Les frises du Parthénon depuis le XIXe siècle

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Des pays anciennement colonisés réclament la restitution de leur patrimoine culturel « pillé » par les puissances occupantes. Le cas des frises du Parthénon est révélateur de ces conflits patrimoniaux ­devenus géopolitiques.

I) Les frises du Parthénon : de l’Acropole au ­British Museum

1)  La frise des Panathénées

Lors des guerres médiques, qui opposent les Grecs aux Perses au Ve siècle av. J.‑C., la cité d’Athènes est en partie détruite. Périclès décide de la rebâtir. Il fait construire le temple du Parthénon sur ­l’Acropole (447-438 av. J.-C.).

La frise intérieure du Parthénon mesure 160 mètres de long sur 1 mètre de hauteur et représente 360 personnages et 220 animaux. 80 % de ses statues survivent aux intempéries et aux aléas historiques jusqu’au XIXe siècle.

Info

La frise (ou les frises) du Parthénon relate la fête des Panathénées, procession civique qui se déroulait à Athènes dans l’Antiquité en l’honneur d’Athéna.

2)  Les Britanniques s’emparent d’une partie des frises

Au XIXe siècle, la Grèce est sous domination ottomane. En 1801, le comte ­d’Elgin, ambassadeur britannique à Constantinople, obtient du sultan l’auto­risation d’emporter des sculptures de l’Acropole qu’il s’approprie et achemine à Londres. Entreposées sur un terrain humide, elles souffrent des intempéries.

En 1816, le gouvernement britannique achète les 120 tonnes de matériaux prélevés à Athènes et dans toute la Grèce pour la moitié des sommes engagées par Elgin. Les marbres sont transférés au British Museum.

En 1940, pendant le Blitz, la frise du Parthénon est déplacée à l’abri dans les tunnels du métro de Londres. Après la guerre, elle réintègre le British Museum dans une galerie spécialement conçue pour elle.

II) Des frises au cœur de tensions géopolitiques

1)  Un trésor national pour la Grèce

La moitié de la frise est conservée à Londres et un tiers se trouve encore à Athènes. Le reste est disséminé dans différents musées européens dont le Louvre. Dès son indépendance en 1822, la Grèce essaie de faire revenir les frises sur son sol. Entre 1834 et 1842, le roi Othon Ier tente de les racheter, en vain.

En 1982, la ministre grecque de la Culture, l’actrice Mélina Mercouri, réclame la restitution des frises lors d’une conférence de l’Unesco. Depuis la chute de la dictature militaire en 1974, ces marbres sont en effet devenus un symbole du prestige antique du pays mais aussi du retour de la démocratie.

La Grèce argue que la frise est un trésor national, un élément directement sculpté sur le Parthénon. La Grèce n’a jamais donné son accord pour son déplacement.

2)  Une question insoluble

Pour le gouvernement britannique, les marbres ont été acquis légalement. Le ­British Museum a reproché à la Grèce de ne pas disposer d’édifice sécurisé et adapté pour accueillir la frise, et à Athènes d’être une ville trop polluée pour sa conservation.

Pourtant, les traces de suie datant de l’ère industrielle britannique sont encore présentes sur quelques marbres et, depuis juin 2009, Athènes a inauguré un nouveau musée moderne face à l’Acropole. 30 % de la frise y sont exposés.

3)  Une question internationale

L’Unesco soutient officiellement la Grèce. L’Acropole et tous ses monuments sont inscrits au patrimoine mondial depuis 1987.

Les tensions diplomatiques se sont ravivées lors des Jeux olympiques d’Athènes en 2000 et plus récemment depuis l’annonce du Brexit. Le gouvernement grec a demandé, en vain, une restitution de la frise à la Commission européenne.

Le débat de la propriété patrimoniale est relancé : si les marbres revenaient à la Grèce, ceci créerait un précédent juridique et tous les musées occidentaux pourraient voir leurs collections coloniales repartir dans leurs pays d’origine.