ottoman sous François Ier). Elles affaiblissent cependant durablement les finances royales, préparant les difficultés budgétaires du XVIIe siècle.
Les guerres de Religion (1562-1598) mettent en péril l’autorité monarchique, opposant catholiques (famille des Guise) et protestants huguenots (soutenus par les Bourbons). Henri IV rétablit l’ordre par l’édit de Nantes (1598), qui reconnaît la liberté de culte des protestants dans certains lieux, leur ouvre l’accès aux charges publiques et leur accorde des places de sûreté. Cet édit constitue un compromis inédit en Europe, mais il reste fragile : sa révocation en 1685 par Louis XIV relance les persécutions, provoque l’exil de nombreux protestants et illustre la volonté absolutiste d’unifier le royaume sous une seule foi.
Au XVIIᵉ siècle, les guerres deviennent un instrument de prestige et de puissance. La guerre de Trente Ans (1618-1648) permet à Richelieu et Mazarin d’affirmer la puissance française face aux Habsbourg. Louis XIV engage le royaume dans de nombreux conflits pour agrandir et sécuriser les frontières. Mais ces guerres coûtent extrêmement cher, ce qui conduit à renforcer la fiscalité royale : la taille devient un impôt permanent, et de nouveaux impôts indirects (aides, gabelle, douanes) sont développés, notamment sous Colbert.
À retenir
Les guerres d’Italie, de Religion et les conflits européens du XVIIᵉ siècle affermissent l’autorité du roi et son rôle international, mais elles fragilisent les finances et imposent de nouveaux impôts.
L’extension du territoire et la consolidation de l’autorité royale
La construction de l’État passe aussi par l’unification territoriale. La Provence est léguée à Louis XI en 1481, mais son intégration administrative se fait réellement sous Charles VIII, montrant que le rattachement n’est pas immédiat. La Bretagne est un enjeu majeur : unie dynastiquement à la France par le mariage d’Anne de Bretagne avec Charles VIII puis Louis XII, son intégration définitive se fait par l’édit d’union de 1532, qui rattache légalement le duché au royaume.
Au XVIIe siècle, les guerres et les traités assurent de nouvelles annexions : l’Alsace est obtenue par le traité de Westphalie (1648), et la Franche-Comté par le traité de Nimègue (1678). Ces acquisitions participent à l’idée des « frontières naturelles » du royaume.
Le roi renforce en parallèle son autorité sur les provinces. Les gouverneurs et intendants y imposent son pouvoir au détriment des grandes familles nobiliaires. À Versailles, construit par Louis XIV, la noblesse est domestiquée : les courtisans doivent se soumettre à une étiquette stricte et briguent des charges honorifiques, ce qui réduit leur pouvoir politique.
À retenir
L’intégration progressive de la Bretagne, de la Provence et de provinces conquises au XVIIe siècle illustre l’unification du territoire. Versailles symbolise le contrôle de la noblesse par l’État royal.
La centralisation administrative et judiciaire
La centralisation s’exprime aussi par des réformes administratives. L’ordonnance de Villers-Cotterêts (1539), promulguée par François Ier, impose le français dans les actes officiels, unifie la langue administrative et impose la tenue des registres paroissiaux, préfigurant l’état civil. Elle étend aussi la compétence de la justice royale, réduisant l’autonomie des justices seigneuriales.
Ces mesures s’inscrivent dans un mouvement plus large. La monarchie renforce son administration par la création d’offices (charges publiques achetées), qui deviennent une source de revenus pour l’État, et par le rôle croissant des parlements comme relais de la législation royale, bien qu’ils s’opposent parfois au pouvoir. Les intendants, apparus sous Richelieu et Mazarin, sont systématisés par Louis XIV. Agents du roi, ils supervisent finances, police et justice en province, incarnant l’autorité directe de la monarchie.
Sous Louis XIV, la centralisation prend la forme de l’absolutisme, justifié par la théorie du droit divin : le roi gouverne au nom de Dieu et concentre tous les pouvoirs. Toutefois, cette autorité connaît des limites : les parlements contestent certaines décisions, des révoltes fiscales éclatent, et la Fronde (1648-1653), soulèvement de la noblesse et du Parlement de Paris, montre que l’absolutisme n’est pas acquis sans résistances.
À retenir
L’ordonnance de Villers-Cotterêts illustre la centralisation de l’État. Les intendants et la fiscalité renforcent le contrôle du roi, mais des résistances subsistent, révélant les limites de l’absolutisme.
Conclusion
Du XVe au XVIIe siècle, la monarchie française devient un État centralisé qui culmine dans l’absolutisme de Louis XIV. Les guerres, de l’Italie à la guerre de Trente Ans, affirment la puissance royale tout en pesant sur les finances, entraînant la création de nouveaux impôts. Le territoire s’unifie avec l’intégration progressive de provinces comme la Provence, la Bretagne, l’Alsace et la Franche-Comté.
Les réformes administratives, notamment l’ordonnance de Villers-Cotterêts et l’usage des intendants, renforcent la justice et l’administration royales. Versailles et l’étiquette symbolisent la domestication de la noblesse. Mais malgré cette centralisation, des résistances persistent, montrant que l’absolutisme reste une construction fragile, propre à la France, et distincte des modèles espagnol et anglais.
