L’influence de l’Europe sur les collectivités territoriales

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La France est membre de deux organisations européennes : l’Union européenne et le Conseil de l’Europe. Dans le cadre de l’Union européenne, suite aux élections européennes de mai 2019, et tant que le Brexit n’aura pas eu lieu, 751 parlementaires européens (dont 79 représentants de la France) siégeront à Strasbourg, au Parlement européen, à partir du 2 juillet 2019.

Impact de l’Union européenne sur les collectivités territoriales

La politique de l’Union européenne tend à renforcer les régions en développant des fonds structurels définis dans le cadre d’une approche régionale. Par ailleurs, elle contribue à complexifier certains domaines d’action des collectivités territoriales par une approche des services publics différente de la conception française.

Développement d’une politique régionale

L’Union européenne s’engage auprès des États membres en développant une politique d’aide aux régions. Elle a institué trois grands axes d’intervention :

  • la politique de cohésion économique, sociale et territoriale vise à réduire les disparités entre les régions de l’Union européenne. Elle soutient le développement de l’innovation dans les entreprises, les jeunes en difficultés d’orientation professionnelle… Cette politique est financée par le Fonds européen de développement régional (FEDER), le Fonds social européen (FSE), le Fonds de cohésion pour les États en grandes difficultés économiques ;
  • la politique de développement des territoires ruraux a pour objectif d’accompagner et d’harmoniser les mutations de la campagne européenne. Cette politique est financée par le Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) ;
  • la politique commune de la pêche entend développer la pêche et l’aquaculture tout en préservant la ressource et la biodiversité marine. Le Fonds européen pour la pêche (FEP) finance cette politique.

Ces politiques, pluriannuelles (2014-2020), ont un impact important sur les collectivités territoriales françaises. Les fonds européens peuvent permettre la réalisation de projets locaux. Les régions souhaitent un renforcement de leur rôle en développant un partenariat tripartite entre la Commission européenne, l’État français et les régions. Ces contrats tripartites fixeraient les domaines prioritaires pour bénéficier de l’aide de la prochaine génération de fonds européens.

Les communes hésitent parfois à s’engager dans des demandes de fonds européens. La procédure leur semble lourde, longue et complexe.

Inquiétude des élus locaux face aux services d’intérêt général (SIG)

Alors qu’en France, la notion de service public est liée à celle de l’intérêt général, la conception de l’Union européenne diffère. En fait, il existe un certain flou au niveau européen qui rend la situation complexe. Une distinction est opérée entre les services d’intérêt général (SIG) et les services non économiques d’intérêt général (SNEIG). Ainsi, les activités liées à l’exercice de prérogatives de puissance publique (armée, justice…) sont des SNEIG qui échappent aux règles de la concurrence. Les SIG recouvrent les services d’intérêt économique général (SIEG) et sont, en principe, soumis au droit de la concurrence. Les collectivités territoriales sont tenues de respecter la réglementation européenne relative au financement des services d’intérêt général.

La question des services sociaux d’intérêt général (SSIG) est importante pour les collectivités territoriales. Or, la qualification juridique des SSIG est posée et a d’importantes répercussions en termes d’application ou non des règles relatives à la concurrence. La Commission européenne distingue deux types de SSIG qui sont assimilables à des SIEG :

  • les régimes légaux et les régimes complémentaires de protection sociale couvrant les risques fondamentaux de la vie (santé, vieillesse, accidents du travail, chômage, retraite, handicap) ;​
  • les autres services essentiels rendus directement à la personne (aides au logement social, aux personnes, à l’insertion sur le marché du travail, à l’inclusion sociale).

Face à la complexité de la situation, la Commission européenne a voulu clarifier les choses au travers d’une réforme, nommée le « paquet Almunia » (du nom du commissaire espagnol, Joaquin Almunia, en charge de la concurrence).

La réforme du « paquet Almunia » a été adoptée fin décembre 2011 par la Commission européenne. Les concepts sont précisés et les modalités d’encadrement du financement public des missions d’intérêt général sont modifiées. Désormais, les financements publics des soins de santé et des services sociaux essentiels sont exemptés de l’obligation de notification au titre du contrôle des aides d’État.

Les règles de financement public des services sociaux ont été assouplies.

Le Conseil de l’Europe et la Charte de l’autonomie locale

Ouverte à la signature des États membres dès 1985, la Charte de l’autonomie locale a été signée par la France. L’Acte II de la décentralisation et la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales ont permis une mise en conformité de la France avec les prescriptions de la Charte de l’autonomie locale et ont conduit à la loi du 8 juillet 2006 autorisant l’approbation de la Charte européenne de l’autonomie locale. La France a ratifié la Charte le 17 janvier 2007 (entrée en vigueur le 1 mai 2007). Au 1er janvier 2014, tous les États membres du Conseil de l’Europe ont ratifié la Charte (Monaco et Saint-Marin en 2013). La France entend ratifier le protocole additionnel à la Charte européenne de l’autonomie locale sur le droit de participer aux affaires des collectivités locales (signé le 16 novembre 2009, en attente de ratification).

L’autonomie locale au sens de la Charte européenne

La Charte de l’autonomie locale pose l’exigence d’un fondement constitutionnel et légal de l’autonomie locale. Elle est définie comme « le droit et la capacité effective pour les collectivités de régler et de gérer, dans le cadre de la loi, sous leur propre responsabilité et au profit de leurs populations, une part importante des affaires publiques ».

Au sens de la Charte, la portée de l’autonomie locale implique différentes conséquences :

  • les compétences de base des collectivités locales sont fixées par la Constitution ou par la loi. Toutefois, cette disposition n’empêche pas l’attribution aux collectivités locales de compétences à des fins spécifiques, conformément à la loi ;
  • les collectivités locales ont, dans le cadre de la loi, toute latitude pour exercer leur initiative pour toute question qui n’est pas exclue de leur compétence ou attribuée à une autre autorité ;
  • l’exercice des responsabilités publiques doit, de façon générale, incomber, de préférence, aux autorités les plus proches des citoyens. L’attribution d’une responsabilité à une autre autorité doit tenir compte de l’ampleur et de la nature de la tâche et des exigences d’efficacité et d’économie ;
  • les compétences confiées aux collectivités locales doivent être normalement pleines et entières. Elles ne peuvent être mises en cause ou limitées par une autre autorité, centrale ou régionale, que dans le cadre de la loi ;
  • en cas de délégation des pouvoirs par une autorité centrale ou régionale, les collectivités locales doivent jouir, autant qu’il est possible, de la liberté d’adapter leur exercice aux conditions locales ;
  • les collectivités locales doivent être consultées, autant qu’il est possible, en temps utile et de façon appropriée, au cours des processus de planification et de décisions pour toutes les questions qui les concernent directement.

Les ressources financières des collectivités locales selon la Charte européenne

L’article 8 de la Charte pose les principes relatifs aux ressources financières des collectivités locales :

  • les collectivités locales ont droit, dans le cadre de la politique économique nationale, à des ressources propres suffisantes dont elles peuvent disposer librement dans l’exercice de leurs compétences ;
  • les ressources financières des collectivités locales doivent être proportionnées aux compétences prévues par la Constitution ou la loi ;
  • une partie au moins des ressources financières des collectivités locales doit provenir de redevances et d’impôts locaux dont elles ont le pouvoir de fixer le taux, dans les limites de la loi ;
  • les systèmes financiers sur lesquels reposent les ressources dont disposent les collectivités locales doivent être de nature suffisamment diversifiée et évolutive pour leur permettre de suivre, autant que possible dans la pratique, l’évolution réelle des coûts de l’exercice de leurs compétences ;
  • la protection des collectivités locales financièrement plus faibles appelle la mise en place de procédures de péréquation financière ou des mesures équivalentes destinées à corriger les effets de la répartition inégale des sources potentielles de financement ainsi que des charges qui leur incombent. De telles procédures ou mesures ne doivent pas réduire la liberté d’option des collectivités locales dans leur propre domaine de responsabilité ;
  • les collectivités locales doivent être consultées, d’une manière appropriée, sur les modalités de l’attribution à celles-ci des ressources redistribuées ;
  • dans la mesure du possible, les subventions accordées aux collectivités locales ne doivent pas être destinées au financement de projets spécifiques. L’octroi de subventions ne doit pas porter atteinte à la liberté fondamentale de la politique des collectivités locales dans leur propre domaine de compétence ;
  • afin de financer leurs dépenses d’investissement, les collectivités locales doivent avoir accès, conformément à la loi, au marché national des capitaux.

Surfez sur Internet

www.europa.eu
(Site Internet de l’Union européenne)

www.coe.int
(Site Internet du Conseil de l’Europe).