L’information asymétrique : sélection adverse et aléa moral

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Dans cette leçon, tu découvres les deux grandes formes d’asymétrie d’information : la sélection adverse, qui agit avant l’échange et fausse les transactions, et l’aléa moral, qui agit après et pousse à des comportements opportunistes. Tu verras aussi comment incitations privées et intervention publique rétablissent la confiance et corrigent ces défaillances de marché. Mots-clés : asymétrie d’information, sélection adverse, aléa moral, assurance, confiance, défaillance de marché.

Introduction

Pourquoi hésite-t-on parfois à acheter une voiture d’occasion, même si le prix est attractif ? Pourquoi les compagnies d’assurance imposent-elles des franchises ou des contrôles à leurs clients ? Ces situations mettent en lumière une asymétrie d’information, c’est-à-dire un déséquilibre dans l’accès à l’information entre deux acteurs d’un échange. Lorsqu’un vendeur ou un acheteur sait des choses que l’autre ignore, le fonctionnement du marché est perturbé. Les économistes distinguent deux formes principales d’asymétrie d’information : la sélection adverse et l’aléa moral.

La sélection adverse : un problème avant l’échange

La sélection adverse survient avant la conclusion d’un contrat ou d’une transaction. L’agent qui détient une information privée peut en tirer avantage au détriment de l’autre.

L’exemple classique est celui du marché des voitures d’occasion, analysé par l’économiste George Akerlof. Le vendeur connaît parfaitement l’état réel du véhicule (voiture fiable ou « casserole »), mais l’acheteur ne peut pas le savoir avec certitude. Par prudence, l’acheteur n’est prêt à payer qu’un prix moyen. Les bons vendeurs, qui savent que leur voiture vaut davantage, refusent alors de vendre à ce prix. Ne restent sur le marché que les véhicules de moindre qualité. Peu à peu, les acheteurs, anticipant ce phénomène, se détournent du marché. Ce mécanisme peut aboutir à un échec du marché : le marché existe encore, mais il devient inefficace, car les transactions se concentrent sur les biens de mauvaise qualité et la confiance s’effondre.

À retenir

La sélection adverse agit avant l’échange. Elle fausse la rencontre entre offre et demande et peut conduire à un échec du marché par manque de confiance.

L’aléa moral : un problème après l’échange

L’aléa moral se manifeste après la conclusion du contrat. Ici, un agent modifie son comportement car il sait qu’il ne supportera pas pleinement les conséquences de ses actes, profitant du manque d’information ou de surveillance de l’autre partie.

Le cas typique est celui de l’assurance. Une personne assurée contre les accidents de voiture peut être tentée de conduire moins prudemment, car elle sait que les réparations seront prises en charge par l’assureur. Comme l’assureur ne peut pas observer parfaitement la conduite de ses clients, il supporte un risque accru de sinistres. Pour limiter ce risque, les compagnies d’assurance mettent en place des incitations : franchises (le client prend en charge une partie des réparations), bonus-malus (les conducteurs prudents paient moins cher), ou contrôles techniques réguliers.

À retenir

L’aléa moral agit après l’échange : l’assuré, protégé, peut adopter un comportement plus risqué. Les assureurs mettent en place des incitations pour rétablir l’équilibre.

Le rôle de l’intervention publique : restaurer la confiance

Au-delà des mécanismes privés, les pouvoirs publics interviennent pour réduire les asymétries d’information et restaurer la confiance nécessaire aux échanges. Dans le cas de la sélection adverse, ils imposent des règles de transparence ou des certifications : contrôle technique obligatoire pour les voitures d’occasion, mais aussi étiquetage alimentaire, labels de qualité comme « bio » ou « AOP » pour l’alimentaire, ou encore certifications médicales et pharmaceutiques pour garantir la fiabilité des produits de santé.

Dans le cas de l’assurance, la réglementation impose certaines garanties minimales (assurance automobile obligatoire) ou encadre les contrats pour éviter les abus. L’objectif est toujours le même : donner aux consommateurs une information fiable pour rétablir la confiance et permettre au marché de fonctionner plus efficacement.

À retenir

L’État complète les incitations privées par des règles de transparence et des labels de qualité. En renforçant la confiance, il corrige les asymétries d’information et limite les défaillances de marché.

Conclusion

L’information asymétrique est une cause majeure de défaillance de marché. La sélection adverse, qui agit avant l’échange, peut dégrader la qualité des transactions au point de faire échouer le marché. L’aléa moral, qui agit après l’échange, pousse certains acteurs à adopter des comportements opportunistes, comme dans l’assurance. Dans les deux cas, la confiance entre acteurs est rompue, et le marché ne parvient pas seul à allouer efficacement les ressources. C’est pourquoi les incitations privées (franchises, bonus-malus) et l’intervention publique (transparence, labels, réglementations) sont essentielles pour rétablir la confiance et garantir le bon fonctionnement des échanges.