La littérature d'idées au XIXe siècle

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Comme les philosophes des Lumières au siècle précédent, les écrivains du XIXe siècle s’engagent dans le débat public. Ils prennent parti sur des questions politiques, sociales ou esthétiques, dans des genres différents et sous des formes variées qui constituent le champ très vaste de la littérature d’idées de cette époque.

I Le mage romantique

Pour Victor Hugo, parce que le poète détient un savoir sur le monde, il est un mage, un prophète qui doit guider le peuple vers des « jours meilleurs », comme il l’écrit dans « Fonction du poète » (Les Rayons et les Ombres, 1840). L’écrivain romantique n’hésite donc pas à s’engager dans la vie politique, tels Lamartine et Hugo, qui furent tous deux élus députés.

Plus généralement, l’engagement social et politique des romantiques se manifeste dans leurs œuvres, notamment pour dénoncer l’injustice ou la misère. Au-delà de l’essai, tous les genres sont mobilisés : la poésie satirique dans Les Châtiments de Hugo (1852), le roman social dans La Mare au diable de George Sand (1846) ou Les Misérables de Hugo (1862).

Mais la littérature d’idées romantique s’intéresse aussi aux débats esthétiques de son temps : les innovations des romantiques donnent parfois lieu à de véritables querelles, comme lors de la célèbre « bataille d’Hernani ». Certains auteurs s’adonnent à la critique d’art pour défendre les artistes qui comptent à leurs yeux, tel Baudelaire dans ses Salons (1845-1859).

II La naissance de l’intellectuel

Après le romantisme, le roman devient le lieu privilégié de l’engagement socio-politique des écrivains : à bien des égards, par exemple avec Germinal (1885), Zola renouvelle la tradition du roman social.

Sur le plan esthétique, les écrivains multiplient préfaces et manifestes pour défendre leur vision artistique : Zola défend le naturalisme dans de nombreux textes théoriques, tels que Le Roman expérimental (1880), rejoint par Maupassant qui définit le réalisme dans son célèbre essai sobrement intitulé « Le Roman » et publié en préambule de Pierre et Jean (1888).

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Citation

« L’artiste part du même point que le savant ; il se place devant la nature, a une idée a priori et travaille d’après cette idée. » (Zola, Le Roman expérimental, 1880)

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Mot clé

Au moment de l’affaire Dreyfus (1894-1906), l’adjectif « intellectuel » est transformé en nom pour désigner les écrivains et penseurs qui signent des pétitions en soutien au capitaine Dreyfus.

À la fin du siècle, quelques grandes affaires politiques poussent certains écrivains à s’engager plus nettement encore dans les débats de leur temps : c’est particulièrement le cas de l’affaire Dreyfus, du nom de cet officier juif injustement accusé de trahison, et dont Zola prend la défense dans son célèbre « J’accuse… ! » (1898). C’est l’acte de naissance de l’écrivain comme intellectuel.

III Le rôle de la presse

Le poids grandissant des écrivains dans le débat public est directement lié au développement de la presse à grand tirage. Celle-ci constitue une formidable caisse de résonance pour les engagements de certains auteurs : le quotidien L’Aurore est tiré à plusieurs centaines de milliers d’exemplaires à l’occasion de la publication de « J’accuse… ! ».

Apparaissent aussi de nombreuses revues, publiées sur un rythme plus lent (souvent mensuel), telles que la célèbre Revue des deux mondes née au début du XIXe siècle. Elles offrent aux écrivains (Dumas, Balzac, Baudelaire, George Sand…) de nouveaux lieux de publication, propices à l’écriture de brefs essais philosophiques, historiques ou politiques, mais aussi de textes de critique littéraire et artistique.