Communiquer avec l’enfant

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Les erreurs de comportement ou de jugement commises par les adultes auprès des enfants sont des sources de mal-être invisible, non exprimé clairement et non conscientisé à l’âge adulte. Leurs conséquences modifient le comportement des individus de manière durable en influençant leurs « stratégies » futures. Elles sont d’autant plus préjudiciables si elles sont répétées quotidiennement, admises comme normales et sans volonté de maltraiter l’enfant. Leur source est avant tout l’ignorance : beaucoup d’adultes surestiment les capacités des enfants et font des erreurs d’interprétation qui faussent leur appréciation d’une situation vécue avec eux.​

Éviter les stéréotypes 

Le regard de l’enfant sur l’adulte

Pour l’enfant, ce que dit l’adulte est important et vrai. Dans son désir d’apprendre et d’être aimé, l’enfant se conforme inconsciemment à ce que dit l’adulte. Il est capable de comprendre ce qu’il attend de lui ou ce qu’il croit qu’il attend de lui.

L’enfant vit dans la dépendance des adultes qui lui permettent de « survivre » physiquement et affectivement. La confiance que l’enfant leur accorde leur confère un pouvoir dont ils peuvent abuser sans s’en rendre compte. Cette situation met l’enfant dans une soif de comprendre les règles de l’adulte, d’être vigilant sur ce que celui-ci attend de lui.

Les adultes qui accueillent les enfants au quotidien doivent être conscients du poids de leurs jugements et de leurs mots. Dire à un enfant qu’il est « terrible » est le moyen le plus sûr de le voir devenir indiscipliné. Mettre des « étiquettes » sur sa timidité, son lien familial (« c’est le frère de... »), sa faiblesse dans une matière apprise à l’école l’enferme dans une case. Le professionnel est, sans cesse, vigilant à ne pas avoir ce type d’intention en tête qui fausse ses rapports avec l’enfant.​

Important :

Si vous dites à un enfant qu’il est « gentil » ou « méchant », vous ne lui donnez pas une règle à suivre. Vous lui proposez de continuer à tester ce que cela veut dire jusqu’à ce que vous perdiez vous-même le contrôle. En maternelle, les enfants n’ont pas la conscience morale des adultes.

Ils vont l’acquérir pleinement et l’expérimenter vers la fin de leur année de grande section et à l’école élémentaire.

Le rôle de l’adulte face à l’enfant

Les adultes qui travaillent avec les enfants doivent se méfier d’eux-mêmes, de leur éducation, du langage qu’ils emploient.​Ils doivent s’empêcher d’émettre des jugements rapides et non fondés sur la personne de l’enfant ou sur sa famille. L’enfant n’est pas « méchant » parce qu’il a pris le jouet de son camarade.

Important :
C’est toujours l’acte qui doit être évalué par rapport à la règle édictée par les adultes de l’école : vous ne dites pas « tu es méchant », vous lui signifiez la règle : « tu ne peux pas prendre ce jouet ». Dans un conflit entre enfants, chacun est consolé par l’ATSEM ou par l’enseignant.

L’ATSEM prend ses responsabilités devant toutes sortes de situations difficiles en lien avec les comportements des enfants, la stratégie des adultes, parfois la pauvreté des moyens. Il doit être exemplaire devant les enfants afin de respecter les règles qu’il leur demande de suivre.

Un adulte manquant de maturité, « jouant à l’enfant », est vite débordé par les capa- cités d’adaptation rapide des enfants au comportement de l’adulte. Un agent qui n’a pas sa place dans l’école va vite vivre de grandes difficultés et être en souffrance du point de vue personnel.

La connaissance favorise la bienveillance et la compréhension. Les attitudes et gestes professionnels sont à développer. C’est en comprenant mieux les besoins de l’enfant que l’adulte peut y répondre et se rapprocher de comportements appropriés et efficaces en classe et durant les temps périscolaires.​

La juste distance

Les enfants sont souvent affectueux et généreux : il faut leur montrer de l’affection et de l’attention, sans les piéger dans une relation de dépendance. Certains enfants sont perdus dès que l’ATSEM est absent. Cette situation peut donner beaucoup de plaisir à l’ATSEM, mais cette attitude n’est pas juste pour eux.

Les ATSEM aiment les enfants et le disent, mais ils doivent trouver la juste distance de manière à ne pas laisser planer d’ambiguïté quant à leur rôle au sein de la classe : ils ne doivent pas entrer en compétition affective avec les parents, l’enseignant ou tout autre professionnel de l’école.

Important :

Passer le concours n’est que le début d’un travail qui doit se faire au fur et à mesure des expériences interpersonnelles avec les enfants et les enseignants. Retenir qu’il faut montrer l’exemple est un bon début d’apprentissage.

Socialiser les enfants

Leur apprendre les règles

L’école maternelle est un lieu de socialisation. Pour survivre, l’être humain doit être accepté par sa communauté. Pour faire partie d’un groupe, il doit en apprendre les codes.

Exemple : 
L’enfant qui entre à l’école maternelle va apprendre les règles lui permettant de prendre sa place dans la classe, de communiquer avec les autres et de devenir un écolier apte à apprendre et à participer à tous les rituels du quotidien.

Les plus petits sentent instinctivement qu’ils ont quelque chose à comprendre : ils font répéter la règle jusqu’à ce qu’ils la comprennent, quitte à répéter un acte répréhensible aux yeux des adultes ; comportement qui sera décodé par l’adulte comme un acte de rébellion contre son autorité...
En réalité, les enfants ont du mal à se souvenir d’une règle et à l’appliquer dans des situations différentes : ils scrutent intensément l’adulte qui explique ou fait une démonstration, ils imitent et sont curieux.

Quel que soit l’acte de l’enfant de maternelle, l’ATSEM doit rappeler calmement la règle de l’école en premier et garder le contrôle de ses paroles et de son comporte- ment. La violence verbale ou physique est exclue dans ce métier.

Quand les enfants grandissent, ils finissent par comprendre qu’enfreindre la règle a des conséquences. Ils n’aiment pas plus que les adultes subir l’autorité. Il est possible qu’ils aient une sanction.​

La différence entre une sanction et une punition 

La sanction

La sanction est connue de l’enfant. Elle peut faire partie d’un code inscrit dans les règles de vie de l’école.

Exemple : 

Si un enfant s’agite à table, il devra passer le reste du repas à côté d’un adulte pour se calmer. La sanction permet de réparer la « bêtise » qu’il a faite. 

La sanction est réparatrice, jamais humiliante. Elle ne porte pas atteinte à l’intégrité physique et affective de l’enfant. La sanction est éducative, elle doit être discutée en équipe par les enseignants, les animateurs ou les ATSEM.

La punition

Au contraire, la punition induit un sentiment de faute ou de culpabilité. Il s’agit le plus souvent de réprimandes incontrôlées assénées par des adultes qui s’énervent et usent de leur pouvoir individuel. La punition surprend l’enfant. Pendant long- temps, il ne fait pas le rapprochement entre son erreur et la cause de la punition.

Adapter son langage

Faire face au « caprice »

Les capacités des enfants

Garder le contrôle de soi est sans doute l’épreuve la plus difficile pour l’adulte. Les adultes s’énervent car ils ont souvent l’impression que les enfants se moquent d’eux. Ils expriment ainsi leur colère. Les enfants de l’école élémentaire ont la capacité de provoquer l’adulte, mais cette capacité n’existe pas chez les plus petits, avant 4 ou 5 ans.

L’adulte est capable de stratégie, pas les petits enfants. Dire d’un nouveau-né qu’il est « capricieux » ou « assez malin » pour se faire prendre dans les bras de sa mère ne correspond pas à une réalité, ni à une capacité physiologique du cerveau.
À force d’expériences, l’adulte est capable de modifier sa parole ou son comportement pour satisfaire un désir, obtenir quelque chose de l’autre. L’enfant n’en a ni la capacité physique, ni l’expérimentation.

Les pleurs des enfants

Les enfants, dès la naissance, évacuent leur stress par les pleurs. Ce stress est autant physiologique que psychologique. Il s’agit vraiment d’un besoin de détendre les nerfs et la musculature. Plus tard, l’enfant accumule des tensions nerveuses tout au long de la journée. Puis, au détour d’une demande refusée, il perd le contrôle de lui-même et devient inconsolable.

Beaucoup d’adultes crient et punissent alors qu’il leur faudrait seulement reconnaître la fatigue et la colère et les verbaliser. Ces situations arrivent à l’école, elles doivent donc être maîtrisées par les adultes car elles mobilisent leur énergie.
L’enfant qui en agresse un autre est aussi déboussolé que celui qui pleure. Il doit se sentir soutenu, même si l’adulte lui rappelle qu’il a fait quelque chose qui n’est pas autorisé. Il sent d’instinct que c’est grave, mais ne sait pas pourquoi.

Comment gérer ces situations ?

Il est plus efficace :

  • de permettre à l’enfant de s’isoler au calme, voire de se reposer ;
  • de verbaliser sa détresse, son émotion, ce qui est une façon de la reconnaître : « je vois que tu es en colère, je te laisse le temps de reprendre le contrôle et de te calmer... » ;
  • de ne pas céder à la demande qui, de toute façon, n’est pas l’objet des pleurs ;
  • de détourner l’attention en proposant une autre activité.

Adapter sa communication

Les professionnels expérimentés de la petite enfance apprennent à remanier leur langage au fil du temps. Ils évitent les paroles blessantes sur les parents et les jugements hâtifs. Leurs conseils laissent la place à la parole du parent. Les enfants ne gagnent pas en sécurité si la communication entre les parents et les professionnels révèlent des conflits permanents. Le langage doit être bienveillant, reflet de l’accueil qui est fait aux enfants.

Le comportement des enfants

Les enfants qui sont petits n’ont pas assez de mots pour s’exprimer, c’est la main qui tape pour dire ce qui ne va pas. De manière générale, la pauvreté du vocabulaire est source de violence à tout âge.
En maternelle, les comportements sont liés à des stratégies instinctives, exploratoires, affectives, mais pas à la volonté de nuire à autrui. De plus, jusqu’à l’âge de 4 ou 5 ans, les enfants ne comprennent pas les ordres collectifs.

Important :

N’oubliez pas que ce que l’enfant ne sait pas dire avec les mots s’exprime alors avec son corps : il s’agite, ne parle plus, ne veut pas manger, refuse de faire la sieste, fait pipi sur lui... Un enfant qui est « difficile » exprime son mal-être à des adultes qui ne voient pas toujours ses difficultés et n’ont pas toujours les moyens de l’aider à les résoudre.

Le comportement des adultes

Si l’ATSEM appelle un enfant qui est absorbé dans son jeu, ce dernier n’entend pas (il ne s’agit pas de désobéissance), d’autant plus que l’ordre est donné d’une position éloignée. Pour être compris et entendu, l’adulte porte son regard au niveau de celui de l’enfant pour lui parler. La communication est individuelle et non collective.

Une parole rassurante est aussi une parole qui ne déstabilise pas l’enfant vis-à-vis de ses parents. Le professionnel averti s’empêche de penser qu’il est plus apte qu’eux à éduquer. Il ne considère pas les parents comme désinvestis de l’éducation de leurs enfants.

Ce qu’il faut éviter

La violence verbale est à exclure : crier après un enfant, le harceler, perdre son contrôle ne le fait pas avancer, ni psychiquement ni intellectuellement.
Lorsqu’un adulte ne se contrôle plus et qu’il est lui-même pris par sa colère, il doit pouvoir compter sur les autres professionnels qui le relaient et protègent les enfants.​

Mener les enfants vers la « vraie » autonomie

Laisser les enfants apprendre

L’enfant sent inconsciemment que ses parents n’ont pas vraiment envie de voir grandir leur tout-petit. L’enfant est fidèle à ses parents. Si le parent « interdit » (inconsciemment) de grandir, il attend l’autorisation : il parle « bébé » à 5 ans, ne mange pas seul, ne se lave pas seul, n’est pas encore propre...
Certains professionnels ont peur que l’enfant fasse une bêtise en se servant tout seul leur gobelet d’eau, par exemple. Ils les servent pour aller plus vite. Ces comportements ne permettent pas à l’enfant d’expérimenter une action. Or, les enfants ont besoin de beaucoup s’entraîner avant de réussir un geste.

Les accompagner

Le professionnel qui mène les enfants vers le plaisir de réussir seuls doit tenir compte de leurs capacités réelles. L’enfant sait ce qu’il est capable de faire avec son corps et avec ses mains, non l’adulte.
Lorsque l’adulte décide à sa place, il propose une « fausse autonomie ». L’enfant doit se débrouiller tout seul pour raison de service ou d’organisation collective...

Exemple :

Les ATSEM apprennent aux enfants à se servir de leur fourchette et de leur couteau à table. Les enfants de moins de 3 ans ont beaucoup de mal à piquer les aliments avec leur fourchette et ne coupent pas leur viande. Les mener vers l’autonomie est leur laisser le choix de l’ustensile qu’ils vont utiliser en fonction du plat présenté.

Leur laisser la fourchette pour manger des petits pois n’est pas très adapté à cet âge : ils doivent avoir la possibilité d’utiliser leur petite cuillère.

Demander aux enfants de marcher quand ils ne sont pas prêts ou les solliciter pour qu’ils urinent dans un pot plutôt que dans des couches relève d’une autonomie imposée et non efficace.

Exprimer ses émotions

Le mode de langage de l’adulte favorise l’incompréhension entre lui et les enfants : il n’a pas été habitué (lui non plus) à exprimer son émotion. Elle est rarement évoquée. Les adultes ne savent pas dire à l’enfant leurs peurs, leurs colères ou leurs déceptions... ni même leurs envies.​

Exemple :

Un enfant qui tombe du toboggan de l’école entend l’adulte lui dire « qu’il fallait qu’il fasse attention » ou « qu’il est trop petit pour grimper », mais il n’entend pas « j’ai eu peur pour toi, mais je vois que tu n’as rien ».

Les peurs de l’adulte qui ne sont pas exprimées ralentissent l’enfant dans sa progression. Les adultes ne savent pas toujours faire dire aux enfants ce qu’ils ressentent.

Exemple :

Si vous demandez à un tout-petit « pourquoi il pleure ? » ou « pourquoi il refuse de faire du tricycle ? », vous avez peu de chance d’avoir une réponse qu’il ne connaît pas lui-même. Il serait plus efficace de dire à l’enfant que vous voyez que « cette journée est difficile pour lui » ou que vous devinez « qu’il ne va pas bien, et que vous pouvez l’aider ». Vous reconnaissez ce qu’il ressent, c’est aidant.