La procédure de traitement de la T.V.A. intracommunautaire

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Objectifs

  • Pouvoir appliquer les règles fiscales d’exigibilité.
  • Savoir évaluer la T.V.A. due ou le crédit de T.V.A. – voir leçon T.V.A. (3).
  • Pouvoir comprendre et utiliser la réglementation liée aux opérations intracommunautaires.
  • Savoir analyser et enregistrer les opérations intracommunautaires.

Notions

  • Opérations imposables, opérations exonérées.
  • Champ d’application.
  • Opérations intracommunautaires.

I. Le principe et champ d’application de la T.V.A.

Bien que la plupart des transactions soient soumises à la T.V.A., il existe des exceptions*.

Il est important de noter que seule la France métropolitaine (hors outre-mer) est soumise à la T.V.A.. Les départements et territoires outre-mer (par exemple la Guadeloupe et l’île de la Réunion) sont considérés comme non français en matière de T.V.A. et entrent dans la catégorie des exportations et importations – voir fiche La procédure du traitement fiscal de calcul de la T.V.A. due, du contrôle de la déclaration et de l’exonération de la T.V.A. – exonérées de T.V.A.

En règle générale, toute livraison de biens ou prestations de service impliquant une transaction financière par une personne physique ou morale est assujettie à la T.V.A.. Cependant, il y a des exceptions : par exemple les opérations médicales, les opérations d’assurance, les opérations d’enseignement.

Dans le champ d’application de la T.V.A., il existe trois distinctions géographiques :

  • les acquisitions en France métropolitaine ;
  • les acquisitions en Europe (échanges intracommunautaires) ;
  • les acquisitions internationales (importations/exportations).

La T.V.A. sur les imports/exports (internationale, hors intracommunauté): Les importations sont soumises à la T.V.A. dès l’entrée dans le territoire national, avec des frais de douane additionnels.

1) Les opérations imposables

  • Par nature : Les opérations effectuées à titre onéreux, par un assujetti, dans le cadre d’une activité économique.
  • Par détermination de la loi :
    - les livraisons à soi-même ;
    - les importations (acquisition internationale hors intracommunauté) en provenance d’autres pays que l’Union européenne ;
    - les acquisitions intracommunautaires (provenant de pays de l’Union européenne : UE).

Est considérée comme acquisition intracommunautaire l’obtention de pouvoir disposer comme propriétaire d’un bien meuble corporel expédié ou transporté par le vendeur, par l’acquéreur ou pour leur compte, à partir d’un État de l’Union européenne (UE) à destination de l’acquéreur en France.

  • Par option : Les opérations normalement non soumises à la T.V.A., pour lesquelles le contribuable demande à être assujetti – par exemple les locations de locaux nus à usage professionnel industriel et commercial (article 261 D du CGI)*.

(*) Car par principe les locations de locaux nus à usage professionnel sont exonérées de la T.V.A. (article 261 D du CGI), mais exonérées par option.

2) Les opérations exonérées

Les opérations normalement passibles de la T.V.A., pour une disposition législative :

  • Les opérations de commerce extérieur

- Exportations (hors UE : ventes au niveau international) : Exonérées de T.V.A., cela signifie qu’il n’y a pas de T.V.A. sur les ventes de biens ou services d’une entreprise française à une entreprise étrangère.

- Livraisons intracommunautaires (en direction de pays de l’UE).

  • Pour motivation sociale

- Prestations médicales ; loyers d’habitation.

  • Les opérations diverses

- Bancaires ou financières, assurance ou réassurance.

II. Le principe et la réalisation d’opérations intracommunautaires

  • La T.V.A. sur les échanges intracommunautaires ; de la France vers un pays de l'Union européenne (UE) : Les ventes depuis la France vers un autre pays de l’UE sont exonérées de T.V.A. française, sous certaines conditions comme la mention sur la facture « exonération de T.V.A., article 262 ter I du CGI ».
  • D’un pays de l’UE vers la France : Un achat (appelé acquisition intracommunautaire) auprès d'une entreprise de l’UE entraîne le paiement d'une T.V.A. (calculée sur le taux français) par l’entreprise française.
    Exemple : Une boucherie française achète de la viande à un abattoir espagnol pour 20 000 €. Sur ce montant, 20 % de T.V.A. française est appliquée, soit 4 000 € (20 000 × 20 %) déductibles intracommunautaires pour l’entreprise française lors de la déclaration de T.V.A. – voir fiche T.V.A. (3).

Les opérations intracommunautaires peuvent être réalisées hors zone euro ou dans celle-ci.
Mais dans les deux cas les opérations intracommunautaires présentent des spécificités, en particulier vis-à-vis de la T.V.A. et sa comptabilisation.

1) Le principe d’opération intracommunautaire

Les opérations intracommunautaires ne sont pas soumises aux droits de douane (car l’Union européenne constitue un marché unique) et sont en principe exonérées de T.V.A. dans le pays de départ (comme les importations/exportations) et imposées à la T.V.A. dans le pays de consommation. Cependant, les biens et les services circulent librement entre les pays de l’Union européenne, il n’y a donc pas de contrôle aux frontières ni d’opérations de dédouanement.

La soumission à la T.V.A. des opérations de livraison ou d’acquisition intracommunautaires ne peut donc se faire au passage de la frontière comme pour les importations/exportations. Elle se fait de façon déclarative – il faut remplir une « déclaration d'échanges de biens » (DEB) –, depuis le 1er janvier 2022 cette dernière est remplacée par une formalité fiscale et une enquête statistique. Chaque entreprise est soumise à deux obligations :

  • répondre à l’enquête mensuelle statistique relative aux échanges de biens intra-UE sur le flux d’expédition ;
  • faire l’état récapitulatif T.V.A. relatif aux livraisons de biens intra-UE comportant des informations pour le contrôle de la T.V.A. intracommunautaire. Autrement dit, chaque entreprise doit déclarer les acquisitions intracommunautaires qu’elle a réalisées puisqu’elles seront soumises à la T.V.A. de son propre pays (du pays de consommation).

2) La réalisation d’opérations intracommunautaires

Les entreprises doivent déclarer les acquisitions qu’elles ont réalisées avec les pays de l’Union européenne et régler la T.V.A. correspondante lors de la déclaration mensuelle de T.V.A.. Afin d’éviter (ou de limiter) les erreurs, oublis ou omissions (volontaires ou non) de déclarations qui feraient échapper les opérations à la T.V.A., les entreprises sont soumises à une série d'obligations. Non seulement elles doivent indiquer lors de leur déclaration de T.V.A. les montants d’achats et de ventes intracommunautaires, mais elles doivent :

  • s’immatriculer et faire figurer leur numéro d’immatriculation intracommunautaire sur les documents commerciaux (par exemple la facture…) ;
  • obtenir de chaque partenaire européen son propre numéro d’immatriculation intracommunautaire et le porter sur leurs documents commerciaux (par exemple la facture…).

Si ces conditions d’application sont remplies, l’entreprise française qui vend à un client de l’Union européenne n’appliquera pas de T.V.A. française sur la facture et la vente sera soumise à la T.V.A. du pays de destination à son arrivée dans ce pays. De même, lorsqu’une acquisition intracommunautaire est réalisée par une entreprise française, si les mêmes conditions sont respectées, la facture du fournisseur ne comporte pas de T.V.A. et l’entreprise française devra déclarer son acquisition et payer la T.V.A. française lors de la déclaration mensuelle. Les acquisitions intracommunautaires ainsi que la T.V.A. à payer correspondante doivent être déclarées sur des lignes spécifiques de la déclaration CA3(formulaire de déclaration mensuelle de T.V.A.). Les conditions ne sont pas toujours remplies, une facturation à un particulier de l’Union européenne ou une entreprise française non immatriculée par choix en raison d’un volume faible d'achats intracommunautaires recevra une facture de son fournisseur (T.V.A. au taux du pays d’origine ), mais ne pourra pas la déduire. Enfin, afin de permettre un contrôle sur les opérations intracommunautaires, les entreprises doivent établir chaque mois une déclaration d’échanges de biens (DEB), sur support papier ou par voie informatique, avec des niveaux d’obligations différents selon les montants des opérations effectuées, qui est envoyée au service des douanes. Depuis le 1er janvier 2022, la DEB est remplacée par une formalité fiscale et une enquête statistique (voir II.A).

3) Les cas particuliers

La T.V.A. intracommunautaire pour les livraisons à des clients particuliers ou non assujettis.

Règle générale :

Les livraisons sur le territoire d’un autre État membre sont exonérées de la T.V.A. française à condition, en particulier :

  • que la livraison soit effectuée à titre onéreux ;
  • que le vendeur soit un assujetti agissant en tant que tel ;
  • que l’acquéreur soit un assujetti ayant fourni son numéro d’immatriculation intracommunautaire ou une personne morale non assujettie citée « personne bénéficiant d'un régime dérogatoire » (PBRD) qui ne bénéficie pas dans son État membre du régime dérogatoire.

Régime particulier :

Les livraisons intracommunautaires aux particuliers et aux non-assujettis ne rentrent pas dans cette réglementation, et sont donc soumises à la T.V.A. française à l’origine par le fournisseur français. La livraison est réalisée en TTC.

Par ailleurs, pour certaines catégories de clients, la réglementation est particulière ; ce sont les personnes bénéficiant d'un régime dérogatoire (PBRD). Celles-ci sont :

  • les personnes morales non assujetties ;
  • les bénéficiaires de la franchise en base (en l’occurrence microentreprise, par exemple) ;
  • les exploitants agricoles en régime forfaitaire.

Pour cette catégorie de client (PBRD), il y a assimilation à des clients particuliers, et donc livraison TTC par le fournisseur, pour les livraisons qui n'excèdent pas un certain volume (10 000 € depuis le 01-01-2002). Au-delà de ce seuil, les acquisitions suivent le régime général.

Les PBRD peuvent choisir par option de ne pas entrer dans ce mécanisme et suivre le régime général dès le premier euro.

Exclusion du régime dérogatoire :

  • La vente à distance (biens livrés par le vendeur d’un État à un autre, à un acquéreur particulier ou une PBRD) constitue toujours une livraison taxable au niveau du vendeur (donc une livraison TTC), mais :

- au taux de l’État du vendeur jusqu’à un certain seuil (100 000 € depuis le 01-01-2002), sauf option possible ;

- au taux de l'État de l’acheteur au-delà de ce seuil.

  • Les achats de moyens de transport neufs par des particuliers ou des PBRD doivent être soumis à la T.V.A. dans l’État membre de destination. Sont considérés comme moyens de transport neufs :

- les bateaux de longueur supérieure à 7,5 m et ayant moins de 100 h de navigation ;

- les avions d’un poids supérieur à 1 550 kg et ayant moins de 40 h de navigation ;

- les véhicules terrestres dont la puissance est supérieure à 7,2 kW ou 48 cm³ et ayant moins de 6 mois. Les produits soumis à accès (alcools, tabacs…) sont toujours taxables selon le régime général.

III. La comptabilisation et l’exigibilité de la T.V.A. d’opérations intracommunautaires

1) La comptabilisation d’opérations intracommunautaires

a. Livraisons intracommunautaires (ventes)

L’enregistrement des ventes intracommunautaires ne présente pas de caractère particulier par rapport à l’exportation sur le plan de la T.V.A. (à condition que le client remplisse les conditions d’application de la T.V.A. intracommunautaire, c’est-à-dire qu’il ait fourni son immatriculation communautaire). Dans ce cas, il n'y a pas de T.V.A. portée sur la facture comme à l’exportation.

b. Acquisitions intracommunautaires

Les acquisitions intracommunautaires nécessitent un traitement comptable particulier par rapport aux achats à l’importation sur le plan de la T.V.A. (à condition que l’entreprise remplisse les conditions d’application de la T.V.A. intracommunautaire, c’est-à-dire qu’elle ait fourni son immatriculation communautaire).

Comme à l’importation, il n’y a pas de T.V.A. portée sur la facture. Mais contrairement à l’importation, les achats ne font pas l’objet d’un dédouanement et d’application de la T.V.A. à ce moment. La T.V.A. sera déclarée – voir fiche T.V.A. (3) – par l’entreprise et acquittée lors de la déclaration mensuelle de T.V.A. (tout en étant également déduite, sauf exception) selon les règles suivantes concernant la date d’exigibilité de la T.V.A. :

  • à la date de la livraison de la facture qui la précède ;
  • à la date de la facture si elle arrive entre la livraison et le 15 du mois suivant ;
  • au 15 du mois suivant la livraison si la facture n’est pas encore arrivée.

La comptabilisation de la T.V.A. due se fait obligatoirement par le crédit d’un compte spécifique « 4452 T.V.A. due intracommunautaire ».

Exemple 1 : La société DURANT réceptionne le 12-10 de la marchandise provenant d’un fournisseur allemand. Le 15-10, elle réceptionne la facture correspondante pour 12 000 € (montant hors taxes).

  • Analyse comptable : Calcul de la T.V.A. française correspondante (exigible et déductible), (12 000 € × 20 %) = 2 400 €.
  • Comptabilisation le 15-10 à la réception de la facture :

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N.B. : Le Conseil national de la comptabilité propose de rajouter un 2 en 4e ou 6e position des comptes habituels pour marquer la nature intracommunautaire de comptes utilisés. Le compte 4452 est obligatoire.

2) L’exigibilité d’opérations intracommunautaires

L’exigibilité de la T.V.A. intervient prioritairement à la date d’émission de la facture. À défaut de facture, la date d’exigibilité sera le 15 du mois suivant la réception des biens. Si la facture a été émise avant le fait générateur, l’exigibilité est à la date de celui-ci.

Exemples :

  • Date de réception des biens : 8 septembre 2023.
  • Date d’exigibilité butoir : 15 octobre 2023.
    Si date d’émission de la facture : 12 septembre 2023 ; date d'exigibilité = 12 septembre 2023.
    Si date d’émission de la facture : 24 novembre 2023 ; date d'exigibilité = 15 octobre 2023.

Traitement comptable des acquisitions intracommunautaires

Exemple 2 : La facture est reçue avant le 15 du mois suivant la date de réception des biens (cas général) : Réception estimée HT 1 000 € , facture correspondante HT 1 100 €.

  • Analyse comptable : Calculs de T.V.A.
    s/montant estimé : 1 000 × 20 % = 200 €
    s/montant de la facture : 1 100 × 20 % = 220 €
  • Comptabilisation montants estimés enregistrés : deux comptes d’attente 408(.)2 (facture) et 445 862 (T.V.A.).

a. À la réception des marchandises :

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b. À la réception de la facture :

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N.B. : Écriture pour solder le compte d’attente 408 (.) 2 à la réception de la facture :

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