L’enjeu de la langue

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On estime que sept mille langues sont actuellement parlées dans le monde. Mais seules une dizaine d’entre elles sont utilisées à l’échelle mondiale, manifestation de la puissance de certains États et vecteur de l’affirmation de leur soft power.

I. La langue, manifestation de la puissance

1) L’importance historique du français

À partir de la fin du XVIIe siècle, le français devient la langue de la diplomatie. Son omniprésence illustre alors le rôle majeur de la France dans le domaine politique, diplomatique et culturel, en particulier pendant le règne de Louis XIV (1661-1715).

Malgré les défaites de Napoléon, le congrès de Vienne en 1815 se déroule en français. Mais un siècle plus tard, lors du traité de Versailles en 1919, cette suprématie est révolue au profit de l’anglais.

En 1945, la France obtient que l’une des six langues de travail des Nations unies soit le français. Mais son influence décline : en 1966, 43 délégations s’y exprimaient en français ; elles ne sont plus que 21 en 2000.

2) L’omniprésence contemporaine de l’anglais

C’est au cours du XIXe siècle que l’anglais s’impose comme une langue ­internationale. Le Royaume-Uni est alors le premier empire colonial.

L’utilisation de l’anglais comme langue internationale s’accentue au ­lendemain de la Seconde Guerre mondiale lorsque les États-Unis deviennent la première puissance militaire et économique du monde. ­L’anglais est utilisé dans les organisations internationales les plus importantes.

Chiffres clés

On estime aujourd’hui que l’anglais est parlé par 1,132 milliard d’individus, en tant que langue maternelle et seconde langue, contre 1,116 milliard pour le chinois.

L’anglais est la langue privilégiée dans le monde des affaires, du spectacle et des sciences. Ainsi, plus de la moitié des contenus diffusés sur Internet est en anglais alors qu’un quart des internautes est anglophone.

II. La langue, outil de puissance et d’influence

1) Le modèle de la francophonie

Afin de résister à cette vague anglophone, la France a institutionnalisé les relations entre pays francophones, représentant 280 millions de locuteurs. En 1970 est ainsi créée l’Agence de coopération culturelle et technique (ACCT).

Devenue en 2005 l’Organisation internationale de la francophonie (OIF), cette structure est vue par ses détracteurs comme un outil de puissance au service de la France, notamment dans le cadre de ses relations avec ses anciennes colonies africaines.

Mot clé

Composée de 88 membres, l’Organisation internationale de la francophonie a des objectifs larges : promouvoir la langue française, favoriser la paix et la démocratie, appuyer l’éducation.

Sur le modèle de l’OIF, ont été créés la Communauté des pays de langue portugaise (CPLC) ou encore le Conseil turcique qui regroupe cinq États turcophones.

2) Les instituts de langue

Promouvoir une langue passe également par son apprentissage. Les États ont ainsi créé des centres de langue répartis dans le monde entier. Les instituts Goethe, par exemple, diffusent l’allemand depuis 1951.

En 2004, le gouvernement chinois met en place le réseau des instituts ­Confucius. Il en existe près de 500 aujourd’hui. Dispensant des cours et délivrant des diplômes, ils participent de la diffusion de la culture chinoise dans le monde. Pour certains, ils relèvent d’une stratégie de sharp power.

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Des langues en voie d’extinction

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On estime aujourd’hui qu’environ 3 000 langues sont en danger. Une langue disparaît lorsque ses locuteurs se mettent à parler une autre langue, en général sous la pression militaire, économique ou culturelle d’un État plus fort.

Reflet de ce rapport de puissance, c’est dans les régions les plus pauvres (Mélanésie, Afrique subsaharienne et Amérique du Sud) que la diversité linguistique est la plus menacée.