Introduction
Bien qu’il ne représente qu’une infime fraction de l’atmosphère, l’ozone stratosphérique joue un rôle vital pour la biosphère. Situé entre 15 et 35 km d’altitude, il constitue une couche protectrice qui limite l’exposition des êtres vivants aux rayonnements ultraviolets (UV), particulièrement dangereux.
Comprendre ce phénomène, c’est explorer les interactions entre chimie atmosphérique et rayonnement solaire, mais aussi saisir la fragilité des équilibres dynamiques qui régissent notre atmosphère, et la manière dont les activités humaines peuvent les perturber — ou les réparer.
Un gaz rare mais stratégique
L’ozone (O₃) est une molécule triatomique d’oxygène. Il est présent dans la stratosphère en concentration très faible, de l’ordre de 8 à 10 parties par million en volume (ppmv), selon l’altitude. Malgré cette rareté, il forme, avec le dioxygène (O₂), un filtre naturel contre les rayons UV.
Les rayonnements UV sont classés selon leur énergie décroissante :
UV-C (100–280 nm) : les plus énergétiques, entièrement absorbés par l’atmosphère ;
UV-B (280–315 nm) : partiellement absorbés ;
UV-A (315–400 nm) : faiblement absorbés, atteignent presque totalement la surface.
Le dioxygène absorbe une grande part des UV-C, via la dissociation des molécules d’O₂. L’ozone, lui, absorbe les UV-B les plus énergétiques et une part résiduelle des UV-C. Cette absorption repose sur le principe selon lequel une molécule interagit avec un photon dont l’énergie correspond à un de ses niveaux d’excitation, ce qui provoque la dissociation de l’ozone et une conversion de l’énergie lumineuse en chaleur.
À retenir
L’ozone et le dioxygène stratosphériques absorbent ensemble les UV-C et une partie des UV-B. L’ozone joue un rôle majeur en bloquant les UV-B les plus dangereux pour le vivant.
Le cycle de Chapman : équilibre de formation et de destruction
L’ozone est produit et détruit en permanence dans la stratosphère selon un cycle photochimique connu sous le nom de cycle de Chapman. Ce cycle comprend quatre étapes principales :
Les UV-C dissocient les molécules de dioxygène :
Les atomes d’oxygène réagissent avec des molécules de dioxygène :
L’ozone peut être dissocié par les UV-B :
L’atome d’oxygène ainsi libéré peut régénérer de l’ozone.
Ces réactions forment un équilibre dynamique entre formation et destruction, assurant une concentration relativement stable d’ozone. Ce système permet d’absorber efficacement une part significative des UV-B les plus énergétiques et de bloquer entièrement les UV-C.
À retenir
Le cycle de Chapman maintient un équilibre entre production et destruction de l’ozone. Il permet de filtrer les UV-B et UV-C grâce à l’absorption combinée par le dioxygène et l’ozone.
Une barrière indispensable pour le vivant
Les UV-B et UV-C sont les plus biologiquement actifs : ils causent des lésions de l’ADN, augmentent les risques de cancers cutanés, provoquent des cataractes et nuisent à la photosynthèse du phytoplancton, menaçant les chaînes alimentaires marines.
En absorbant ces rayonnements, la couche d’ozone forme une barrière protectrice. Ce n’est qu’après l’établissement d’une concentration suffisante d’ozone dans la stratosphère que les organismes vivants ont pu coloniser les terres, jusque-là exposées à une radiation trop intense.
À retenir
L’ozone stratosphérique limite l’exposition aux UV-B les plus nocifs. Il a rendu possible le développement de la vie terrestre en protégeant les écosystèmes émergents.
Les CFC : une menace pour l’ozone
Au XXe siècle, l’usage massif de chlorofluorocarbures (CFC) dans les réfrigérants et les aérosols a menacé l’équilibre de la couche d’ozone. Ces molécules, stables dans la troposphère, atteignent la stratosphère, où elles sont dissociées par les UV, libérant des atomes de chlore.
Ceux-ci participent à un cycle catalytique destructeur :
Le chlore joue un rôle de catalyseur, non consommé dans la réaction, ce qui lui permet de détruire plusieurs dizaines de milliers de molécules d’ozone avant d’être neutralisé.
Le phénomène est aggravé en Antarctique, où le vortex polaire stratosphérique formé en hiver confine l’air froid. Les nuages stratosphériques polaires qui s’y forment favorisent la libération de chlore réactif à partir des composés issus des CFC. Au retour du Soleil, les UV déclenchent une destruction rapide et massive de l’ozone : c’est le trou dans la couche d’ozone.
Le protocole de Montréal (1987) a interdit les substances responsables. Depuis, la concentration de CFC diminue et la couche d’ozone montre des signes de reconstitution.
À retenir
Les CFC libèrent du chlore qui détruit catalytiquement l’ozone. Le vortex polaire antarctique favorise cette destruction. Le protocole de Montréal a permis de réduire les CFC et de préserver la couche d’ozone.
Conclusion
L’ozone stratosphérique est un filtre solaire indispensable, formé par un équilibre délicat de réactions photochimiques. Grâce à l’action combinée du dioxygène et de l’ozone, les UV-C sont totalement arrêtés et les UV-B fortement atténués, garantissant la protection du vivant.
Son altération par les CFC a illustré à quel point notre atmosphère peut être vulnérable à l’impact des activités humaines. Mais la mobilisation internationale a montré qu’il est possible de restaurer un équilibre climatique essentiel lorsque les connaissances scientifiques sont traduites en décisions collectives efficaces. L’histoire de l’ozone est ainsi une leçon d’alerte autant que d’espoir.
