Introduction
La cohésion économique, sociale et territoriale constitue un principe fondamental de l’Union européenne (UE), inscrit dans les traités européens et renforcé par le traité de Lisbonne, entré en vigueur en 2009. Son objectif est de réduire les disparités de développement entre les régions européennes afin de promouvoir un aménagement harmonieux et équilibré de l’ensemble du territoire de l’Union. Cette leçon examine les enjeux, les dynamiques et les acteurs impliqués dans la mise en œuvre de cette politique, à partir d’exemples précis et récents.
Contexte géographique et enjeux de la cohésion
Définition et objectifs
La cohésion économique, sociale et territoriale désigne l’ensemble des politiques menées par l’Union européenne visant à corriger les déséquilibres régionaux et à favoriser une croissance inclusive et durable. Son ambition est d'assurer à tous les citoyens européens un accès équitable aux opportunités économiques et sociales, indépendamment du territoire où ils résident. Elle s'appuie ainsi sur les principes de solidarité et de justice spatiale.
Enjeux géographiques
Les disparités régionales au sein de l’Union européenne sont importantes et persistent malgré plusieurs décennies d’efforts. Elles concernent notamment :
Le niveau de richesse (PIB par habitant) ;
L’accès à l'emploi et aux services essentiels (éducation, santé, transport) ;
Les infrastructures, notamment de communication et de transport ainsi que l'accès aux technologies numériques.
Ces écarts sont particulièrement marqués entre les régions métropolitaines les plus dynamiques (comme l’Île-de-France, la Lombardie ou la Rhénanie-du-Nord-Westphalie) et les régions périphériques ou rurales (comme certaines régions d’Europe orientale, du sud de l’Italie ou de la péninsule ibérique). À ces fractures s’ajoutent des défis particuliers liés aux territoires ultramarins, souvent confrontés à l’éloignement et à l'insularité.
Acteurs et mécanismes de la politique de cohésion
Les acteurs institutionnels
La politique de cohésion implique de nombreux acteurs :
La Commission européenne, qui élabore, pilote et contrôle les politiques et programmes de cohésion ;
Les États membres, responsables de la mise en œuvre nationale et locale des projets ;
Les collectivités territoriales, bénéficiaires des fonds et actrices clés des projets locaux ;
Le Parlement européen, qui participe à l'élaboration du cadre budgétaire et des priorités stratégiques de la cohésion.
Les principaux instruments financiers
La politique de cohésion européenne s'appuie principalement sur trois fonds structurels et d’investissement :
Le FEDER (Fonds européen de développement régional), orienté vers le financement d’infrastructures et l’innovation économique ;
Le FSE+ (Fonds social européen Plus), qui cible l’emploi, l’éducation, l'inclusion sociale et la lutte contre la pauvreté ;
Le Fonds de cohésion, réservé aux États membres dont le revenu national brut par habitant est inférieur à 90 % de la moyenne européenne et destiné à financer des projets d’infrastructures dans les transports et l'environnement.
Bilan et limites de la politique de cohésion depuis le traité de Lisbonne
Des réussites tangibles mais inégales
Depuis le traité de Lisbonne, la politique de cohésion a permis de réduire certaines disparités, notamment en Europe centrale et orientale grâce à l’amélioration significative des infrastructures de transport et à l’intégration économique croissante de ces régions. Par exemple, les investissements massifs financés par l’UE en Pologne ou en République tchèque ont contribué à renforcer leur compétitivité économique et à accélérer leur convergence avec la moyenne européenne.
Toutefois, les résultats demeurent contrastés. Des régions méditerranéennes (sud de l’Italie, Grèce, certaines régions espagnoles ou portugaises) connaissent toujours des taux de chômage élevés et des difficultés persistantes en matière d'infrastructures et d’accès aux services publics essentiels. De même, les territoires ultramarins rencontrent des défis spécifiques difficiles à surmonter malgré un soutien financier accru.
Limites et critiques
La politique de cohésion européenne fait également face à plusieurs critiques :
Complexité administrative et lourdeur bureaucratique ralentissant parfois la mise en œuvre concrète des projets ;
Inégalités dans l’attribution et l’utilisation des fonds, certains États membres parvenant à mieux capter les ressources disponibles que d'autres ;
Difficulté à mesurer précisément les résultats obtenus, notamment sur le plan social et territorial où les progrès sont souvent lents à se concrétiser.
Les nouveaux défis et perspectives depuis 2020
Adaptation aux nouvelles priorités
Depuis le début des années 2020, la politique de cohésion s’est adaptée aux nouvelles priorités stratégiques européennes définies par la Commission (transition écologique, numérique et résilience économique post-Covid). L'Union a ainsi intégré des critères environnementaux plus stricts dans l’attribution des fonds, exigeant par exemple une part minimale de dépenses destinées à la transition écologique ou à l’innovation numérique.
La réponse à la crise sanitaire du Covid-19
La pandémie de Covid-19 a profondément modifié le contexte européen. En réponse, l’Union européenne a mis en place le plan exceptionnel NextGenerationEU, doté d’un budget massif (750 milliards d’euros, dont une partie substantielle sous forme de subventions). Ce dispositif s’articule étroitement avec la politique de cohésion, visant à accélérer la reprise économique, soutenir les régions les plus fragiles et renforcer la résilience à long terme de tous les territoires européens.
Conclusion
La politique de cohésion économique, sociale et territoriale constitue un levier majeur de l'intégration européenne et du développement régional. Si elle a permis des progrès importants dans certaines régions, notamment en Europe centrale et orientale, les disparités persistent à des degrés divers, nécessitant une adaptation continue des instruments et des stratégies européennes. L’évolution récente vers une politique de cohésion davantage tournée vers les défis écologiques, numériques et sanitaires témoigne de la volonté de l’UE de répondre efficacement aux enjeux contemporains tout en maintenant les principes de solidarité et de justice territoriale au cœur de son projet.