Légende de la leçon
Vert : définitions
I. Une guerre totale
1) Les grandes phases du conflit
L’assassinat de l’archiduc François-Ferdinand, héritier de l’Empire austro-hongrois, par un nationaliste serbe, le 28 juin 1914, engendre une crise diplomatique qui débouche sur la guerre. En raison des alliances militaires qui opposent la Triple Alliance (Italie, Allemagne et Autriche-Hongrie) à la Triple Entente (France, Royaume-Uni et Russie), l’Europe mobilise ses forces et entre en guerre début août 1914.
De 1914 à 1917, après l’avancée des troupes allemandes à l’Ouest comme à l’Est, débute la guerre de position. La stabilisation des fronts engendre l’enlisement du conflit. Les armées s’enterrent : c’est la guerre des tranchées. Le conflit s’annonce très long.
L’année 1917 marque un tournant. Deux révolutions renversent le tsarisme en Russie. Les États-Unis, quant à eux, entrent en guerre le 6 avril 1917, victimes de la guerre sous-marine menée en Atlantique par l’Allemagne.
Au printemps 1918, la guerre de mouvement reprend. La Russie signe la paix avec l’Allemagne à Brest-Litovsk. Aidés par les Américains, les Alliés repoussent l’armée allemande qui capitule le 11 novembre 1918. Le traité de paix est signé à Versailles le 28 juin 1919.
Définitions
Poilu. Terme qui désigne le soldat français qui ne dispose pas des moyens de se raser. L’expression renvoie plus largement à l’âge adulte nécessaire à l’enrôlement dans l’armée.
Tranchées. Réseau de lignes de défense creusées dans le sol pour faire face à l’ennemi. Le no man’s land est l’espace particulièrement dangereux situé entre deux tranchées adverses.
2) Une mobilisation sans précédent
De 1914 à 1918, 70 millions d’hommes sont mobilisés. 15 % des soldats allemands et français sont tués, soit 10 millions de combattants. Un combattant sur deux est blessé. Ceux d’entre eux dont le visage est mutilé (14 000 soldats) sont appelés les « gueules cassées ». La mortalité de masse témoigne d’une « brutalisation » contraire aux lois de la guerre. Les civils sont lourdement touchés en raison de l’occupation militaire de territoires conquis par l’ennemi (mise en place d’un travail forcé). Dans l’Empire ottoman, les deux tiers des Arméniens (1,5 million de personnes) périssent dans le génocide provoqué par le gouvernement turc.
Dès 1914, la France et le Royaume-Uni recrutent des hommes dans leurs colonies. 175 000 tirailleurs algériens, 40 000 Marocains, 80 000 Tunisiens et 180 000 Subsahariens (regroupés dans la « Force noire ») composent les troupes coloniales françaises. 870 000 Indiens sont employés par l’armée britannique qui fait également appel à 1,3 million d’hommes venus des dominions (Australie, Nouvelle-Zélande, Canada et Afrique du Sud). Avec l’entrée en guerre des États-Unis, la guerre devient véritablement mondiale. Les principales zones de combats se localisent en Europe et au Moyen-Orient.
Les populations de l’arrière participent à l’effort de guerre. Les femmes remplacent les hommes partis au front. Elles travaillent dans des usines d’armement où 1 milliard d’obus sont fabriqués en 5 ans. L’économie de guerre dirigée par l’État mise sur une production industrielle rationalisée (extension du travail à la chaîne). Les intellectuels, journalistes, écrivains s’engagent dans la « bataille de papier » (production de livres et d’articles de presse) afin d’entretenir un patriotisme défensif. La censure s’empare de la presse. Les scientifiques se mobilisent et réalisent des progrès en optique, en chimie (gaz de combat), en aéronautique ou encore en médecine. La propagande envahit tous les moyens d’information : c’est le « bourrage de crâne » qui cherche à conserver le bon moral de la population et à légitimer la guerre. La vie démocratique est mise entre parenthèses et un rapport de force oppose les militaires à la classe politique qui cherche à les contrôler.
Définitions
Brutalisation. Synonyme d’« ensauvagement » pour décrire l’ampleur et la brutalité de la violence de guerre dont les soldats et les civils se retrouvent victimes.
Bataille de papier. Expression qui désigne l’engagement patriotique des écrivains, des journalistes, du monde de la presse et de l’édition dans la mobilisation des esprits au service de la guerre.
Bourrage de crâne. Dénonciation par les soldats de la manière dont les médias retranscrivent pour les civils la réalité du front. L’expression finit par désigner la propagande patriotique dans son ensemble.
II. Le règlement difficile du conflit
Plusieurs armistices conclus en 1918 débouchent sur une série de traités de paix. Le traité de Versailles (juin 1919) concerne l’Allemagne et les Alliés de la Triple Entente. En septembre 1919, le traité de Saint-Germain-en-Laye impose à l’Autriche la loi des vainqueurs. En novembre 1919, le traité de Neuilly détermine le sort de la Bulgarie. Le traité de Trianon (en juin 1920) s’occupe du cas de la Hongrie. Enfin, le traité de Sèvres fixe provisoirement la paix entre les Alliés et l’Empire ottoman.
En janvier 1919, la conférence de la paix s’ouvre à Paris. Le président américain Wilson, conformément à ses « quatorze points » proclamés en janvier 1918, cherche à créer une Société des Nations (SDN) afin de garantir la paix. Le 28 juin 1919, la signature du traité de Versailles impose à l’Allemagne des conditions très dures qu’elle vit comme un « diktat ». La paix conclue est celle des vainqueurs contre les vaincus. Les puissances victorieuses dominent la SDN installée à Genève, en Suisse. Les États-Unis reviennent à un isolationnisme et décident finalement de ne pas rejoindre la SDN. Celle-ci dispose de moyens limités mais incarne la volonté de garantir la sécurité collective : c’est « l’esprit de Genève ».
III. La disparition des empires européens
Vers 1918-1919, la carte de l’Europe est largement remaniée. Les traités de paix contribuent au démembrement des empires. Le 9 novembre 1918, le kaiser Guillaume II démissionne et met fin à un demi siècle d’Empire allemand. La République de Weimar lui succède. Le 12 novembre 1918, la proclamation à Vienne de la République met un terme à l’Empire austro-hongrois. Vaincu par les troupes arabes et occidentales, l’Empire ottoman perd une grande partie de ses territoires et finit par disparaître en 1922 au moment de la naissance de la République turque. Sous les effets dévastateurs de la guerre, l’Empire russe voit son régime tsariste renversé par deux révolutions successives qui conduisent les communistes et Lénine au pouvoir. La Russie soviétique entre dès lors dans un dramatique épisode de guerre civile qui débouche sur la naissance de l’URSS en 1922.
La dislocation des empires engendre la naissance de 10 nouveaux États indépendants. L’Allemagne, l’Autriche et la Turquie perdent leurs anciennes possessions et deviennent de simples États-nation. La Tchécoslovaquie et la Yougoslavie naissent des cendres de l’ancien Empire austro-hongrois. La disparition de l’Empire russe donne naissance dès 1917 à la Finlande puis aux trois pays baltes (Estonie, Lettonie, Lituanie). La Pologne renaît avec un accès à la Baltique (le corridor de Dantzig) qui isole la Prusse orientale du reste de l’Allemagne. Les ruines laissées par les empires modifient donc considérablement les frontières en Europe. Tous ces changements géopolitiques contribuent à déstabiliser le vieux continent qui n’en a pas fini avec les conflits.
L’Europe en 1914-1918