Qu’est-ce que la méthode de Singapour, qui va transformer l’enseignement des maths en primaire ?
Cette méthode consiste à apprendre les mathématiques d’abord à l’aide d’objets et de mises en situation réelles, avant de progresser vers l’abstrait. Elle devrait être adoptée progressivement dès septembre prochain.
Suite aux résultats du rapport Pisa 2022, qui signalait une baisse du niveau des élèves en français et mathématiques, le ministre Gabriel Attal a dévoilé au début du mois le plan « Choc des savoirs ». Celui-ci a pour objectif le renforcement des savoirs fondamentaux. Parmi les mesures prévues, l’adoption progressive de la méthode de Singapour, réputée pour son efficacité dans l’apprentissage des mathématiques.
SOMMAIRE
- Qu’est-ce que la méthode de Singapour ?
- En quoi consiste-t-elle et comment s’applique-t-elle ?
- Quelle méthode est utilisée en France actuellement ?
- La méthode Singapour est-elle applicable en France ?
Qu’est-ce que la méthode de Singapour ?
La méthode de Singapour, reconnue mondialement, propose une approche originale dans l’enseignement des mathématiques. Elle se distingue par sa stratégie pédagogique axée sur la compréhension en profondeur des concepts mathématiques, plutôt que sur le simple apprentissage par cœur.
En France, en effet, l’apprentissage des maths se fait via le calcul mental et la résolution de problèmes que les élèves doivent résoudre sur papier. La méthode de Singapour propose de rendre les maths plus compréhensibles via la manipulation d’objets. Elle présente aussi aux élèves des situations concrètes.
Cette méthode a été conçue dans les années 1980. C’est à partir de 1995 qu’elle commence réellement à faire parler d’elle, lorsqu’elle est classée première aux évaluations TIMSS (Trends in International Mathematics and Science Study).
En quoi consiste-t-elle et comment s’applique-t-elle ?
Cette méthode est définie par trois étapes :
- le « concret » : les élèves manipulent des objets du quotidien, des cubes ou des jetons ;
- « l’imagé » : on passe à la représentation visuelle de ces objets, c’est-à-dire des dessins montrés aux élèves ou dessinés sur le tableau ;
- « l’abstrait » : ici, images et objets sont remplacés par des chiffres.
Jean Nemo, directeur général de La Librairie des écoles, donne un exemple de l’application de cette méthode sur le site de BFMtv. Il prend l’exemple du problème suivant : 3 canards sont dans une mare, 2 sont à l’extérieur ; combien y a-t-il de canards en tout ?
« Les enfants sont d’abord invités à manipuler des cubes, chaque cube représentant un canard. Puis, on dessine au tableau d’abord les cubes en 3D, puis en 2D. Enfin, on arrive à l’addition 3 + 2 = 5… », explique-t-il.
Il peut sembler logique que les élèves de primaire appréhendent les mathématiques de façon matérielle pour mieux les comprendre. Avec la méthode de Singapour, l’enfant « doit toucher, mesurer, construire avec ses mains, ressentir directement avec son corps, comme dans un jeu, ne surtout pas être passif », expliquait en 2018 la mathématicienne Monica Neagoy à 20 minutes.
Quelle méthode est utilisée en France actuellement ?
En France, l’enseignement des mathématiques s’appuie des approches plus classiques : la mémorisation, le calcul, la résolution de problèmes. L’accent n’est pas forcément mis sur la compréhension concrète des mathématiques.
D’abord, les élèves commencent à reconnaître les nombres à l’écrit et à l’oral. À partir du CM1, ils apprennent les fractions et les nombres décimaux. L’accent est, bien sûr, beaucoup mis sur le calcul mental, notamment avec l’apprentissage par cœur des tables de multiplication.
Cependant, il existe en France quelques méthodes ayant pour but d’aider les élèves à comprendre les mathématiques via la manipulation d’objets. La méthode Picbille, créée par Rémi Brissiaud, en est un très bon exemple. Utilisée en primaire (du CP au CM2), elle a pour objectif de faire apprendre le calcul mental grâce à des boîtes et des jetons.
La méthode Singapour est-elle applicable en France ?
La méthode de Singapour devrait profondément transformer la manière dont les mathématiques sont enseignées et appréhendées en France.
Mais il faudrait pour cela une formation suivie des professeurs. Comme l’écrivait Rémi Brissiaud en 2018 : « La formation initiale et continue des enseignants à Singapour est sans aucune commune mesure avec ce qu’elle est en France, tant dans la durée que dans la qualité. » Et pour cause : d’après Jean Nemo, les enseignants de Singapour bénéficient de 400 heures de mathématiques en formation initiale, contre 80 heures en France.