Introduction
La reconstitution de l’histoire géologique de la Terre repose sur l’étude des différents phénomènes qui ont façonné notre planète au cours des âges. Pour parvenir à une reconstitution précise, les géologues doivent croiser plusieurs approches et méthodes. Parmi celles-ci, la chronologie absolue et la chronologie relative sont essentielles. La première permet de dater précisément les événements et les roches, tandis que la deuxième repose sur des principes de superposition et de corrélation des couches géologiques. L'objectif est de créer une échelle du temps géologique en intégrant les informations apportées par ces différentes méthodes.
Les compétences visées dans cette leçon sont la compréhension des principes de base de la chronologie absolue et relative, l’apprentissage des méthodes utilisées pour croiser ces approches, ainsi que la capacité à analyser des données géologiques pour reconstituer l’histoire d’une région ou d’un objet géologique.
Les bases de la chronologie relative
La chronologie relative repose sur des principes qui permettent de reconstituer l’ordre des événements géologiques sans déterminer leur âge exact. Cela repose principalement sur l’observation des relations géométriques entre les couches géologiques et des associations de fossiles.
Le principe de superposition
Le principe de superposition stipule que, dans une séquence de couches sédimentaires non perturbées, la couche la plus profonde est la plus ancienne et la couche située au-dessus est la plus récente. Ce principe permet de déterminer l'ordre relatif des événements géologiques, en particulier dans les environnements où les roches sont exposées à l'érosion ou à des coupes géologiques.
Le principe de recoupement
Le principe de recoupement stipule que si une structure géologique (par exemple une faille ou un intrus magmatique) coupe d’autres couches géologiques, elle est nécessairement plus jeune que ces dernières. Cela permet d’établir un cadre chronologique en observant la manière dont les différentes structures géologiques interagissent. En d’autres termes, toute couche ou structure géologique qui traverse d’autres unités géologiques doit être plus récente que celles qu’elle traverse.
Le principe d’inclusion
Le principe d’inclusion repose sur l’observation qu’un fragment de roche inclus dans une autre est plus ancien que la roche qui l’entoure. Cela permet de déterminer des relations de temporalité entre les différentes unités géologiques.
À retenir
La chronologie relative repose sur des principes comme la superposition, le recoupement et l'inclusion, qui permettent de déterminer l'ordre des événements géologiques.
Ces principes sont fondamentaux pour organiser les couches géologiques dans une séquence chronologique.
Les bases de la chronologie absolue
La chronologie absolue, quant à elle, permet de dater précisément les événements géologiques grâce à des méthodes basées sur la radioactivité. La datation radiométrique et l’utilisation des isotopes cosmogéniques jouent un rôle essentiel pour obtenir des dates précises pour les roches, les fossiles et même des échantillons exposés récemment à la surface de la Terre.
La datation radiométrique
La datation radiométrique repose sur la mesure de la désintégration des isotopes radioactifs présents dans les minéraux. Par exemple, l'uranium-238 se désintègre en plomb-206 à une vitesse constante, et en mesurant la quantité d'uranium et de plomb, les géologues peuvent déterminer l’âge exact de la roche. Cette méthode est particulièrement utile pour dater les roches magmatiques et métamorphiques.
Les isotopes cosmogéniques
Les isotopes cosmogéniques sont des isotopes produits par l’interaction des rayonnements cosmiques avec les atomes de la surface de la Terre. Les rayonnements cosmiques sont des particules énergétiques provenant de l’espace qui frappent l’atmosphère terrestre et génèrent des particules secondaires comme des neutrons et des protons. Ces particules secondaires peuvent ensuite interagir avec les atomes présents dans les roches ou les sols exposés en surface, générant des isotopes cosmogéniques, tels que le béryllium-10 ou le C-14.
Les isotopes cosmogéniques se forment donc en surface, là où les rayonnements cosmiques frappent directement les roches, les sols ou même les éléments organiques exposés. Par exemple, le béryllium-10 se forme dans les roches lorsqu'elles sont exposées aux rayonnements cosmiques, et une fois formé, il est piégé dans les minéraux de la roche. Lorsque cette roche est recouverte ou enfouie, l’exposition aux rayonnements cosmiques cesse et la concentration en isotopes cosmogéniques commence à décroître.
En mesurant la concentration d'isotopes cosmogéniques, les géologues peuvent ainsi dater précisément le moment où la roche ou le sol a été exposé pour la dernière fois à la surface, comme lors des glaciations ou après des événements géologiques majeurs qui ont mis à nu la roche.
Exemple d'application
Un exemple concret d'utilisation des isotopes cosmogéniques est la datation des roches érodées ou des moraines laissées par un glacier. Lorsqu’un glacier recouvre une roche, cette dernière cesse d’être exposée aux rayonnements cosmiques. En mesurant la concentration de béryllium-10 dans les roches qui ont été mises à nu par le retrait d’un glacier, on peut déterminer quand le glacier a fondu, et ainsi dater le retrait du glacier.
À retenir
Les isotopes cosmogéniques se forment à la surface de la Terre lorsqu'ils sont frappés par les rayonnements cosmiques.
Ces isotopes permettent de dater des événements récents, comme le retrait d’un glacier ou d’autres événements qui exposent des roches en surface.
La datation des fossiles et des couches sédimentaires
Bien que la chronologie absolue soit généralement appliquée aux roches, elle peut aussi être utilisée pour dater des fossiles et des couches sédimentaires associées, en particulier grâce à l’utilisation de la datation par C-14 (carbone 14). Le C-14 permet de dater des échantillons organiques comme les fossiles, les ossements, les coquilles et le bois, mais ne s’applique pas directement aux roches sédimentaires non organiques. Toutefois, si une couche sédimentaire contient des fossiles ou des matières organiques, il est possible d’utiliser le C-14 pour dater ces éléments organiques et en déduire l’âge des couches environnantes.
À retenir
Le C-14 est utilisé pour dater des fossiles et des échantillons organiques présents dans des couches sédimentaires, mais ne peut pas être utilisé directement pour dater des roches sédimentaires non organiques.
Limites de la chronologie absolue
Malgré ses avantages, la chronologie absolue présente certaines limitations. Tout d'abord, la précision de la méthode dépend de la qualité des échantillons. La présence de contamination ou la perte d'éléments peut fausser les résultats. De plus, la datation des roches très anciennes, supérieures à 50 millions d’années, peut devenir plus complexe. Cela ne vient pas seulement de la quantité d'isotopes restants, mais aussi des processus géologiques ayant affecté les roches au fil du temps.
L’altération et le rééquilibrage chimique
Les roches, notamment les plus anciennes, peuvent subir des altérations au cours de leur histoire. Ces altérations peuvent être physiques (comme l’érosion) ou chimiques (comme le métamorphisme), affectant leur composition chimique et minéralogique. Par exemple, sous l’effet de la chaleur et de la pression, des roches peuvent subir un rééquilibrage chimique ou un métamorphisme, où de nouveaux minéraux se forment et où les éléments chimiques se redistribuent. Cela peut perturber la répartition des isotopes radioactifs et rendre la datation plus difficile.
La fermeture du système
La fermeture du système fait référence au moment où un minéral ou une roche devient isolé de son environnement extérieur, empêchant les éléments chimiques, comme l'uranium ou le potassium, de pénétrer ou de s’échapper du système. Cela signifie que, pour que la datation soit fiable, il faut que l'échantillon soit resté "scellé" depuis la formation du minéral. Toute perturbation après cette fermeture, comme un changement de température ou une altération chimique, peut altérer les résultats de la datation.
À retenir
La précision de la chronologie absolue peut être affectée par la contamination et la perte d’éléments.
Les processus géologiques comme l’altération chimique, le métamorphisme et le rééquilibrage chimique peuvent perturber la datation des roches.
La fermeture du système désigne le moment où les éléments chimiques d’un échantillon sont piégés et ne peuvent plus être modifiés par l’environnement extérieur.
Conclusion
La reconstitution de l’histoire géologique de la Terre repose sur la croisée des approches de la chronologie relative et absolue. En combinant les principes de superposition, de recoupement et d’inclusion avec les méthodes de datation précises basées sur la radioactivité et les isotopes cosmogéniques, les géologues parviennent à établir une échelle du temps géologique cohérente et détaillée. Cette méthode croisée est essentielle pour comprendre les grands processus géologiques qui ont façonné notre planète et pour dater précisément les événements marquants de son évolution.
