Introduction
Partout dans le monde, les sociétés sont confrontées à des risques naturels, technologiques et climatiques qui menacent leur sécurité et leur développement. Séismes, tempêtes, marées noires ou accidents industriels rappellent la fragilité de nos milieux de vie. Avec le changement climatique, ces phénomènes se multiplient et s’intensifient.
En 2023, par exemple, les incendies géants qui ont ravagé le Canada ont affecté l’ensemble de l’Amérique du Nord et altéré la qualité de l’air jusqu’à l’Atlantique Nord. Ces événements extrêmes montrent combien les milieux et les sociétés sont désormais interdépendants à l’échelle planétaire.
Les sociétés face à la montée des risques
Un aléa est un phénomène naturel (séisme, inondation, éruption volcanique) ou technologique (explosion, pollution, accident industriel) potentiellement dangereux. Le risque naît de la combinaison entre cet aléa et la vulnérabilité d’une société, c’est-à-dire sa fragilité face au danger : précarité du logement, urbanisation informelle, absence d’alerte, pauvreté. On peut donc résumer : risque = aléa × vulnérabilité.
Les risques naturels deviennent catastrophiques lorsqu’ils frappent des sociétés mal préparées. Les plaines inondables, par exemple, sont souvent occupées par des zones urbaines et agricoles denses, comme le delta du Nil (Égypte) ou la vallée du Gange (Inde). En 2022, le Pakistan a subi des inondations historiques touchant plus de 30 millions de personnes. Ces drames résultent autant de causes naturelles (moussons intenses) que de facteurs humains : urbanisation rapide, déforestation et artificialisation des sols (transformation d’espaces naturels en surfaces imperméables).
Les risques technologiques et industriels sont tout aussi redoutables. L’explosion du réacteur nucléaire de Tchernobyl (Ukraine, 1986) ou celle de Fukushima (Japon, 2011) ont montré qu’une société hautement développée pouvait être vulnérable. En France, la catastrophe d’AZF à Toulouse (2001), explosion chimique majeure dans une usine de nitrates d’ammonium, a tué 31 personnes et blessé plusieurs milliers d’autres. En 2019, l’incendie de l’usine Lubrizol à Rouen a provoqué un vaste nuage toxique et soulevé des inquiétudes sur la sécurité des sites industriels.
Les choix d’aménagement aggravent souvent les risques : construction en zones inondables, destruction des forêts, extension des villes sur les littoraux. Ces décisions traduisent une recherche de profit ou de confort immédiat au détriment de la sécurité à long terme.
Le changement climatique accentue ces déséquilibres. Selon le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), la température moyenne mondiale a augmenté d’environ 1,2 °C depuis 1850, et le niveau des mers s’élève d’environ 3,3 mm par an. Ces évolutions provoquent des cyclones plus puissants, des sécheresses prolongées et une fonte accélérée des glaciers. Les mégapoles côtières comme Jakarta (Indonésie), Miami (États-Unis) ou Shanghai (Chine) sont particulièrement menacées. À l’horizon 2050, près de 570 millions de personnes pourraient vivre dans des zones littorales régulièrement inondées.
À retenir
Un aléa est un phénomène dangereux ; le risque résulte de la rencontre entre cet aléa et la vulnérabilité humaine. Le changement climatique, l’urbanisation non maîtrisée et la pauvreté accentuent les catastrophes, surtout dans les territoires mal préparés.
Des milieux fragiles entre exploitation et adaptation : l’exemple de l’Arctique
L’Arctique, qui s’étend autour du pôle Nord, illustre la fragilité des milieux face au réchauffement climatique. Il regroupe huit États membres du Conseil de l’Arctique : les États-Unis, le Canada, le Danemark (via le Groenland), la Norvège, l’Islande, la Russie, la Suède et la Finlande. Ces deux derniers appartiennent à la région arctique sans accès maritime direct à l’océan Arctique. Le Conseil de l’Arctique, créé en 1996, favorise la coopération scientifique et environnementale entre ces pays et les organisations autochtones, mais il ne dispose d’aucun pouvoir contraignant.
Le réchauffement y est deux à trois fois plus rapide que la moyenne mondiale. Les glaciers fondent, la banquise se réduit et les équilibres écologiques sont bouleversés. Ces transformations affectent directement les populations locales, notamment les Inuits du Groenland et du Canada, dont le mode de vie traditionnel est menacé.
La fonte des glaces ouvre cependant de nouvelles routes maritimes entre l’Europe et l’Asie, ainsi qu’un accès à des ressources énergétiques et minières considérables, attisant les rivalités entre États riverains.
Face à ces menaces, les réponses restent limitées : création de zones protégées, promotion d’un écotourisme raisonné (tourisme respectueux des milieux naturels et des cultures locales) ou restrictions du trafic maritime. Ces initiatives illustrent la tension entre exploitation économique et préservation environnementale.
À retenir
L’Arctique concentre les effets du réchauffement climatique : fonte des glaces, bouleversements écologiques et rivalités pour les ressources. Les États coopèrent sans réelle contrainte juridique, ce qui rend l’adaptation fragile.
Des adaptations contrastées : des Alpes au Sahel et à l’Asie du Sud-Est
Les Alpes, massif partagé entre la France, la Suisse, l’Italie, l’Autriche et la Slovénie, sont un espace densément peuplé et très touristique. Elles cumulent plusieurs risques : avalanches, glissements de terrain, crues torrentielles et fonte du permafrost (sol gelé en permanence dont la fonte déstabilise les montagnes). Entre 2000 et 2023, les glaciers alpins ont perdu 35 % de leur volume, soit environ 60 km³ de glace. Cette fonte fragilise les pentes et réduit les ressources en eau pour l’agriculture et l’hydroélectricité.
Les sociétés alpines distinguent deux stratégies principales :
La prévention, fondée sur la planification (cartes des zones à risque, interdiction de construire, sensibilisation des habitants).
La protection, qui repose sur des infrastructures spécifiques : galeries pare-avalanches, merlons (buttes de terre), filets de protection ou digues de retenue.
Certaines stations comme Chamonix (France) ou Zermatt (Suisse) développent un tourisme « quatre saisons », tandis que les autorités encouragent une économie plus diversifiée et durable. Dans les pays riches, la résilience (capacité d’un territoire à se relever après une catastrophe) repose aussi sur des systèmes d’assurance et d’indemnisation : le régime CatNat (catastrophes naturelles) en France ou la FEMA (Federal Emergency Management Agency/Agence fédérale de gestion des urgences) aux États-Unis.
En Asie du Sud-Est, les grandes métropoles côtières comme Bangkok (Thaïlande), Hô Chi Minh-Ville (Vietnam) et Manille (Philippines) sont exposées à la montée du niveau de la mer et aux typhons. En 2011, les inondations de Bangkok ont recouvert un tiers de la ville, causant la mort de plus de 800 personnes et des milliards de dollars de pertes. En 2013, le typhon Haiyan a dévasté le centre des Philippines. L’urbanisation rapide de ces métropoles accroît la vulnérabilité : les populations pauvres s’installent dans des quartiers informels souvent situés en zones inondables. Pour s’adapter, les États ont lancé des digues mobiles à Bangkok, la replantation de mangroves aux Philippines et au Vietnam, ou encore des logements sur pilotis.
Dans le Sahel (zone semi-aride s’étendant du Sénégal au Soudan), les sociétés affrontent d’autres menaces : sécheresses, désertification et crises alimentaires. Ces risques sont liés à la hausse des températures, au surpâturage et à la pression démographique. Le projet panafricain de la Grande Muraille verte, visant à replanter des millions d’arbres, symbolise une tentative d’adaptation régionale.
Enfin, dans les zones très densément peuplées mais non littorales, comme Mexico (Mexique) ou Tokyo (Japon), les sociétés affrontent des risques sismiques et hydrologiques. Tokyo dispose d’un système d’alerte ultra-perfectionné et de bâtiments antisismiques, tandis que Mexico, construite sur un ancien lac, subit régulièrement des affaissements de terrain et des inondations.
À retenir
Les Alpes, le Sahel, l’Asie du Sud-Est et les grandes métropoles comme Mexico ou Tokyo illustrent la diversité des risques et des réponses. La résilience dépend des moyens économiques, de la gouvernance, de la coopération et des systèmes d’assurance.
Conclusion
Les sociétés humaines font face à des risques croissants, amplifiés par le changement climatique, la pression démographique et des choix d’aménagement parfois dangereux. Qu’il s’agisse de l’Arctique, des Alpes ou du Sahel, les adaptations reposent sur la prévention, la protection, l’éducation et la coopération internationale. Selon le GIEC, la trajectoire actuelle pourrait conduire à un réchauffement supérieur à 2,5 °C d’ici 2100, avec une montée moyenne du niveau des mers d’environ 50 cm, selon les scénarios climatiques les plus pessimistes (RCP/SSP élevés). Prévenir, s’adapter et transformer nos modèles de développement sont donc des priorités pour bâtir un monde plus sûr et plus durable.
