La commune nouvelle

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La question de l’amplitude du morcellement municipal remonte à la période de la création des municipalités le 12 novembre 1789 (44 000), sous la Révolution française. Aussi, dès l’été 1790, l’Assemblée révolutionnaire met-elle en place une législation facilitant la fusion des municipalités.

1 - Historique

La rationalisation de la carte communale a toujours été une préoccupation du législateur, au point que tous les gouvernements qui succéderont à l’Assemblée constituante de 1789, du Consulat à la VIe République en passant par la monarchie de Juillet et le Second Empire, proposent des réformes visant à la fusion ou au regroupement de communes.

Au XXe siècle, la loi du 16 juillet 1971 sur les fusions de communes et regroupements de communes, dite « loi Marcellin », fut-elle aussi une tentative, sans grand succès, de relance de la rationalisation de la carte communale par fusion de communes.

Au XXIe siècle, deux lois réaffirment et promulguent la possibilité de création des communes nouvelles :

la loi du 16 décembre 2010 de Réforme des collectivités territoriales (RCT), dans son article 21, abroge le statut de l’association de communes pour lui substituer celui de la commune nouvelle s’appuyant notamment sur le périmètre des intercommunalités que les communes ont développées ;

la loi du 16 mars 2015 relative à l’amélioration du régime de la commune nouvelle, pour des communes fortes et vivantes. Cette dernière loi est venue améliorer le régime de la commune nouvelle créée par la loi du 16 décembre 2010 et instaure un « pacte de stabilité » de la dotation globale de fonctionnement (DGF) pour toute commune nouvelle créée au plus tard le 1er janvier 2016 [exonération de la baisse de la DGF ; maintien des dotations de solidarité perçues par les « anciennes » communes (DSU, DSR, DNP)].

2 - La commune nouvelle

A. Définition

La création de la commune nouvelle a pour objectif de proposer une formule rénovée « de regroupement » aux communes, qui aboutit à la création d’une commune nouvelle.

Dans le cadre de cette formule rénovée, la commune nouvelle est issue de l’unification en une seule commune de plusieurs communes jusqu’alors distinctes. Ce processus est donc une fusion des communes en une seule – la commune nouvelle, qui se substitue aux communes précédentes.

B. Enjeux

L’enjeu principal de la commune nouvelle est d’apporter une solution à l’émiettement communal en mutualisant les moyens et les institutions tout en diminuant le nombre des « anciennes » communes.

C. Création

La création d’une commune nouvelle peut :

– résulter d’une demande de tous les conseils municipaux des communes de la future commune nouvelle. C’est alors un véritable « projet de territoire » ayant des incidences fortes tant sur les territoires que sur les élus en place dont l’accord unanime est obligatoire. Cette procédure de création présente l’avantage de la rapidité (seule une délibération de chaque commune est nécessaire, sans nouvelle consultation de ces dernières par la suite ni référendum à organiser) ;

– émaner de la demande d’une majorité qualifiée, les deux tiers au moins des conseils municipaux des communes membres d’un même établissement public de coopération intercommunal (EPCI) et représentant plus des deux tiers de la population totale de ces dernières ;

– émaner directement de l’organe délibérant de l’EPCI si la création de la commune nouvelle se substitue à l’ensemble des communes membres ; 

-- être créée à l’initiative du représentant de l’État dans le département.

D. Le statut de la commune nouvelle

La commune nouvelle est une collectivité territoriale soumise, sous réserve de quelques règles spécifiques, aux règles applicables aux communes. Elle dispose donc d’un organe exécutif : le maire, et d’un organe délibérant : le conseil municipal.

La loi prévoit également la possibilité d’instaurer des communes déléguées correspondant aux anciennes communes, reprenant leur nom et leurs limites territoriales mais ne disposant pas de la personnalité morale.

E. Les conséquences de la création

Vis-à-vis des communes ayant fusionné : la commune nouvelle est substituée aux communes pour toutes les délibérations et les actes ; pour l’ensemble des biens, droits et obligations ; dans les syndicats dont les communes étaient membres. Tous les personnels municipaux sont rattachés à la commune nouvelle.

Devenir des « anciennes » communes : les communes deviennent des communes déléguées, sauf décision contraire du conseil municipal de la commune nouvelle dans un délai de six mois à compter de sa création.

En cas de mise en place de communes déléguées, chacune dispose :
– d’un maire délégué et éventuellement d’un ou plusieurs adjoints, désignés par le conseil municipal de la commune nouvelle, parmi ses membres ;

– d’une annexe de la mairie dans laquelle sont établis les actes d’état civil concernant les habitants de la commune déléguée.

Sur décision du conseil municipal de la commune nouvelle, à la majorité des deux tiers de ses membres, un conseil de la commune déléguée, dont les membres sont désignés parmi ceux du conseil municipal de la commune nouvelle, peut être créé dans tout ou partie des communes déléguées.

Les communes déléguées

  • Le rôle du maire délégué. Il est officier d’état civil et officier de police judiciaire (comme le maire de la commune nouvelle). Il rend un avis sur les décisions d’urbanisme, permissions de voirie, projets d’acquisition, d’aliénation d’immeubles, (...) réalisés par la commune nouvelle.
  • Le rôle du conseil de la commune déléguée. Il délibère sur l’implantation et le programme d’aménagement des équipements de proximité (écoles, social, culturel, sportif...) qu’il gère. Il se peut, à la demande de la commune nouvelle, gérer un équipement ou un service. Il est consulté notamment sur le montant des subventions aux associations et le PLU et toute opération d’aménagement.
  • Chaque année, la commune déléguée reçoit des dotations (allouées librement) réparties par le conseil de la commune nouvelle : dotation d’investissement ; dotation d’animation locale ; dotation de gestion locale. Un état spécial, annexé au budget de la commune nouvelle, retrace les dépenses et recettes de chaque commune déléguée.

F. Les ressources de la commune nouvelle

La commune nouvelle bénéficie de la fiscalité communale et des incitations financières du « pacte de stabilité » prévu dans la loi du 16 mars 2015. Celui-ci garantit, pour les communes mises en place au 1er janvier 2016 au plus tard, le gel des dotations de l’État. Ces avantages ont représenté en 2017 une DGF supplémentaire de 34,70 M€ pour les communes nouvelles.

Comme en 2018, la loi de finances pour 2019 reconduit le pacte de stabilité financière pour les communes nouvelles qui seront créées entre le 2 janvier 2019 et le 1er janvier 2021.

3 - Le développement de la commune nouvelle

Entre le 1er janvier 2012 et le 1er janvier 2015, seules 25 communes nouvelles ont été créées, entraînant la disparition de 70 communes.

Mais avec la loi du 16 mars 2015 relative à l’amélioration du régime de 8 la commune nouvelle, la dynamique s’est amplifiée, notamment grâce au pacte financier qui garantit pendant trois ans le niveau des dotations de l’État, mais aussi grâce à la souplesse du dispositif. À l’exception de la Corse et des collectivités d’outre-mer, toutes les régions ont enregistré sur leur territoire la création d’au moins une commune nouvelle.

Cependant, deux régions concentrent à elles seules plus de 50 % des communes fondatrices : la Normandie (36,5 %) et les Pays de la Loire (15,5 %).

Dans ces deux régions, quatre départements concentrent près de 30 % des communes nouvelles de la période 2015-2016 : le Calvados, l’Eure, le Maine-et-Loire et la Manche.

Et les quatre départements qui ont réduit le plus le nombre de leurs communes sont le Maine-et-Loire (– 48 %), le Calvados (– 24 %), la Manche (– 21 %) et l’Orne (– 20 %).

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En 2018, le mouvement de création de communes nouvelles est reparti à la hausse puisqu’un peu plus de 200 communes nouvelles (233 exactement) ont vu le jour le 1er janvier 2019. Depuis 2015, la France compte ainsi, au 1er janvier 2019, plus de 800 communes nouvelles.

Les communes nouvelles ainsi créées devraient être les dernières du mandat 2014-2020 puisque, selon l’article 7 de la loi du 11 décembre 1990 organisant la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux, « il ne peut être procédé à aucun redécoupage des circonscriptions électorales dans l’année précédant l’échéance normale de renouvellement des assemblées concernées ».

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Fusion de communes et regroupement de communes

Les expressions «fusion de communes» et «regroupement de communes » ne doivent surtout pas être confondues ou considérées comme synonymes.

La « fusion de communes » est la réunion de plusieurs communes distinctes en une seule et unique commune – la commune nouvelle, au statut de collectivité territoriale. Dans ce cas, cette commune nouvelle se voit attribuée sa propre identité (nom, domicile, code postal, patrimoine, personnalité juridique...). Les anciennes communes subsistent sous forme de communes déléguées, reprenant leur nom et leurs limites territoriales mais sans disposer de la personnalité morale puisqu’elles ne sont plus des collectivités territoriales (les communes déléguées ont des compétences proches de celles des arrondissements municipaux).

Exemple : Dans le département de l’Ain (01), les communes de Cormaranche-en-Bugey – Hauteville-Lompnes – Hostiaz – Thézillieu ont fusionné et donné création à la commune nouvelle de Plateau d’Hauteville, code postal 01185.

Le « regroupement de communes » s’est développé dans le cadre de la coopération intercommunale pour répondre à deux objectifs très différents :

– la gestion commune de certains services publics locaux (ramassage des ordures ménagères, transports urbains...) ou la réalisation d’équipements locaux, de manière à mieux répartir les coûts et à profiter d’économies d’échelle (syndicat).

– la conduite collective de projets de développement local (communautés).

Néanmoins, quel que soit l’objectif retenu, le « regroupement de communes » aboutit dans les deux cas à la création d’une structure administrative – l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI). Par ailleurs, aucune des communes membres ne disparaît au profit de l’EPCI ni ne perd son statut de collectivité territoriale. En revanche, des transferts de compétences des communes vers l’EPCI peuvent avoir lieu selon l’objectif de création retenu.

Exemple : Dans le département de la Marne (51), la communauté urbaine du Grand Reims regroupe 143 communes de 47 à 188 000 habitants.