La modalisation

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La modalisation est étroitement liée au processus d’énonciation. Elle se traduit par des modalités qui manifestent l’attitude de l’énonciateur envers son destinataire et son énoncé.

1 - Les modalités d’énonciation et les modalités d’énoncé

A. Les modalités d’énonciation

Elles manifestent l’attitude de l’énonciateur dans son rapport au destinataire. Elles se traduisent par les types de phrases : déclaratif, interrogatif, injonctif, qui servent à accomplir des actes de langage ayant des effets sur la relation au destinataire : affirmer quelque chose (asserter), interroger, donner un ordre. On distingue les actes de langage directs et indirects.

Si l’acte de langage est direct, le type de phrase est employé pour accomplir l’acte auquel il est associé par convention : Quelle heure est-il à Papeete ?

Si l’acte de langage est indirect, le type de phrase est employé pour accomplir un autre acte que celui auquel il est associé par convention. Une phrase déclarative peut correspondre à un ordre : J’ai faim. (= « Donnez-moi quelque chose à manger ») ou à une question : Je cherche la sortie. (= « Où est la sortie ? ») Une phrase interrogative peut être une affirmation déguisée : Cette canicule est-elle normale ? (= « Cette canicule n’est pas normale »).

B. Les modalités d’énoncé

Elles traduisent le point de vue de l’énonciateur sur son énoncé. Elles sont les indices de la subjectivité dans le discours.

Cette subjectivité de l’énonciateur peut s’exercer sur le plan :
affectif, lorsqu’il exprime un sentiment : J’avais perdu mon compagnon, mon camarade, mon ami, mon bon et cher Capi que j’aimais tant. (H. Malot) ;
évaluatif, lorsqu’il émet un commentaire ou un jugement. L’évaluation se fait en termes de bon / mauvais ou selon la vérité (vrai / faux / incertain) : Il n’y avait eu aucun mauvais temps dangereux sur la mer d’Islande. (P. Loti) ; Il serait plus vrai de dire que nous étions dans ce salon comme dans le wagon d’un train express. (J. Verne).

2 - Les outils de la modalisation des énoncés

A. Les choix lexicaux

Beaucoup de mots ont une valeur affective ou évaluative :
– noms simples possédant des synonymes qui permettent de jouer sur le niveau de langue : voiture, auto, bagnole (bagnole est marqué par rapport à voiture et auto, neutres) ; noms dérivés par adjonction d’un suffixe péjoratif : ferraille, chauffard... ; noms subjectifs : l’amour, la crainte, la beauté... (l’amour de la patrie, la crainte de la pollution) ;

– adjectifs ayant un contenu affectif : drôle, effrayant... ou évaluatif : grand, petit, certain, douteux... au comparatif ou au superlatif (plus petit, le moins grand...) ;

– verbes exprimant un sentiment : détester, adorer, haïr... ; une opinion : penser, croire... ; une perception : sentir, sembler, paraitre... ; une volonté : vouloir, souhaiter, espérer...
L’incertitude de nos voies nous tourmenta toutes nos vies. Que te dirais-je ? Tout choix est effrayant, quand on y songe ; effrayante une liberté que ne guide plus un devoir. C’est une route à élire dans un pays de toutes parts inconnu... (A. Gide)

– auxiliaires modaux comme pouvoir (idée de possibilité), devoir (idée d’obligation) ;

– adverbes et locutions adverbiales : peut-être, certainement, assurément, probablement... ;

– interjections : Hélas ! où sont maintenant nos pauvres enfants ? (C. Perrault)

B. Le choix du temps des verbes

L’énonciateur peut exprimer son point de vue sur l’énoncé en choisissant le temps du verbe. Les temps de l’indicatif ont une valeur modale, principalement le futur et le conditionnel : Il neigera demain. (c’est probable) / Il neigerait demain. (c’est possible, mais pas certain).

C. L’intonation à l’oral, la ponctuation à l’écrit

L’intonation peut manifester l’attitude de l’énonciateur par rapport à ce qu’il dit.

À l’écrit, la ponctuation exprime aussi la modalité : l’expression d’un sentiment par le point d’exclamation, la distance par les guillemets... Il m’a suffi de vous voir et ç’a été le coup de foudre ! Depuis huit jours je m’attache à vos pas ! (G. Feydeau)

La typographie des SMS est souvent expressive : majuscules, répétitions de lettres (ROOOO) ou de ponctuation (!!!???), etc.

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Je m'entraine

Relevez et analysez les termes qui expriment les modalités d’énoncé.

Faouhm, détachant ses yeux des dormeurs, examina ceux qui ressentaient plus amèrement la défaite que la lassitude. Beaucoup témoignaient de la belle structure des Oulhamr. C’étaient de lourds visages, des crânes bas, des mâchoires violentes. Leur peau était fauve, non noire ; presque tous produisaient des torses et des membres velus. La subtilité de leurs sens s’étendait à l’odorat, qui luttait avec celui des bêtes. Ils avaient des yeux grands, souvent féroces, parfois hagards, dont la beauté se révélait vive chez les enfants et chez quelques jeunes filles. Les tribus paléolithiques vivaient dans une atmosphère profonde ; leur chair recelait une jeunesse qui ne reviendra plus, fleur d’une vie dont nous imaginons imparfaitement l’énergie et la véhémence. (J.-H. Rosny Aîné, La Guerre du feu © Hachette Jeunesse)